Little Girl Blue, Asphalt City, Drive-Away Dolls… Les films à ne pas manquer (ou à éviter) cette semaine au cinéma

Little Girl Blue, Asphalt City, Drive-Away Dolls… Les films à ne pas manquer (ou à éviter) cette semaine au cinéma
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Petite Fille Bleu ****

“Ma grand-mère aurait tout donné à Jean Genet, même sa propre fille», résume la réalisatrice Mona Achache. Basé sur un dispositif inédit entre fiction et documentaire, son quatrième long métrage dénoue les liens destructeurs qui unissent l’écrivain et poète Jean Genet (1910-1986, auteur des Bonnes ou du Journal du loup), sa grand-mère l’écrivaine Monique Lange et sa mère. Carole, qui s’est suicidée en 2016. Elle nous a accordé une interview avant de présenter le film à Bruxelles au cinéma Galeries. “Le point de départ a été d’ouvrir les caisses enregistreuses de ma mère. Je me suis enfoui sous cette masse de documents puis j’ai commencé à les accrocher au mur comme dans l’antre d’un tueur en série. Sauf que la question n’était pas « qui a tué ma mère ? mais « pourquoi Carole s’est-elle suicidée ? »…« Ainsi naît sous nos yeux une enquête psychanalytique sur une lignée maternelle freinée par les mythes littéraires et leur impact carnivore dans la vie réelle (Genet, écrivain emblématique de la révolte, jouait à des « jeux sexuels » avec Carole, alors âgée de onze ou douze ans. , avec la complicité de sa mère, fascinée par l’écrivain), résonnant de manière cathartique avec la libération de la parole sur la sexualité des femmes survivantes d’abus.

Ma mère est décédée un an avant #MeToo. Ce qui m’a permis de faire le film et d’échapper à la peur du narcissisme, c’est la possibilité de parler collectivement du destin féminin. J’ai compris que cette idée de femmes maudites que m’avait transmise ma mère était en réalité une névrose collective qui dit quelque chose sur le conditionnement des femmes, potentiellement soumises et condamnées à des maltraitances..» Pour déconstruire ce « mythe de la malédiction », Mona Achache a pu compter sur le pouvoir d’incarnation de Marion Cotillard. Et son film enquête aussi sur la métamorphose vertigineuse d’une actrice, la voyant reprendre en synchronisation de nombreux enregistrements de la voix de Carole. “Mon film est aussi une réflexion sur un processus créatif et sur la manière dont nous pouvons inverser ce qui nous a détruit. Avec Marion j’avais la certitude irrationnelle que je pourrais reprendre cette discussion que je n’avais pas pu avoir avec ma mère» conclut le cinéaste. On en ressort secoué et ébloui, comme le feu évoqué par Marguerite Yourcenar dans le film : «Qu’emporteriez-vous sur une île déserte si votre maison était détruite par un incendie ? j’enlèverais le feu». Quant à Jean Genet, son œuvre se teinte désormais du visage vibrant de Carole Achache, tel un feu follet féminin qui aurait enfin le premier rôle. -JG

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**** Réalisé par Mona Achache. Avec Marion Cotillard, Carole Achache – 95′.

Ville d’asphalte***

Ollie Cross (Tye Sheridan), un jeune ambulancier plein d’idéaux, fait équipe avec Gene Rutkovsky (Sean Penn), un vétéran des urgences. Face à une violence à laquelle il ne s’attendait pas, Ollie va voir ses certitudes fortement ébranlées… »On côtoie le noir, le risque c’est qu’il nous envahisse» : en soignant les mourants, est-il encore possible de croire en la vie ? C’est tout l’enjeu du travail des médecins urgentistes et la question posée par Jean-Stéphane Sauvaire (Johnny Chien Fou), réalisateur français fasciné par New York. Présenté l’année dernière au Festival de Cannes, Ville d’asphalte y avait été chaleureusement accueilli, entre autres pour sa violence jugée excessive. Pourtant, ce drame hallucinatoire, tourné caméra au poing et avec un travail remarquable sur la lumière et le son, dégage une intensité permanente qui ne nous laisse aucun répit. – OC


