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« Il faut faire quelque chose rapidement »

Sur la centaine de personnes infectées au cours de la dernière année par la bactérie mortelle qui se propage rapidement dans les hôpitaux québécois, une dizaine est décédée. Les traitements efficaces sont rares et surtout très difficiles à obtenir au Canada.

« Lorsqu’une personne est infectée, nous avons très peu de choix pour la traiter. C’est assez inquiétant”, déclare le Dconcernant Judith Fafard, directrice du Laboratoire de santé publique du Québec.

Cachée dans les éviers, les équipements de soins et les comptoirs des hôpitaux, la bactérie surnommée BGNPC (bacilles à Gram négatif producteurs de carbapénémase) est particulièrement insidieuse. Elle peut s’installer discrètement dans le tube digestif des patients, souvent sans provoquer le moindre symptôme. A ce stade, le patient est dit colonisé par la bactérie.

Mais une blessure liée au cathéter, une intervention chirurgicale ou un système immunitaire affaibli peuvent transformer une colonisation silencieuse en une infection grave. La bactérie est alors susceptible d’envahir les tissus et de déclencher diverses infections, comme des pneumonies, des abcès ou encore des infections urinaires.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE ARCHIVES

Le Dr Yves Longtin, microbiologiste des maladies infectieuses à l’Hôpital général juif

Le temps presse donc : si la bactérie provoque un choc septique – une réaction anormale à une infection pouvant entraîner la défaillance de certains organes – le traitement doit être administré en moins de deux heures pour maximiser les chances de survie du patient. dit le Dr Yves Longtin, microbiologiste des maladies infectieuses à l’Hôpital général juif. Le choc septique est une réaction anormale à une infection pouvant entraîner la défaillance de certains organes. La vie du patient peut être en danger et les soins doivent être prodigués rapidement.

C’est tout un défi, puisque la bactérie est très résistante aux antibiotiques et que les traitements qui pourraient la vaincre sont difficiles d’accès au Canada (voir texte suivant). “C’est un défi”, admet le Dconcernant Theresa Tam, administratrice en chef de la santé publique du Canada, en entrevue avec La presse.

La résistance aux antibiotiques se développe lorsque les bactéries s’adaptent à l’utilisation de médicaments. Il s’agit d’un processus naturel, mais qui s’intensifie en raison de l’activité humaine, notamment en raison de la surconsommation d’antibiotiques.

« La résistance aux antimicrobiens ne semble peut-être pas aussi urgente qu’une pandémie, mais elle est tout aussi dangereuse », a déclaré le chef de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus, en 2020.

Une propagation qui prend de l’ampleur

Chaque année, la propagation de la bactérie BGNPC augmente dans la province, touchant principalement les hôpitaux. Près de deux hôpitaux sur trois au Québec ont signalé au moins un patient porteur de cette bactérie au cours de la dernière année.

“Nous devons faire quelque chose rapidement”, a déclaré le Dr.r Yves Longtin, de l’Hôpital général juif.

Au cours de l’année 2023-2024, 1 259 Québécois se sont révélés porteurs de la bactérie et 99 ont été infectés. Les patients infectés étaient âgés de 4 jours à 104 ans. Plus d’un sur dix a perdu la vie.

Les personnes infectées par la bactérie sont généralement des patients hospitalisés dont le système immunitaire est affaibli, qui ont été traités à plusieurs reprises avec des antibiotiques ou qui ont subi une intervention chirurgicale majeure.

Parmi ceux qui sont porteurs de la bactérie, 95 % ne contracteront jamais d’infection et ne s’en rendront même pas compte. «Leur corps va s’en débarrasser naturellement», affirme le Dr Longtin.

PHOTO JOSIE DESMARAIS, LA PRESSE ARCHIVES

Urgences CHUM. Le Centre hospitalier de l’Université de Montréal est l’établissement le plus touché par la bactérie surnommée BGNPC.

Le Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) a enregistré le plus grand nombre de cas de la bactérie, avec 18 infections et 156 patients porteurs.

Le CHUM affirme « prendre la situation au sérieux pour assurer des soins et des services sécuritaires et de qualité » aux patients. L’établissement applique diverses mesures de prévention, telles que le dépistage rapide des patients, la gestion des antibiotiques, le nettoyage des espaces et du matériel médical, ainsi que l’analyse des canalisations et des éviers.

Quatre établissements ont enregistré trois cas d’infections, soit l’hôpital Maisonneuve-Rosemont, l’hôpital de Chicoutimi, l’Hôtel-Dieu de Québec et l’hôpital de Verdun.

Des pays du monde entier sont préoccupés par la progression du BGNPC.

Dès 2009, l’OMS décrivait ces bactéries comme une menace sérieuse pour la santé publique.

Des cas ont déjà été signalés dans tous les États américains. En 2017, ces bactéries ont même été à l’origine d’environ 13 000 infections chez des patients hospitalisés et d’environ 1 100 décès chez nos voisins du sud.

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE ARCHIVES

La bactérie se propage notamment par les robinets.

Bactéries dans les éviers

La bactérie peut se transmettre notamment par les soignants et les équipements partagés. «La principale voie de transmission entre patients demeure le contact via les mains des travailleurs de la santé», a déclaré Rébecca Guénard-Chouinard, conseillère exécutive aux relations avec les médias du CHUM.

Les canalisations et la plomberie des établissements de santé semblent cependant jouer un rôle non négligeable.

Les éviers et les canalisations constituent probablement une source importante de colonisation.

Le Dr Christian Lavallée, infectious disease microbiologist at Maisonneuve-Rosemont hospital

La bactérie se retrouve dans les égouts lors du rejet des fluides biologiques des patients colonisés. Lorsque les professionnels de la santé versent ensuite des nutriments, tels que des solutés ou un gavage, dans l’évier, ils encouragent la colonisation.

“Une fois que c’est dans les égouts, [les bactéries] promenez-vous dans les chambres », a expliqué Marie Gourdeau, microbiologiste des maladies infectieuses à la retraite, lors d’une journée annuelle de santé publique consacrée au BGNPC au début du mois de décembre.

Les patients peuvent alors être contaminés par des gouttelettes, des robinets ou du matériel de soins. «Les drains n’expliquent pas tous les cas, mais ils ont un apport non négligeable», souligne Marie Gourdeau.

Pour réduire la transmission de ces bactéries, le personnel doit être formé à éliminer les fluides corporels, les restes de sondes d’alimentation et les liquides intraveineux dans les toilettes ou dans un dispositif approuvé et non dans le lavabo de la chambre du patient. .

Comment limiter la résistance bactérienne aux antibiotiques

  • Utilisez des antibiotiques uniquement lorsqu’ils sont prescrits par un professionnel de la santé et pendant la durée recommandée.
  • Ne demandez jamais d’antibiotiques si le professionnel de la santé vous dit que vous n’en avez pas besoin.
  • Ne partagez et n’utilisez jamais d’antibiotiques restants.
  • Obtenez les vaccins recommandés par la Santé publique.
  • Essayez de limiter les infections en pratiquant une bonne hygiène, comme vous laver les mains.
 
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