« Le défi n’est pas de vivre le plus longtemps possible, mais de rester dans les meilleures conditions le plus longtemps possible » – .

« Le défi n’est pas de vivre le plus longtemps possible, mais de rester dans les meilleures conditions le plus longtemps possible » – .
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« Est-ce la fin de l’obsolescence programmée de l’être humain ?interroge Christophe de Jaeger dans son dernier ouvrage intitulé Médecine de longévité : une révolution !, publié fin 2023 chez Guy Trédaniel. Le médecin, expert du vieillissement ou plutôt de la sénescence, répond résolument par l’affirmative.

Pourquoi Docteur : Les humains ont toujours voulu repousser les limites de leur espérance de vie. Comment en a-t-il désormais les moyens ?

Christophe de Jaeger : Nous avons aujourd’hui atteint un niveau de progrès technique et de connaissances médicales et scientifiques qui permet d’identifier plus précisément les mécanismes impliqués dans la sénescence. Le terme vieillissement ne veut pas dire grand-chose, c’est seulement un marqueur du temps qui passe : un enfant de 15 ans est « vieux » par rapport à un enfant de 6 ans. De la conception à la fin de la puberté, le vieillissement est positif : en biologie, on appelle cela le développement. C’est à partir de la fin de l’adolescence que l’on entre dans la phase de « sénescence » : celle-ci se caractérise par une diminution progressive de nos capacités fonctionnelles, une dégradation de tous nos systèmes (cardiaque, immunitaire, cérébral…) qui vont affaiblir notre organisme et entraîner nous aux pathologies. La véritable révolution aujourd’hui est que nous sommes capables de mieux mesurer ces différents mécanismes et d’interférer avec eux. C’est là qu’émerge la notion de médecine de longévité : il ne s’agit pas simplement d’une médecine de santé, mais d’une médecine de santé combinée à travers la longévité. La majorité des gens considèrent la longévité comme quelque chose de péjoratif, évoquant souvent Jeanne Calment, la doyenne de l’humanité, dans un bien triste état à la fin de sa vie à 122 ans. Cependant, l’enjeu n’est pas de vivre le plus longtemps possible, mais de rester dans les meilleures conditions possibles, le plus longtemps possible. Sauf que cela nécessite des interventions : il faut utiliser toutes les ressources de la technologie pour mesurer notre âge physiologique (et ainsi savoir où l’on en est fonctionnellement), mais aussi examiner tous les processus de cette sénescence dans le sang pour les corriger. Jusqu’à présent, les progrès médicaux servaient à diagnostiquer et à traiter les maladies, alors qu’ils peuvent désormais servir à évaluer, maintenir et optimiser notre santé. C’est l’introduction scientifique à la notion de « capital santé » et à son entretien.

Le défi n’est pas de vivre le plus longtemps possible, mais de rester dans les meilleures conditions possibles, le plus longtemps possible. Sauf que cela nécessite une intervention.

Comment entretenir physiologiquement ce capital santé ?

Après des décennies de recherche, nous savons que le mode de vie, à savoir l’alimentation et l’activité physique, ne suffit pas. Il faut aller plus loin en donnant à l’organisme ce dont il a besoin pour bien fonctionner – et je ne parle pas de médicaments, mais d’éléments purement physiologiques. Le corps humain est comme une voiture : au fur et à mesure qu’il roule, il s’use, et pour qu’il fonctionne le plus longtemps possible, certains ingrédients doivent être ajoutés lors de l’entretien, comme l’huile du constructeur. C’est le même principe avec la médecine de longévité : il s’agit d’entretenir son corps en lui apportant des éléments qui diminuent inexorablement avec l’âge et l’affaiblissent. C’est le cas par exemple de la vitamine D, une hormone qui a un fort impact sur le système osseux, sur le vieillissement cérébral, mais aussi sur l’immunité en prévenant certains cancers. Il existe 150 autres molécules mesurables grâce à une simple prise de sang, comme la coenzyme Q10, le sélénium, la prégnénolone, la mélatonine, les vitamines B, etc.

