C’est une implication familiale pas comme les autres depuis 10 ans. Samedi 30 mars à la salle du Cube à Villenave d’Ornon, toute la famille de Manon ainsi que les 90 bénévoles de « Princesse Manon » rendront hommage à cet enfant décédé en avril 2014 d’un cancer pédiatrique. Un spectacle qui récolte des fonds pour aider les enfants malades, les familles et les soignants.
Manon avait six ans lorsqu’elle a perdu la vie au service du 6D. 6D est le nom donné au bâtiment réservé au service d’hématologie-oncologie pédiatrique du CHU de Bordeaux. En 2011, rien ne laissait présager que la vie de Manon, 3 ans, de ses parents et de ses deux frères âgés de 13 et 9 ans allait connaître un terrible tournant. Peu après avoir reçu un diagnostic de cancer, la petite fille rejoint le 6D qu’elle ne quittera pas pendant huit mois, tout comme sa mère, à travers tous les combats.
“Maman a arrêté de travailler, est allée à l’hôpital presque sans arrêt, surtout au tout début”dit Rémy, le grand frère de Manon. La famille découvre alors le monde aseptisé et médicalisé de l’oncologie pédiatrique, ses épreuves et ses petites joies malgré tout. Et pendant que la mère veille sur son enfant malade, les trois autres membres du clan changent leurs habitudes.
Les repas de famille n’étaient plus des déjeuners du dimanche, mais des repas chinois du dimanche soir à l’hôpital.
Rémy LabordeLe grand frère de Manon
La famille fait tout pour surmonter la douleur et le diagnostic qui tombe comme une lame. “Je n’ai aucun souvenir des moments où je n’étais pas bien avec Manon, en dehors des annonces des médecins” Rémy se souvient.
Ce sont les médecins du CHU Pellegrin, du CHU de Bordeaux, qui ont annoncé à la famille que Manon était condamnée. Cependant, d’après les informations recueillies, ses parents ont encore de l’espoir. “Quand on nous a dit qu’il n’y avait plus d’espoir, nous avons découvert qu’il existait aux Etats-Unis un protocole d’essai qui aurait pu être utilisé pour la pathologie de Manon” , raconte sa mère Christelle Laborde. Un espoir certes, mais dans un pays où les médicaments coûtent extrêmement cher, sans compter les déplacements et l’hébergement. Il faut alors tout planifier “On s’est dit que si on devait partir du jour au lendemain, on va avoir besoin d’argent, on va créer une structure pour que ce soit déjà fait.” C’est ainsi qu’est née l’association « Princesse Manon ».
“Malheureusement, Manon n’était pas éligible au protocole, elle est décédée quatre mois plus tard, le 8 avril 2014”conclut sobrement sa mère.
L’Association « Princesse Manon » est créée, mais Manon n’est plus. “Nous nous sommes assis avec mes enfants et mon mari et nous nous sommes demandés : devons-nous continuer ou devons-nous arrêter ? On continue pour les autres », se souvient Christelle. “C’était aussi une façon de la garder avec nous.”
Mais il y a plus que cela, il y a aussi la reconnaissance. »Ce qui nous a poussé à maintenir l’association, c’est de lui rendre la pareille“explique Christelle.
Lorsque Manon était malade, nous avons été aidés par des associations, grâce à des dons.
Christelle LabordeMère de Manon
Et c’est ainsi que toute la famille reste unie pour se mobiliser autour de cette problématique des cancers pédiatriques.
L’association permet au service d’oncologie et d’hématologie pédiatrique de Pellegrin d’acquérir de nouvelles pompes à morphine, mais aussi des lits d’accompagnement.pour que maman et papa puissent rester avec les enfants » précise Christelle.
La consécration, c’est ce chèque de près de 45 000 euros offert au service « Chambres de l’Extrême » pour leur rénovation. Il s’agissait alors de pièces stériles et délabrées, dans lesquelles Manon passait du temps après les greffes. Ses parents sont alors venus la voir passer les sas, équipés de casquettes et de blouses. « On connaît bien le secteur stérile, Manon y a passé 8 semaines à deux reprises, dont une période de Noël, se souvient Christelle, non sans difficulté. C’est quelque chose qui nous tenait particulièrement à cœur.
Tel un mantra, Christelle vit intensément cette phrase, qu’elle peut délivrer aux parents d’enfants malades.Tant qu’ils sont là, tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir, il faut faire des choses avec les enfants. Une pensée qu’elle a essayé d’appliquer avec son mari, pour ne pas avoir de regrets.
