« Notre travail ne se limite pas à fournir des vaccins ; nous devons veiller à ce qu’ils atteignent chaque enfant » (Dr Colette Selman, GAVI)

(Agence Ecofin) – En marge d’une visite de terrain au Bénin fin 2024, Dr Colette Selman, directrice des stratégies pour les principaux pays de GAVI, l’Alliance mondiale pour les vaccins et la vaccination, a partagé avec l’Agence Ecofin sa perception des enjeux. et les succès du déploiement des vaccins en Afrique. Elle a présenté un tableau des actions de son équipe sur le continent, notamment au Bénin et au Togo.

De la lutte contre les hésitations vaccinales à l’introduction de vaccins contre le paludisme et le virus du papillome humain (VPH), en passant par l’initiative « Grand rattrapage » Pour rattraper le retard de vaccination provoqué par le Covid-19, les projets sont nombreux.

Agence Ecofin : Pouvez-vous nous en dire plus sur l’initiative « Big Catch-Up » de GAVI ? Quels sont ses objectifs et quels progrès ont été réalisés jusqu’à présent ?

Dr Colette Selman : Le Big Catch-Up est la réponse mondiale de l’Alliance aux perturbations causées par le Covid-19. Il s’agit d’identifier et de vacciner les enfants qui n’ont pas été vaccinés pendant la pandémie, notamment ceux âgés de 1 à 5 ans. Au Bénin par exemple, le gouvernement a récemment lancé le 1concernant phase de cette initiative avec une campagne de prévention axée sur la rougeole et la rubéole comme point d’entrée.

Dr Colette Selman.

Nous avons également alloué 17 millions de dollars de financement pour renforcer les systèmes de santé et l’équité dans les districts prioritaires du Bénin, en mettant en œuvre des stratégies adaptées aux besoins spécifiques, qu’il s’agisse de résoudre les problèmes d’accès à la santé dans les zones reculées ou de lutter contre l’hésitation à la vaccination dans les centres urbains.

À plus grande échelle, GAVI a vacciné 1 milliard d’enfants au cours des 20 dernières années. Nous visons à reproduire ce succès au cours de la prochaine décennie.

AE : L’hésitation à l’égard de la vaccination est un problème persistant, en particulier après que le Covid-19 ait alimenté la désinformation et les fausses nouvelles. Comment votre organisation fait-elle face à ce défi ?

CS : Vous avez tout à fait raison. La propagation de fausses informations pendant la pandémie a eu un impact significatif sur la confiance dans les vaccins. Et notre approche est multiforme.

Au niveau communautaire, nous collaborons avec des dirigeants locaux de confiance – personnalités religieuses, agents de santé, pairs – pour déconstruire les mythes et fournir des informations précises. Au niveau national, nous travaillons avec la société civile et les parlementaires pour garantir que des messages clairs parviennent à un large public.

À l’échelle mondiale, nous travaillons avec des organisations comme l’OMS et l’UNICEF pour lutter contre la désinformation sur des plateformes plus larges. Cela nécessite des efforts continus, car rétablir la confiance n’est pas un processus ponctuel.

AE : Quelles étapes GAVI a-t-elle fixées en Afrique et quels sont les objectifs à long terme pour la région ?

CS : Depuis sa création, GAVI a contribué à l’introduction de 9 vaccins dans 40 pays africains, atteignant 400 millions d’enfants uniques et évitant près de 9 millions de décès sur le continent. Sur les 9 milliards de dollars investis dans le monde, 5,9 milliards ont été alloués aux pays africains.

Un de nos indicateurs clés est le taux de vaccination DTC3 (Diphtérie-Tétanos-Coqueluche en 3 doses, NDLR), qui garantit que les enfants achèvent le schéma vaccinal. Par exemple, en 2020, nous avons atteint plus de 25 millions d’enfants avec 3e dose de vaccin pentavalent.

Les promesses du vaccin contre le paludisme…

AE : En termes de maladies, le paludisme reste une cause majeure de mortalité chez les enfants de moins de 5 ans en Afrique. Comment GAVI soutient-elle le déploiement du vaccin contre cette maladie ?

CS : Le vaccin contre le paludisme est un outil révolutionnaire et nous sommes fiers de soutenir son déploiement. Ces dernières années, 15 pays ont introduit ce vaccin, et d’autres suivront.

Notre rôle consiste notamment à organiser le marché pour garantir la disponibilité des vaccins, à soutenir la chaîne d’approvisionnement et la chaîne du froid, ainsi qu’à former les agents de santé et à sensibiliser la communauté aux spécificités du vaccin.

Ce vaccin fait partie d’une stratégie plus large de lutte contre le paludisme, comprenant l’utilisation de moustiquaires imprégnées et d’autres outils. Pour 2025, nous espérons recueillir davantage d’informations pour continuer à optimiser l’impact du programme et renforcer les efforts de déploiement.

