lancement d’une deuxième mission au niveau européen

lancement d’une deuxième mission au niveau européen
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Benjamin Davido (infectiologue, hôpital de Garches) échange avec Marie-Cécile Ploy (microbiologiste, CHU de Limoges) sur les enjeux du nouveau Mission européenne JAMRAI-2 , une action commune pour lutter contre la résistance aux antimicrobiens et les infections nosocomiales.

TRANSCRIPTION

Benjamin Davido – Bonjour à tous, nous allons aujourd’hui parler d’un sujet d’actualité même s’il a débuté bien avant 2024 : la mission européenne de lutte contre la résistance aux antimicrobiens, qui s’appelle JAMRAI. Et pour cela, j’ai l’honneur d’accueillir le Père Marie-Cécile Ploy. Pouvez-vous vous présenter ?

Marie-Cécile Ploy – Bonjour à tous, je suis professeur de microbiologie à la Faculté de médecine et à l’hôpital de Limoges. Je dirige un département de bactériologie, virologie et hygiène, ainsi qu’une unité de recherche INSERM sur la résistance aux antimicrobiens.

Benjamin Davido – Alors aujourd’hui on porte la casquette, d’un côté d’Infectiologue et de l’autre côté de Microbiologiste !

Tout d’abord, expliquons à ceux qui nous écoutent ce qu’est concrètement le JAMRAI européen et la définition de l’Action Commune.

Marie-Cécile Ploy – Une action commune est une action décidée par la Commission européenne qui désigne, dans les pays, des entités, des institutions ― qui peuvent être des ministères, des hôpitaux, des agences de santé ― pour travailler ensemble, afin que tous les États membres travaillent conjointement sur un problème spécifique. Donc en matière de santé, il y a eu des actions communes sur la vaccination, sur le tabagisme, etc., et nous voilà dans une action commune sur la lutte contre la résistance aux antibiotiques.

Benjamin Davido – Quel est le problème avec les antibiotiques aujourd’hui ? Nous nous souvenons tous de la campagne « Les antibiotiques ne sont pas automatiques. »

Rappelons que les antibiotiques sont des molécules qui sauvent des millions de vies chaque année, partout dans le monde.

Marie-Cécile Ploy – Le slogan « Les antibiotiques ne sont pas automatiques » existe déjà depuis plus de 20 ans. Il faut d’abord rappeler que les antibiotiques sont de magnifiques molécules qui sauvent des millions de vies chaque année, partout dans le monde – heureusement nous en disposons, car les maladies infectieuses tuent encore beaucoup de personnes.

Mais comme chacun le sait, les bactéries sont des organismes vivants qui peuvent réagir et développer des mécanismes de résistance pour survivre. Nous sommes donc confrontés à une résistance aux antibiotiques, dont les causes sont multiples. Des études montrent que la résistance aux antibiotiques est désormais associée à une mortalité élevée. En 2019, 1,3 million de décès dans le monde étaient associés à la résistance aux antibiotiques. Il s’agit donc d’un véritable enjeu de santé publique.

Benjamin Davido – En tant que coordinateur du JAMRAI, pouvez-vous nous résumer les éléments qui en sont ressortis ― puisque vous avez également participé à la première mission de ce JAMRAI ― et notamment ce symbole de résistance aux antibiotiques que vous arborez fièrement ?

Marie-Cécile Ploy – Oui et j’espère qu’à l’avenir, tout le monde arborera fièrement ce symbole. Dans le premier JAMRAI, qui a duré de 2017 à 2021 et qui a regroupé 26 pays sur les 27 de l’Union européenne, nous avons mené un certain nombre d’actions – je ne vais pas toutes les citer, mais parmi les actions concrètes, il s’agissait d’essayer d’impliquer autant que possible tous les citoyens européens, car il est très important d’impliquer les utilisateurs dans les questions de santé en général.