*** Réalisé par Jean-Stéphane Sauvaire. Avec Tye Sheridan, Sean Penn – 124′.

La chimère ***

Les chimères de la mythologie sont des constructions, des images, presque des illusions où des morceaux d’animaux s’assemblent de façon fabuleuse. Figure du cinéma d’auteur italien, Alice Rohrwacher (Heureux comme Lazzaro) poursuit un travail singulier dans l’Italie rurale et fait ici ressortir de terre les chimères derrière lesquelles courent Arthur (Josh O’Connor), un jeune archéologue anglais sans le sou et doué de médium, et ses compagnons d’infortune dans l’Italie précaire de les années 80.

Derrière la quête désespérée de ces « tombaroli » qui revendent leurs trésors aux marchands d’art, la cinéaste sort une mise en scène baroque et foisonnante où se mêlent des scènes de carnaval héritières de Fellini, racontant aussi son propre rapport à l’amour et à la mort, à la fois burlesque et funèbre. Exhumant ici et là des statues étrusques et autres trésors enfouis, rencontrant une matriarche du cinéma italien (Isabella Rossellini) et tombant amoureux d’une jeune femme fantasque qui cache ses enfants (Carol Duarte), Arthur retrouve dans son imaginaire un amour disparu alors qu’il s’accomplit avant nos yeux une magnifique chimère cinématographique. Il s’agit de décider d’y croire. -JG

*** Réalisé par Alice Rohrwacher. Avec Josh O’Connor, Carol Duarte, Isabella Rossellini – 133′.

Poupées à emporter**

De Fargo a Il n’y a pas de pays pour les vieillards, les frères Coen incarnaient le meilleur de la comédie noire américaine mais réalisent désormais en solo. Tandis que Joël mettait en scène une austère Macbeth en noir et blanc avec Frances McDormand (d’ailleurs sa femme), Ethan réalise ce road movie écrit avec sa femme Tricia Cooke, dans un esprit queer très « cul-dessus la tête » (donnez-nous l’expression). Il suit un couple d’amies lesbiennes mal assorties (Jamie alias Margaret Qualley, qui pense sauter sur tout ce qui passe plutôt que de démanteler le patriarcat ; et la très introvertie Marian) qui louent par erreur une voiture transportant un secret qui touche de très près un sénateur conservateur ( Matt Damon). Si le duo finit par tout dynamiter (les couilles des sénateurs et l’hypocrisie des valeurs républicaines au passage), c’est grâce à la démolition comique d’une écriture débridée qui joue sur le refoulé de l’Amérique mais manque parfois de tenue pour faire un impression durable. -JG

** Réalisé par Ethan Coen. Avec Margaret Qualley, Geraldine Viswanathan, Pedro Pascal, Matt Damon – 84′.

Homme singe**

Enfant, il a vu sa mère tuée par un policier. Aujourd’hui, coiffé d’un masque de singe, il participe à des combats sur un ring où il est le « Monkey Man » et se fait régulièrement mettre à terre par des plus forts que lui dans le seul but de faire pleuvoir les roupies. Et il a besoin de ces roupies pour un projet qu’il construit depuis des années : venger le meurtre de sa mère. Tout cela se passe dans une Inde où les intouchables et les personnes trans sont relégués aux marges de la société, voire simplement éliminés, où les pseudo-gourous se mêlent de politique. Dans son premier film en tant que réalisateur, le Britannique Dev Patel (Jamal in Slumdog Millionaire) poursuit trop de lièvres. Il y a la dénonciation du système des castes, la partie la plus intéressante (et presque politiquement engagée) de son film mais aussi la plus furtive, qu’il dilue au profit d’une histoire violente, calquée plutôt sur les codes de John Wick que ceux d’un film activiste. Dommage. -ER


** Réalisé par Dev Patel. Avec Dev Patel, Sharlto Copley – 121′.

 
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