Une équipe de chercheurs parisiens a évalué l’incidence des hémopathies malignes survenant pendant la grossesse en France dans une étude appelée HÉMAPREG. Ils montrent que la grossesse n’entraîne pas de perte de chance en termes de survie. L’étude a été publiée dans L’hématologie du Lancet . Présentation des résultats par le Dr Rudy Birsen, hématologue à l’hôpital Cochin de Paris (AP-HP) et co-auteur de l’étude.
Une étude beaucoup plus complète
Basée sur une cohorte nationale du Système National des Données de Santé (SNDS), l’étude HEMAPREG visait à évaluer l’incidence des hémopathies malignes survenant au cours de la grossesse en France, et à analyser les complications maternelles et obstétricales. et obtenir des données épidémiologiques robustes pour mieux orienter les pratiques médicales.
« Auparavant, nous n’effectuions des essais qu’avec de petites cohortes. Notre étude porte sur des données épidémiologiques sur l’ensemble de la population française, qui sont beaucoup plus complètes”, souligne le Dr Rudy Birseninterviewé par Paysage médical.
L’étude a inclus toutes les femmes en France dont la grossesse s’est terminée entre le 1est Janvier 2012 et 31 décembre 2022. Les grossesses se terminant par une fausse couche ou une interruption volontaire de grossesse dont les soins n’étaient pas hospitalisés, ainsi que les femmes ayant des antécédents d’hémopathies malignes avant la grossesse, ont été exclues.
1 366 cancers hématologiques associés à la grossesse sur 10 ans
Les résultats ont permis de dénombrer 1 366 cas de cancers hématologiques associés à la grossesse entre 2012 et 2022, en France, sur un total de 9 996 523 grossesses, soit une fréquence de 13,66 pour 100 000 grossesses. Un affinement des données a montré que parmi ces cas, 413 ont été diagnostiqués pendant la grossesse, avec une fréquence de 4,13 pour 100.000 grossesses, et 953 cas dans l’année qui a suivi la grossesse, soit 9,53 pour 100.000 grossesses. 100 000 grossesses.
« Nous nous sommes également posé la question : être enceinte au moment du diagnostic confère-t-il un plus mauvais pronostic ? », poursuit le Dr Birsen. La réponse est non : les femmes atteintes d’hémopathies malignes pendant la grossesse avaient la même probabilité de survie à long terme que les femmes atteintes d’hémopathies malignes qui n’étaient pas enceintes. « La survie est très bonne pour la plupart des hémopathies malignes, même si la leucémie aiguë est plus grave que le lymphome de Hodgkin, par exemple. Quoi qu’il en soit, la grossesse n’a pas entraîné de perte de chance de survie », explique le Dr Birsen.
De nombreuses patientes accouchent prématurément en raison de contraintes thérapeutiques et la maladie peut également provoquer des naissances prématurées.
Dr Birsen
Plus de complications maternelles
Cependant, une analyse complète a montré que ces patientes présentaient davantage de complications maternelles. “Ils ont plus d’infections, de saignements, de transfusions ou de visites aux soins intensifs mais cela est plus lié à leur maladie du sang qu’à leur grossesse”, estime-t-il.
Un risque plus élevé de prématurité a également été mis en évidence (45,2 %) par rapport aux femmes sans hémopathie (6,6 %).
« De nombreuses patientes accouchent prématurément en raison de contraintes thérapeutiques et la maladie peut également provoquer des naissances prématurées », note-t-il.
Les soins doivent être multidisciplinaires avec des centres très spécialisés
Dr Birsen
Par ailleurs, des interruptions médicales de grossesse sont fréquemment observées au cours du premier trimestre de la grossesse, en raison du risque de malformation lié au traitement de chimiothérapie. « Du 2e et 3e trimestres, le risque de malformation disparaît presque. Cependant, une incertitude persiste quant aux troubles neurodéveloppementaux pour certaines expositions », commente le médecin.
Pour lui, ces résultats sont importants pour mieux soigner les patients. « Les soins doivent être multidisciplinaires avec des centres très spécialisés », insiste-t-il.
Une deuxième étude, sur l’évolution des enfants, permettra de déterminer s’ils ont eu des complications durant la période néonatale, avec un suivi sur plusieurs années.
Liens d’intérêt d’experts : Le Dr Birsen rapporte les honoraires de consultation de Bristol Myers Squibb, les frais de présentation de Jazz Pharma et le soutien de Sandoz pour assister aux réunions.
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