Lorsqu’on franchit le seuil d’un bar à jeux de société, on est immédiatement frappé par l’ambiance générale des lieux. Le brouhaha caractéristique des bars est cette fois ponctué de silences de concentration, de rires, de cris de victoire, mais aussi de défaites… Les couples s’affrontent en montrant des cartes colorées, tandis que des groupes d’amis s’affrontent autour de jeux de plateaux.
Depuis plusieurs années, les Bordelais semblent avoir développé une passion pour ce concept mêlant jeux en carton et boissons houblonnées, et le phénomène ne compte pas s’arrêter. En seulement six mois, deux nouveaux établissements ont ouvert leurs portes au centre de la capitale girondine. Jeux Barjo, situé rue Saint-James depuis 14 ans, fait office de lieu historique. Impossible d’avoir une table au dépose-minute, il faut au mieux réserver une table quelques heures à l’avance, surtout en hiver, quand les clients recherchent de la chaleur.
« Une époque bénie », confie Rodolphe Grabowski, qui tient le bar depuis sept ans. « Au début, nous avions surtout un public de niche. Mais les « geeks » ont laissé place à des profils très éclectiques, qu’il s’agisse de familles pendant les vacances, ou de groupes d’amis. » Sur les murs de la petite salle, près de 1 500 jeux de stratégie, d’aventure et d’espionnage attendent d’être déballés.
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A quelques encablures de là, Henri et Charlène s’affrontent au Schotten Totten dans le bar Le Beau Jeu, rue du Chai des Farines, ouvert récemment. Au fil du temps, le couple est devenu un habitué des lieux. « Il y a tellement de jeux qu’on ne sait jamais quoi acheter. Ici, nous pouvons les tester, obtenir des références. C’est aussi l’occasion de sortir de notre appartement», expliquent-ils. Il y a aussi la peur de ne pas aimer quand le prix des coffrets varie entre une vingtaine et une centaine d’euros.
Pour les patrons du Beau Jeu, Maxime, José et Léo, trois anciens journalistes parisiens, le tournant est survenu lors de la pandémie de Covid-19. « Il y avait un créneau à prendre à Bordeaux puisqu’il n’y avait que Jeux Barjo et Lila et le Barbier au centre, le potentiel était là, donc on s’est lancé, raconte Maxime.
Vocation
Un scénario assez similaire à celui de Vincent Capdevielle, qui a ouvert en juin dernier l’Atelier B, rue de la Rousselle, dans un ancien atelier de peintre. « Dans les années 1920, il y avait une société d’import-export de vanille », raconte-t-il. Pour boucler la boucle, l’ancien vendeur dans une maison d’édition de jeux de société les a découverts il y a une quinzaine d’années chez Jeux Barjo. Sur les 250 références de sa ludothèque, seule une petite poignée de règles lui échappe.
Après plus de quatre heures assises, Alexandra et ses amis viennent de débuter une troisième partie de leur partie de cartes. « C’est une autre façon d’aller au bar, de se retrouver devant des jeux moins traditionnels. » Habitant Dax, l’animatrice de centre de loisirs ne cache pas son envie de franchir le pas en ouvrant son propre établissement. Et pourquoi pas, pour elle aussi, de pouvoir créer des vocations ludiques.