Nous connaissons des symboles comme le ruban rouge pour la lutte contre le VIH, le ruban rose contre le cancer du sein et nous avons donc lancé un concours pour créer un symbole pour la lutte contre la résistance aux antibiotiques – nous avons eu plus de 600 réponses et c’est une Suédoise qui a gagné, qui a réalisé ce symbole qui représente les deux coeurs pour la santé, mais aussi, on reconnaît des capsules qui se croisent. C’est simple et facile à faire, vous pouvez le faire à la maison. Nous espérons que ce symbole pourra être porté et, à terme, nous aimerions qu’il soit présent sur les boîtes d’antibiotiques.

Marie-Cécile Ploy – Il y a eu d’autres actions chez l’animal et chez l’homme pour le bon usage des antibiotiques avec des recommandations, et nous avons développé un réseau de surveillance des résistances chez les animaux malades, qui n’existait pas en Europe.

Benjamin Davido – Certains n’ont jamais entendu parler de JAMRAI, rappelez-vous que JA c’est pour action communel’AMR pour antimicrobien résistance et l’IA pour infections associées pour les infections nosocomiales.

Comme vous l’avez rappelé, la 1ère mission JAMRAI s’est déroulée de 2017 à 2021, nous soupçonnons que la fin a probablement été impactée par la gestion du COVID. Dans cette nouvelle version qui démarre, JAMRAI 2 (2024-2027), quels sont les nouveaux enjeux ?

Marie-Cécile Ploy – Nous sommes désormais 30 pays, soit 128 partenaires pour un action commune avec 50 millions d’euros, donc c’est beaucoup d’argent, pour des actions concrètes. La Commission européenne souhaite que nous utilisions cet argent pour aider tous les pays à développer leurs plans d’action nationaux pour lutter contre la résistance aux antibiotiques et à mettre en œuvre des actions très concrètes dans chaque pays pour une meilleure utilisation des antibiotiques. . Notamment :

  • nous allons former un certain nombre de praticiens ― cliniciens, microbiologistes, pharmaciens dans plusieurs pays de l’Union européenne ― au bon usage des antibiotiques, car il y a des pays qui n’ont pas beaucoup de personnes formées,

  • nous continuerons à promouvoir le symbole,

  • nous allons continuer le JAMRAI en milieu vétérinaire – c’est ce qu’on appelle le Une seule santé ou « une seule santé »,

  • et il est très important de surveiller la résistance, car sans indicateurs de suivi, nous ne pouvons pas agir pour lutter. Nous allons donc mettre en place une surveillance intégrée, c’est-à-dire que nous surveillerons aussi bien chez l’homme que chez l’animal et dans l’environnement, pour avoir des indicateurs communs et une vision globale de ce qui se passe ― car nous savons qu’il y a un impact très important impact de l’utilisation des antibiotiques sur l’environnement.

Benjamin Davido – Il est clair. Cela m’amène à une dernière question, presque personnelle : en tant que microbiologiste mais au-delà du rôle de coordinateur, qu’attendez-vous de cette nouvelle action commune de lutte contre la résistance aux antibiotiques ?

Nous sommes plus intelligents ensemble.

Marie-Cécile Ploy – Ce que je trouve formidable dans ce type d’action, c’est de pouvoir faire travailler ensemble des personnes qui ne se seraient peut-être jamais parlé. Et généralement, nous sommes plus intelligents ensemble, il s’agit donc de faire émerger des actions concrètes auprès des professionnels de santé, que ce soit en médecine humaine ou en médecine vétérinaire, mais aussi auprès des citoyens… D’ailleurs, l’OMS a émis des objectifs de développement durable et parmi eux il y a « une meilleure santé pour tous les citoyens », donc faire travailler tout le monde ensemble autour d’objectifs communs, je trouve cela vraiment très motivant pour l’avenir.

Benjamin Davido – Nous terminerons donc par cette belle phrase qui est « l’union fait la force », et il est vrai que la lutte contre la résistance aux antibiotiques est transdisciplinaire – elle combine le politique, la santé publique et les gens de terrain comme nous.

Il me reste juste à remercier toutes les personnes qui ont participé à cet enregistrement et je vous souhaite une très bonne journée. Merci et au revoir !

 
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