Au téléphone, Jérôme Legrand s’est toujours montré charmant. Ponctuel, gentil, parlant un français parfait, le représentant d’ICMarket Trading, à Londres, « a inspiré une grande confiance »se souvient Louise D. Elle et son mari ont été victimes d’une fausse arnaque à l’investissement, une méthode soi-disant nouvelle pour spéculer sur les cryptomonnaies grâce à une application révolutionnaire. « Nous avons d’abord payé 250 euros pour démarrer, et tout s’est bien passé : très vite, nous avons vu que la valeur de l’investissement augmentait. Jérôme nous a alors demandé si nous avions des possibilités financières ; il nous a dit qu’il faudrait investir 10 000 euros, puis il nous a conseillé de payer 15 000 euros à la place. »
Le couple a suivi ses conseils et a envoyé plusieurs virements, pour un total de 15 000 euros. D’après les jolis graphiques de l’application ICMarket Trading, ils ont obtenu une bonne affaire : « Nous nous sommes retrouvés avec 52 284 euros, et nous avons voulu récupérer une partie de l’argent. C’est là que les choses ont mal tourné. » Leur investissement se fait dans les cryptomonnaies, leur explique, toujours gentiment, “Jérôme” : il faut donc les échanger contre des euros, et cela a un coût, un “taxe forfaitaire” de 30%. Et 11 000 euros pour tout récupérer, c’est trop : le couple décide de retirer 10 000 euros de son investissement et envoie donc un nouveau virement de 3 000 euros, toujours vers la même banque, en Lituanie.
« Là, notre banque est arrivéecontinue Louise. Ils nous ont appelé pour nous dire que nous avions fait beaucoup de transferts importants à l’étranger et qu’ils nous conseillaient d’être prudents. On était trop confiants, on a accepté de signer une renonciation », demandé par la banque pour effectuer le virement. Le couple part en vacances pendant une semaine. Sur le chemin du retour, Jérôme Legrand, un faux nom, a disparu : «C’était le grand silence. Plus aucun moyen de le contacter, compte bloqué sur l’application, aucun numéro de téléphone répondu… C’était fini. » Louise et son mari ont perdu 18 250 euros. “On sait très bien qu’on ne les reverra plus”elle soupire.
Le couple est loin d’être le seul à avoir souffert de ces arnaques très efficaces qui opèrent grâce à un vaste écosystème d’intermédiaires spécialisés travaillant pour des structures criminelles. La société de cybersécurité Group-IB, qui suit depuis six ans les activités d’un groupe criminel exploitant ce type d’arnaque visant la France et la Belgique, estime que l’organisation en question a pu dérober, à elle seule, près de 500 millions d’euros.
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