Manon a eu une vie courte. Elle est morte, elle avait six ans, après avoir passé la moitié de sa vie malade, mais elle a eu une vie intense.
Christelle LabordeMère de Manon, Présidente de « Princesse Manon »
Un hédonisme dont son fils aîné lui est aujourd’hui très reconnaissant. « J’ai plein de petits moments qui sont gravés, qui sont de bons moments, des moments de sourire. Les moments difficiles, mon cerveau les a balayés » explique Rémy, avant de se remémorer ses séjours à « Disney, le ski ou Biscarosse, grâce aux associations qui nous ont aidé.
Les actions financées par la princesse Manon sont très diverses, explique Christelle Laborde. “CONTREC’est peut-être un rêve d’enfant.comme aller à Disneyland Paris, au Futuroscope ou rencontrer des sportifs, mais aussi des vols en montgolfière.
D’autres actions s’adressent davantage aux séjours hospitaliers. “Nous achetons également un ordinateur pour qu’ils puissent suivre des cours à l’hôpital.” Les dons de tablettes numériques ou de liseuses sont courants.
Mais il y a aussi tout l’investissement personnel de la famille de Manon et ces marques d’attention et de reconnaissance. « Chaque matin de Noël, nous sommes à l’hôpital où nous apportons des cannelés, des chocolats et des paniers de fruits aux parents des enfants et au personnel soignant ». Rémy et Matéo, aujourd’hui âgés de 26 et 22 ans, “Allez dans les chambres pour jouer avec les enfants.”
“Au niveau familial, on a une aide beaucoup plus pragmatique” précise la mère. La maladie génère “automatiquement” problèmes financiers, « Il y a moins de salaires, moins de revenus et plus de dépenses. »
Dans 90 % des cas, quelqu’un arrête de travailler.
Christelle LabordeMère de Manon et Présidente de la Princesse Manon
“On va payer un loyer, une facture de carburant, ça nous est souvent arrivé.» précise-t-elle, avant de reconnaître « Il y a beaucoup de pudeur chez les parents, ils n’osent pas demander de l’aide. Nous avons été dans cette situation où nous n’osons pas appeler à l’aide, et nous le devons : nous sommes là pour cela ».
Pour récolter des fonds, l’association organise des concerts. La première a eu lieu il y a 10 ans. Rémy, qui accompagnait toujours sa petite sœur à la guitare, se souvient.
En 2014, Manon devait chanter avec moi sur scène. C’était le 26 avril, elle est décédée le 8 avril.
Rémy LabordeFrère de Manon
Et chaque année depuis, les guitares continuent de résonner et les voix continuent de chanter à l’unisson. Car le principe même de ce concert « cc’est avant tout rappeler un trait de caractère des enfants, celui qui nous gifle le plus fort quand nous vivons ce que nous avons vécu : sa force et son insouciance.
Depuis 10 ans, chaque année, des artistes se réunissent autour de Rémy pour proposer une soirée musicale originale. Ce gang qui rassemble de plus en plus de monde d’année en année se fait appeler « Les pépites de Manon ». “Nous sommes un groupe d’amis. rappelle Rémy, qui aime le comparer au gang des Enfoirés : tout le monde a la même place.
Parmi les artistes, on peut citer Enola de Star Académie, là depuis le premier concert, mais aussi Arnaud la voix kids 7 ou encore Timéo qui s’est hissé en demi-finale de la même émission. “Nous voulons que cette joie, des artistes sur scène, comme celle des enfants et qui est communicative, soit là sur scène”, Rémy insiste.
« Le commentaire que nous entendons le plus est que les gens ne nous attendons pas à un concert de cette qualité. Ils attendaient un petit concert d’une association ou d’une école de musique. se réjouit Rémy. Et pour un anniversaire, quoi de mieux qu’une création originale ? Ce 30 mars, un conte-comédie musical intitulé «Le pays des rêves», composé par Rémy et Lucie, membres de la joyeuse bande depuis 7 ans, dans un décor de place de village créé entre autres par Matéo, frère cadet de Manon. A ceux-ci s’ajoutent 90 bénévoles, tout le monde met la main à la pâte !
La salle peut contenir 540 places et il en reste encore, alors réservez votre samedi 30 avril.
Le pays des rêves. 10 euros, 19h Salle du Cube à Villenave d’Ornon.