Suffirait-il donc de surveiller nos éventuelles carences et, en conséquence, de prendre des cures de vitamines et de minéraux pour rééquilibrer notre organisme ?

Tout d’abord, pour reprendre l’analogie de la voiture, il faut utiliser le bon carburant, c’est-à-dire manger sainement, et conduire raisonnablement, en accélérant doucement et en freinant par anticipation, ce qui correspond à un exercice physique. Il faut aussi interdire autant que possible les substances toxiques. Même si ces règles hygiéniques et alimentaires de base relèvent du bon sens, on a aujourd’hui tendance à considérer que la santé ne se perd que dans la maladie, alors qu’elle se perd bien avant, à long terme. Notre rôle est de préserver ce capital santé au quotidien, et pas seulement de faire appel à la médecine lorsque nous en avons besoin.

L’un des principes clés pour rester en santé le plus longtemps possible est d’éviter de surcharger son organisme en sucres, qui entraînent le phénomène de glycation.

Nous pouvons ralentir le vieillissement, mais pouvons-nous techniquement l’arrêter, voire rajeunir ? C’est ce que prétend avoir réussi à faire le millionnaire américain Bryan Johnson…

Cela repose sur un principe réaliste : mesurer l’âge physiologique de vos différents organes à un instant donné, et tenter d’intervenir sur chacun d’eux. L’ADN, en vieillissant, va se couvrir de radicaux méthyles : plus il est méthylé, plus il est vieux. Or, comme Bryan Johnson, on peut modifier cette méthylation de l’ADN en influençant certains comportements (alimentation, sport…) et en corrigeant certains déficits grâce à toutes sortes de compléments. Mais le millionnaire n’a pas rajeuni son ADN, il l’a « simplement » rendu moins méthylé, et donc plus fonctionnel.

Quel est actuellement le pire ennemi du vieillissement en bonne santé ? Qu’est-ce qui est le plus susceptible de provoquer une maladie ?

L’un des principes clés pour rester en bonne santé le plus longtemps possible est d’éviter de surcharger votre corps en sucre. Les sucres entraînent le phénomène de glycation : lorsqu’il est en excès dans le sang, le sucre va se comporter comme une sorte de colle, qui va agréger les protéines, les rendant inactives, et donc entraîner une inflammation de tout l’organisme. organisme (sous la peau, dans les yeux, le cerveau, les artères, les nerfs…) et nous conduisent à des pathologies. Nous consommons encore trop de sucre dans notre société, surtout lorsque nous souhaitons nous détendre, alors qu’il faudrait l’éviter autant que possible.

Nos vies actuelles ne sont pas propices à vieillir en bonne santé, même s’il faut reconnaître que les progrès de la médecine ont permis de mieux traiter les maladies chroniques et d’allonger l’espérance de vie.

Pour bien vieillir, faut-il suivre l’exemple des habitants des « zones bleues », où l’on retrouve statistiquement le plus de centenaires en bonne santé ?

Les zones bleues sont la preuve que certains comportements peuvent nous aider à mieux vieillir : leurs habitants suivent un régime méditerranéen (plantes, poissons…) et plutôt frugaux, ils restent actifs physiquement (chacun travaille à sa mesure) et psychologiquement (ils sont toujours intégrés dans la communauté et y contribuent à leur échelle, même seniors), et ils ont très peu d’anxiété grâce à des habitudes de vie très codifiées. C’est tout le contraire de ce que l’on retrouve dans nos sociétés occidentales, avec une sédentarité accrue, une majorité de retraités inactifs, isolés et malades, et un stress chronique. Nos vies actuelles ne sont pas propices à vieillir en bonne santé, même s’il faut reconnaître que les progrès de la médecine ont permis de mieux traiter les maladies chroniques et d’allonger considérablement l’espérance de vie, notamment grâce aux vaccins et aux antibiotiques. .

