Entre la métropole lilloise et la frontière belge, le parc Barbieux est un haricot vert, fin et élancé, au cœur de Roubaix. Assailli dès l’apparition d’un rayon de soleil, il connut plusieurs vies avant de devenir un lieu de loisirs et de promenade pour les citadins.
Imaginez des collines, des courbes et des jeux d’eau, entourés d’arbres centenaires et de vastes pelouses sur 34 hectares. À l’ouest de Roubaix, le parc Barbieux est le plus grand parc urbain au nord de Paris. Véritable poumon vert, long de 1,5 km et large de 150 mètres, il prend place tout le long du Grand Boulevard qui relie Roubaix à Lille.
Imaginé en 1963 par le paysagiste parisien Jean-Pierre Barillet-Deschamps, créateur des Buttes-Chaumont, le parc a ouvert ses portes en 1907. Une nécessité, comme espace de promenade et de divertissement, pour la bourgeoisie roubaisienne et le reste de la population. d’une ville industrielle en pleine croissance. Capitale mondiale de la laine, Roubaix suit les traces de Lille et Cambrai dans la construction de grands espaces verts en cœur de ville, à l’instar de Paris.
Au lieu d’une colline de 32 mètres, le parc est situé sur le tracé d’un ancien canal désaffecté. Imaginé au début du XIXème siècle, il devait relier, souterrainement, le bassin minier à la frontière belge, de la Deûle à l’Escaut. Un projet laborieux, avorté faute de moyens technologiques et modernes.
Avant d’être un parc, cette vaste étendue naturelle accueillait également des corridas espagnoles. En 1899, les promoteurs de la tauromachie cherchent à développer leur activité «en dehors de leur berceau d’origine», «choisir Roubaix pour sa puissance économique mondiale due à la laine et au tissu», explique Laure Haouchine, guide conférencière. Avec près de 12 000 spectateurs, ces combats ont apporté de la joie en apportant «de la viande et de l’argent à bas prix pour les entreprises environnantes», poursuit-elle. Une activité qui netout le monde n’a pas aimé» mais qui a accueilli un «large public de Belgique et d’Angleterre».
Après le début des corridas au vélodrome, puis leur interdiction, le parc Barbieux était en passe de devenir ce que l’on connaît aujourd’hui. En 1911, Roubaix accueille l’exposition internationale du nord de la France sur le thème du progrès industriel. Il est demandé à chaque exposant défendant son pavillon de «ramener des espèces d’arbres de leur région pour pouvoir les préserver dans le temps», rappelle Laure Haouchine.
Ce qui explique la diversité de la soixantaine d’espèces d’arbres ainsi que leur âge. “Beaucoup ont plus de cent ans», comme ce hêtre pourpre de 160 ans, qu’admire Vincent Coomans, gestionnaire du patrimoine arboré. “Il a de belles feuilles, d’un beau violet, bien prononcé et foncé», analyse-t-il de l’arbre de 6,25 mètres de large. “Il peut encore vivre cent ans si on continue à le protéger», se rassure-t-il.
C’est tout l’enjeu de ce que le dirigeant considère comme un «patrimoine à léguer». Classé en 1994 sous le label «Site national remarquable», le parc Barbieux bénéficie de l’appellation « depuis 2010 »jardin remarquable« . Deux étiquettes derrière lesquelles se cachent les travaux d’entretien quotidiens. “Nous essayons de chouchouter les arbres autant que possible», admet Pascal Soelens, jardinier. Depuis quarante ans, il prend soin de ce parc comme si c’était sa maison, et reconnaît sa chance de ne pas avoir «le sentiment d’être en zone urbaine.»
Tout est fait pour que cela ne devienne pas le cas, explique Vincent Coomans. “Nous protégeons le parc pour que rien ne soit construit ici», explique-t-il, défendant également une démarche écologique et privilégiant la faune et la flore. Des valeurs qui correspondent à la volonté de conserver le parc Barbieux comme un lieu de vie responsable et ancré dans son territoire.
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D’un point de vue culturel aussi, avec la présence de sculptures et de monuments »rendre hommage aux artistes roubaisiens ou aux personnes qui ont contribué au financement du parc», rappelle Laure Haouchine, guide conférencière. Comme Amédée Prouvost, poète issu d’une grande famille roubaixoise, qui composa pour mettre en valeur sa ville natale de Roubaix, dont «il était amoureux».
Ou encore cet énorme bloc de béton, seul vestige, appartenant au pavillon de Boulogne, de la deuxième exposition internationale du nord de la France, en 1939, interrompue par la Seconde Guerre mondiale.