Les jeunes médecins généralistes se serrent les coudes

Les jeunes médecins généralistes se serrent les coudes
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Plus de 500 jeunes médecins de famille se sont retrouvés ce week-end à Fribourg pour se mettre à jour et préparer l’avenir. Ils discutent de solutions pour lutter contre la pénurie de médecins généralistes en Suisse.

Face au manque de médecins généralistes, l’association des Jeunes Médecins de Famille Suisses estime que le secteur pourrait être valorisé dès les études en doublant la durée des stages obligatoires en pratique. © Clé de voûte

Face au manque de médecins généralistes, l’association des Jeunes Médecins de Famille Suisses estime que le secteur pourrait être valorisé dès les études en doublant la durée des stages obligatoires en pratique. © Clé de voûte

Publié le 21/04/2024

Temps de lecture estimé : 6 minutes

Le 13e Le Congrès des Jeunes Médecins de Famille Suisses (JHaS) a réuni vendredi et samedi plus de 500 participants au Forum Fribourg. Événement phare de l’association, il a permis aux jeunes médecins généralistes et pédiatres en cours de fin d’assistanat, ainsi qu’à ceux récemment installés, de se mettre à jour sur les dernières évolutions médicales et techniques destinées aux cabinets. Mais aussi pour discuter de l’avenir de la profession et faire quelques propositions concrètes contre la pénurie de médecins généralistes en Suisse. Explications de John Nicolet, vice-président de l’association et président du comité organisateur du congrès.

Quelles sont les préoccupations actuelles des médecins généralistes en Suisse ?

Jean Nicolet : Pour la plupart d’entre eux, il s’agit avant tout de pouvoir assurer, dans la durée, les meilleurs soins possibles à leurs patients. C’est la préoccupation majeure de tous les participants à la conférence. Face à cette inquiétude, les jeunes médecins se posent beaucoup de questions : sont-ils prêts à s’installer, comment vont-ils se faire remplacer s’ils tombent malades, que faire en cas de congé maternité ? Notre association lance cet été une plateforme en ligne sécurisée, qui facilitera les remplacements en cabinet, en mettant en relation médecins confirmés et médecins disponibles. Des offres similaires fonctionnent déjà avec succès en Allemagne et en France.

Un tel marché du travail peut être intéressant pour les médecins assistants qui ne souhaitent pas s’installer tout de suite ou qui n’ont exercé qu’en milieu hospitalier au cours de leur longue formation et ont peur de se lancer dans l’inconnu. Pour les médecins de famille plus âgés, qui réfléchissent à leur retraite, la préoccupation est davantage celle de la « continuité des soins ». Les médecins généralistes sont les chefs d’orchestre des soins ambulatoires. Ce sont eux qui ont la vision globale de la santé des patients. Nous savons que dans les pays dotés d’une médecine familiale solide, le système de santé est moins cher et plus efficace.

« Les médecins généralistes sont les chefs d’orchestre des soins ambulatoires »
Jean Nicolet

Votre conférence propose des sessions de formation continue pour les jeunes médecins généralistes. Est-ce nécessaire pendant qu’ils vient de se former ?

Il y a beaucoup de choses qu’en tant que médecin généraliste, on n’apprend pas du tout à l’hôpital mais qu’il faut savoir pour pouvoir exercer en cabinet. Lors de ce congrès, les participants ont pu suivre par exemple l’actualité de la prise en charge des patients souffrant de maladies cardiovasculaires, de diabète ou de cholestérol. Ils ont pu suivre des séances sur l’utilisation des ultrasons, qui vont prendre de plus en plus de place dans les cabinets. Ou encore participer à des ateliers techniques, par exemple en soin des plaies.

Un professeur genevois a évoqué la question de l’intelligence artificielle et notamment ce qu’elle va changer pour les médecins de premier recours. D’autres professeurs de médecine générale ont fait le point sur certaines avancées scientifiques et compétences cliniques. Un tel colloque est aussi l’occasion d’élargir vos horizons et de réfléchir ensemble à ce que sera la médecine générale de demain.

En effet, on dit depuis des années que la Suisse manque de médecins généralistes…

La pénurie de médecins généralistes reste un problème en Suisse, malgré les mesures mises en place ces dernières années. C’est que pour former un médecin généraliste, il faut onze ans. En 2015, seulement 20 % des étudiants en médecine pensaient choisir la médecine familiale. Au moins 50 % des étudiants devraient choisir la médecine générale pour couvrir leurs besoins futurs. Une étude montre que 94,7 % des problèmes de santé survenant dans la population peuvent être pris en charge par un médecin de famille, pour seulement 7,9 % du budget de la santé. Cela montre s’il vaut la peine d’investir dans la promotion de la médecine générale. L’initiative visant à réduire les coûts du système de santé, présentée au peuple le 9 juin, n’est clairement pas la solution. Cela réduirait la médecine familiale.

Que suggérez-vous pour intéresser davantage les étudiants à la médecine familiale?

Pendant longtemps, la médecine familiale a été peu présente dans les programmes d’études. Il s’agit de la rendre plus visible, de renforcer son image, de montrer qu’elle est dynamique et permet une bonne qualité de vie. Ces dernières années, de plus en plus de médecins généralistes donnent des cours dans les universités. Pour l’instant, les médecins assistants ne doivent suivre qu’une formation en cabinet de six mois. Nous souhaiterions que cette durée soit portée à douze mois, mais il y a déjà une grave pénurie de places de formation. Idéalement, cet assistanat de bureau nécessiterait 720 postes en formation postuniversitaire, contre 280 actuellement.

Une pétition a été lancée en ce sens…

L’association Médecins de famille et d’enfants Suisse (MFE) a lancé cette année une pétition en faveur d’un «Programme d’encouragement pour la médecine familiale», estimant que sa mise en œuvre coûterait 200 millions de francs pour la période 2025-2028. Les mesures proposées dans le programme permettraient à moyen terme d’augmenter le nombre de médecins généralistes et évidemment de réduire les délais d’attente dans des cabinets surchargés.

La question du salaire des médecins généralistes est également souvent évoquée, face au manque d’attractivité du secteur. Cela s’explique par le système de facturation à l’acte Tarmed, qui privilégie les démarches techniques. Le nouveau système Tardoc, actuellement sur le bureau du Conseil fédéral, améliorerait la situation des médecins de famille. Les gens sont toujours très reconnaissants envers les jeunes qui se lancent en médecine générale. Il est temps que les politiques les soutiennent également.

Stimuler une culture de médecine familiale

Fondée en 2009, l’association des Jeunes médecins de famille suisses (JHaS) compte aujourd’hui plus de 2000 membres dans toute la Suisse. Il s’adresse principalement aux jeunes médecins de famille et pédiatres en formation postuniversitaire ainsi qu’aux médecins de premier recours nouvellement établis. Son objectif principal est de permettre aux jeunes médecins généralistes de se rencontrer et de partager leurs expériences. « Il faut savoir que, contrairement aux cardiologues, orthopédistes ou dermatologues, qui suivent entre eux leurs années de formation postuniversitaire, les médecins généralistes se sentent très seuls pendant leurs études. Il est en effet difficile de développer un sentiment d’appartenance à un groupe et d’échanger de bons conseils quand on doit passer par de nombreux services médicaux lors d’une formation, allant des urgences à la médecine interne, de la chirurgie à la psychiatrie. explique John Nicolet, vice-président de l’association. Les congrès contribuent à stimuler cette culture de médecine familiale. La prochaine réunion annuelle aura lieu à nouveau à Fribourg.

 
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