Pouvons-nous compter sur la science de la longévité pour modifier un jour le vieillissement ? Après tout, nous sommes capables, en théorie, en laboratoire, d’immortaliser des cellules, de rajeunir des cellules souches…

Nous savons immortaliser des cellules en laboratoire depuis plus de trente ans… Nous avons la technologie, mais elle a du mal à toucher le grand public. En 2012, le Japonais Shinya Yamanaka reçoit le prix Nobel pour ses travaux sur les cellules souches : en modifiant leur génome, il réussit à les rajeunir définitivement, pour qu’elles retrouvent les capacités de jeunes cellules. Mais ce sont des manipulations génétiques dont on ignore les conséquences. En fin de compte, cela ne provoquera-t-il pas un cancer dans le corps ? Nous n’avons pas encore la perspective nécessaire. Bien que le processus soit assez barbare, nous sommes également capables de rajeunir les petits mammifères. C’est ce qu’on appelle la parabiose hétérochronique : en connectant les systèmes vasculaires d’un individu jeune et d’un individu plus âgé, l’individu plus âgé devient plus jeune, et pas seulement fonctionnellement. Dans cette quête de jeunesse, les États-Unis sont allés très loin : dans quelques cliniques ouvertes en Californie, il était possible d’acheter du sang – commercialisable dans le pays – de sujets jeunes et de l’injecter à des sujets plus âgés. vieilli. Mais cela n’a donné aucun résultat, car c’est plus compliqué que cela. Pourtant, la « possibilité de » est porteuse d’espoir, et peut-être que dans 15 ou 20 ans, selon les ressources mises à disposition pour la recherche, cela pourrait donner des résultats étonnants. Chacun d’entre nous doit être conscient qu’il pourra éventuellement bénéficier de ces progrès, l’urgence est donc de rester en bonne santé dès maintenant pour avoir une chance d’en bénéficier un jour.

Selon moi, il y a bien plus de facultés chez les êtres humains que chez les machines. La vraie réponse réside dans la biologie, et non dans le transfert de notre cerveau vers une puce.

Pensez-vous que les humains pourront vivre très vieux et en bonne santé sans une once de transhumanisme ?

La notion de « longevisme » que je développe dans mon livre s’oppose au « transhumanisme », qui voit la technologie comme un moyen de s’épanouir, physiquement et cognitivement. Selon moi, il y a bien plus de facultés chez les êtres humains que chez les machines. Par exemple, certaines études ont révélé qu’une proportion microscopique de notre ADN équivaut, en termes de stockage, à des centaines de disques durs. Notre biologie a une capacité extraordinaire d’information et de récupération, il faut simplement apprendre à y travailler et régénérer notre corps. La vraie réponse réside dans la biologie, et non dans le transfert de notre cerveau vers une puce.

Le vieillissement ne sera-t-il bientôt plus qu’une maladie traitable à long terme ?

Pour la première fois, la notion de sénescence apparaît dans la classification internationale des maladies [CIM 11]. Petit à petit, on se rapproche de l’idée que cette usure progressive du corps est la mère de toutes les maladies, la maladie originelle. Le problème est la dissociation qui existe entre les capacités futures de notre science et le désir des êtres humains de vouloir participer à cette révolution : au niveau individuel, nous voulons tous vivre mieux plus longtemps, mais pour cela, il faut changer de mode de vie, faire des sacrifices, et trop peu de gens sont prêts à les faire. Il y a aussi l’aspect technique mais qu’en est-il de l’aspect psychologique ? Sommes-nous vraiment censés vivre 150 ans ? Notre cerveau saura-t-il s’adapter ? On se rendra peut-être compte que les personnes qui dépassent un certain âge se suicident, parce qu’elles n’arrivent plus à vivre ou n’ont pas les capacités cognitives suffisantes pour voir au-delà d’un certain âge… Imaginez aussi que certaines personnes puissent vivre jusqu’à un âge très avancé et d’autres ne le pourraient pas : en quoi cela changerait-il nos relations avec les autres ? C’est une page blanche…

 
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