L’exposition des enfants d’âge préscolaire à des contenus violents à l’écran est associée à une augmentation des comportements antisociaux et violents chez les garçons durant l’adolescence, prévient une nouvelle étude réalisée par un chercheur de l’Université de Montréal.
Jean-Benoit Legault
La Presse Canadienne
À l’âge de 15 ans, les garçons qui ont été exposés à ce contenu violent seront plus susceptibles de frapper ou de battre une autre personne avec l’intention de la voler ou d’en profiter ; recourir à des menaces et des insultes ; participer à des bagarres entre bandes d’adolescents ; et utiliser des armes.
L’exposition était également associée à des comparutions devant les tribunaux pour divers crimes, des séjours dans des centres de jeunesse et des interactions avec les forces de l’ordre.
«Entre quatre et six ans, c’est la période pendant laquelle on apprend à interagir avec les autres», a expliqué l’auteure de l’étude, la professeure Linda Pagani, qui a d’abord évoqué ses travaux avec La Presse Canadienne. C’est à ce moment-là que nous sommes socialisés. Et lorsque les enfants sont exposés à des modèles renforcés en matière de violence et d’agression, c’est ce qui se produit. »
Les chercheurs ont utilisé les données de l’Étude longitudinale sur le développement des enfants au Québec réalisée par l’Institut de la statistique du Québec pour mener à bien leurs travaux. Ils ont noté une association significative uniquement parmi les garçons, ce qui, selon eux, n’est pas surprenant puisque les garçons sont plus attirés par les contenus rapides et agressifs.
Les enfants exposés à des contenus télévisés violents « deviennent désensibilisés aux actes agressifs et banalisent leurs conséquences », affirment les auteurs. Ils deviennent « moins sensibles à la souffrance des autres et donc moins empathiques à leur douleur, et peuvent même développer des attitudes positives à l’égard de la violence ».
La corrélation entre l’agression proactive, l’agression physique et la délinquance et l’augmentation du temps passé devant un écran chez les garçons d’âge préscolaire, quel que soit le contenu violent, pourrait s’expliquer par le fait que le temps passé devant un écran réduit les opportunités d’interaction sociale avec les pairs, « ce qui pourrait créer un état d’esprit qui prédispose les personnes touchées ». les individus à résoudre la concurrence sociale, les défis et les conflits de manière méchante, pessimiste et moins tolérante », expliquent les auteurs de l’étude.
L’exposition à du contenu violent entraîne probablement des pensées agressives, des sentiments de colère et des niveaux d’excitation qui sont influencés par des facteurs personnels et situationnels, qui à leur tour ont un impact sur les processus d’évaluation et de prise de décision. décision pour déterminer les comportements agressifs ou non agressifs qui s’ensuivent, peut-on lire dans l’étude.
L’exposition par procuration à un âge où les enfants n’ont pas toujours la capacité cognitive de faire la différence entre la fiction et la réalité, poursuit-elle, peut biaiser les perceptions des enfants d’âge préscolaire et influencer leur façon de réagir. à ces violences.
-“Cela conduit les jeunes exposés à faire des attributions plus hostiles aux autres et à agir de manière agressive dans des situations sociales ambiguës parce qu’ils perçoivent le monde comme dangereux”, écrivent les auteurs. Ces processus d’information socio-cognitive pourraient éventuellement s’enraciner, contribuant ainsi à expliquer pourquoi les enfants exposés à la violence à la télévision présentent davantage de comportements antisociaux à l’adolescence. »
Ados en difficulté, adultes en difficulté
Et ces adolescents en difficulté ne se transforment évidemment pas miraculeusement en adultes bien adaptés qui apportent une contribution positive à la société, préviennent les auteurs de l’étude.
“Quand ces jeunes ont été exposés à beaucoup de violence et ont entamé une trajectoire inappropriée dans leur socialisation, ils sont encore plus attirés par la polémique, par le drame, parce qu’ils ne savent pas apprécier la paix, a expliqué M.moi Pagani. Ils ne sont pas réveillés s’il n’y a pas de drame. Et quand on est agressif comme ça, c’est difficile de s’intégrer dans la société. »
Les adolescents agressifs présentent davantage de symptômes dépressifs et de stress à long terme, une plus faible estime de soi, moins d’empathie et moins de satisfaction dans la vie à l’âge adulte, écrivent les auteurs. Ils sont également plus susceptibles d’avoir des capacités de communication moins efficaces et une moindre cohésion avec leur famille, même des années après l’adolescence.
“Les comportements externalisés à l’adolescence persistent souvent à l’âge adulte, les jeunes présentant les niveaux les plus élevés étant quatre à cinq fois plus susceptibles de développer des comportements perturbateurs et des troubles émotionnels”, rappellent les auteurs.
Les adolescents antisociaux sont plus sujets à la toxicomanie, à l’anxiété et aux troubles de l’humeur, ainsi qu’à un fonctionnement social altéré à l’âge adulte. souligner Mmoi Pagani et collègues. Ces effets sont d’autant plus graves, disent-ils, que les comportements d’extériorisation apparaissent dès l’enfance et se poursuivent au-delà de l’adolescence, augmentant ainsi le risque de problèmes psychosociaux à l’âge adulte.
Les parents doivent comprendre que la technologie est un outil, a conclu M.moi Pagani. Ils doivent également prendre conscience que les écrans et les contenus qui s’y trouvent, même s’ils peuvent temporairement retenir l’attention des enfants pendant que nous vaquons aux tâches ménagères, pourraient avoir un impact néfaste à long terme.
“Les jeunes vont avoir des difficultés au travail, ils vont avoir des difficultés dans leurs relations amoureuses, ils vont avoir des difficultés avec la concierge de l’appartement”, dit-elle. Nous devons absolument nous demander en ce moment : est-ce le genre de société que nous voulons, est-ce ce que nous voulons pour la société ? »
Les résultats de cette étude ont été publiés par leRevue internationale de recherche environnementale et de santé publique.