Les partenariats locaux sont au cœur de notre travail. 10 % de nos financements dans chaque pays sont alloués aux organisations de la société civile.

AE : Comment GAVI collabore-t-elle avec les communautés locales et les organisations de la société civile ?

CS : Les partenariats locaux sont au cœur de notre travail. Les dirigeants communautaires et les organisations de la société civile jouent un rôle central en sensibilisant les familles, en soutenant la prestation des soins de santé et en réduisant les écarts entre les services de santé et les communautés.

Par exemple, 10 % de nos financements dans chaque pays sont alloués aux organisations de la société civile pour soutenir leurs efforts essentiels. Cette collaboration garantit que les messages sont adaptés et culturellement pertinents, renforçant ainsi la confiance et augmentant l’adhésion au vaccin.

AE : Quelles sont les priorités de GAVI pour renforcer les systèmes de santé en Afrique ?

CS : Nos priorités restent axées sur la viabilité programmatique et financière, ainsi que sur la résilience. En renforçant les chaînes d’approvisionnement, en formant les agents de santé et en luttant contre la réticence à l’égard de la vaccination, nous visons à intégrer les programmes de vaccination aux systèmes de soins de santé primaires pour contribuer à la couverture sanitaire universelle.

Notre visite faisait partie d’une mission conjointe avec l’OMS, l’UNICEF et d’autres parties prenantes. Nous accordons également la priorité aux partenariats avec des organisations comme l’Union africaine et le CDC Afrique.

Nous accordons également la priorité aux partenariats avec des organisations telles que l’Union africaine et le Centre africain de contrôle et de prévention des maladies (Africa CDC), afin de renforcer la capacité régionale de fabrication de vaccins et d’atteindre une plus grande souveraineté vaccinale.

Sur le Bénin et le Togo

AE : Le Docteur Selman, au Bénin, que vous avez récemment visité, fait face à des défis importants en termes de couverture vaccinale. Selon vous, quels sont les leviers les plus efficaces pour améliorer la situation, notamment dans les zones mal desservies et rurales ?

CS : Les défis du Bénin reflètent ce que nous constatons dans de nombreux pays africains. Notre visite faisait partie d’une mission conjointe avec l’OMS, l’UNICEF et d’autres parties prenantes, pour discuter des stratégies clés avec le gouvernement, les partenaires et la société civile. Pour améliorer la couverture vaccinale, nous avons investi dans les vaccins, les chaînes d’approvisionnement, la gestion de la chaîne du froid, la formation des agents de santé et l’engagement communautaire. Nous avons également récemment lancé l’initiative Big Catch-Up pour toucher les enfants jusqu’à 5 ans.

Plus récemment, le gouvernement béninois a commencé à déployer une politique de santé communautaire, attribuant un rôle clé et un financement aux agents de santé locaux. Ceux-ci identifient les enfants et les familles exclus des services de santé et améliorent la santé communautaire grâce à une approche intégrée, connectant de manière optimale les communautés aux services.

En impliquant des chefs religieux, des associations locales et des personnalités de confiance de la communauté, nous visons à renforcer la confiance et à accroître l’adhésion à la vaccination. Comme je l’ai dit, notre travail ne consiste pas seulement à distribuer des vaccins, mais à veiller à ce qu’ils parviennent à tous les enfants, en particulier dans les zones reculées.

AE : Le Togo a récemment introduit le vaccin contre le VPH. Quels sont les objectifs et comment cela s’intègre-t-il dans la stratégie de santé publique plus large de GAVI ?

CS : La vaccination contre le virus du papillome humain est essentielle pour prévenir le cancer du col de l’utérus, qui est le 2e cancer le plus répandu chez les femmes au Togo. Le vaccin contre le VPH est sûr, très efficace et peut prévenir jusqu’à 90 % des cas de cancer du col de l’utérus.

En décembre 2023, avec le soutien de GAVI, le Togo a lancé son programme avec une double approche : des campagnes de vaccination scolaire pour les filles de 9 ans et des programmes de sensibilisation pour les filles non scolarisées, de nombreux acteurs. et secteurs. Une campagne de rattrapage a également été menée pour vacciner les filles âgées de 9 à 14 ans.

Nous travaillons avec le gouvernement pour pérenniser ces approches et atteindre toutes les filles, notamment en intégrant cette initiative dans une stratégie plus large d’élimination du cancer du col de l’utérus, axée sur la prévention, le diagnostic et le traitement. traitement. Notre objectif est de garantir que toutes les filles du Togo aient accès à ce vaccin salvateur, leur permettant de mener une vie saine et productive.

Interview réalisée par Ayi Renaud Dossavi

Edité par Feriol Bewa

 
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