le péché dangereux du fruit

le péché dangereux du fruit
le péché dangereux du fruit

L’intolérance au fructose – un glucide présent dans de nombreux fruits mais aussi légumes – a été découverte par deux médecins suédois à la fin des années 1960. Ils ont en effet eu l’idée de prescrire un régime sans fructose aux patients souffrant de ballonnements persistants et inexpliqués, de douleurs de type colique et de diarrhée. Résultat : les symptômes ont disparu. Les deux médecins ont ensuite administré du fructose à des patients volontaires et ont quantifié, à l’aide d’un alcootest, la quantité absorbée par l’organisme. Dans le groupe intolérant, la quantité de fructose passant dans le sang s’est avérée nettement inférieure à celle du groupe témoin. Évidemment, le fructose était mal absorbé par l’organisme.

Symptômes de l’intolérance au fructose

L’intolérance au fructose est plus fréquente qu’on ne le pense : elle touche près de 30 % de la population. Toutefois, chez environ la moitié des personnes concernées, cela n’entraîne aucune conséquence significative. En revanche, l’autre moitié souffre de ballonnements, de maux de ventre, de diarrhées, de flatulences, de nausées ou encore de crampes abdominales. On parle de malabsorption du fructose lorsque les symptômes apparaissent après un repas contenant moins de 25 grammes de fructose – ce qui représente un peu moins de deux grosses pommes ou l’équivalent de deux verres de jus de fruits (0,2 litre chacun).

Cela dit, même les personnes en bonne santé ont du mal à consommer plus de 50 grammes de fructose par repas. Au-delà, ils présentent souvent les mêmes symptômes que ceux qui sont intolérants au fructose. L’importance du phénomène est probablement liée à la consommation croissante d’aliments riches en fructose – comme les smoothies et autres boissons sucrées des fast-foods – qui dépasse souvent la capacité normale d’absorption de l’intestin. Le problème est d’autant plus important que les industriels ajoutent du fructose à de nombreux produits alimentaires, notamment dans les plats préparés. La consommation moyenne de fructose s’élève désormais à près de 40 grammes par jour aux Etats-Unis et en , soit une augmentation d’environ 15 % depuis les années 1970. Cette tendance n’a pas seulement favorisé l’intolérance au fructose. le fructose, mais aussi des maladies comme la dyslipidémie (cholestérol), la goutte (liée au métabolisme de l’acide urique) et surtout le diabète de type 2 (dû à un taux de glucose trop élevé).

L’intolérance héréditaire au fructose est plus gênante. Elle se manifeste par des sueurs, des tremblements, des vertiges et des nausées, mais peut provoquer des troubles de la conscience pouvant conduire au coma, voire à la mort du patient.

Causes de l’intolérance au fructose

Le mécanisme à l’œuvre en cas de surdosage en fructose est bien connu. Pour absorber les aliments puis transporter les substances dont l’organisme a besoin, les cellules de la muqueuse intestinale produisent des molécules protéiques spécifiques, adaptées aux composants alimentaires. Rien que pour les différents types de sucre, il en existe plusieurs. Les molécules chargées du transport du fructose ont cependant des capacités limitées. Chez les personnes sensibles au fructose, celles-ci sont dépassées avec moins de 25 grammes par repas. En conséquence, les molécules de fructose non absorbées s’accumulent dans l’intestin grêle et sont ensuite récupérées dans le côlon. Là, les bactéries les réutilisent mais génèrent en même temps des problèmes comme des gaz ou de la diarrhée.

Lorsque des maladies inflammatoires, comme la maladie de Crohn ou la maladie coeliaque, attaquent la muqueuse et endommagent ses cellules, l’intestin grêle ne peut plus non plus absorber le fructose. Les mêmes symptômes que chez les personnes intolérantes au fructose apparaissent alors. Il ne faut pas confondre la malabsorption du fructose avec l’intolérance héréditaire au fructose, beaucoup plus rare (environ 1 personne sur 20 000). Dans ce cas, l’absorption du fructose est normale, mais il manque une enzyme normalement produite par l’organisme (appelée fructose-1-phosphate aldolase hépatique). Toutefois, cette dernière permet d’éviter l’accumulation de substances ayant des effets toxiques pour le foie, les reins et le cerveau.

Diagnostic et thérapies de l’intolérance au fructose

Il n’est pas toujours facile de conclure à une intolérance au fructose, d’autant plus que les symptômes s’apparentent à ceux d’une intolérance au lactose ou du syndrome du côlon irritable. Pour en être sûr, on peut faire un test respiratoire dont le principe est simple : mesurer la quantité d’hydrogène, qui provient du fructose transformé par les bactéries du gros intestin, qui se retrouve dans le sang puis dans les poumons, d’où il expiré. Le patient boit ainsi de l’eau contenant 25 grammes de fructose dissous, puis le médecin mesure la quantité d’hydrogène expirée, au moins deux fois sur plusieurs heures. Résultat : plus l’air expiré par le patient contient d’hydrogène, moins l’organisme tolère le fructose.

Si tel est le cas, la consommation de fructose doit être réduite afin d’atténuer les symptômes. Une consultation avec un nutritionniste permet, grâce à d’autres tests, de déterminer la quantité de fructose que chaque personne est capable d’absorber. Cela permet aussi et surtout de faire des changements dans son alimentation. Mais rassurez-vous : si certains fruits ont un taux de fructose élevé – celui-ci peut atteindre 70 % lorsque les fruits sont séchés ! – certaines possibilités de faible teneur (agrumes, ananas, etc.). Pour être efficace, le régime doit également éliminer – ou limiter – certains légumes riches en fructose, notamment les oignons, les carottes, les courgettes et le poivron rouge. Attention également au miel : il contient près de 40 % de fructose pur !

Cela dit, renoncer aux fruits n’est pas recommandé – sauf pour les personnes présentant une intolérance héréditaire au fructose – car ils sont essentiels dans une alimentation équilibrée. Il est préférable de combiner des aliments contenant du fructose avec des ingrédients à base de glucose. Car du fait d’un mécanisme biochimique complexe, l’absorption du fructose et celle du glucose sont liées : en présence de glucose, les molécules responsables de l’assimilation du fructose décuplent leurs capacités. C’est pourquoi le sucre de table (saccharose), composé de glucose et de fructose, est généralement bien toléré. Il en va de même pour les fruits comme les mûres, les framboises, les agrumes, le melon jaune et la papaye, qui contiennent du fructose et du glucose dans des proportions relativement équilibrées.

A l’inverse, attention au sorbitol ! Ce substitut du sucre présent dans les boissons allégées et les chewing-gums, ainsi que dans de nombreux aliments pour diabétiques, produit l’effet inverse du glucose : il bloque les molécules responsables du transport du fructose, nuisant ainsi à son absorption. Soyez particulièrement vigilant car plusieurs études ont montré les effets néfastes du fructose sur la santé : problèmes de mémoire et de concentration, stress, voire dépression. Une raison de plus pour consommer du fructose avec modération.

➤ Article publié dans le magazine GÉO HORS-SÉRIE SCIENCES, « Le système digestif, Comprendre – Traiter – Prévenir » de décembre 2020 – janvier 2021.

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