Dans la vitrine du siège social de Kanuk, sur la rue Rachel Est, sur le Plateau Mont-Royal, une toute nouvelle collection de manteaux est annoncée. Sur les étiquettes de certains modèles, il est indiqué que le manteau a été conçu au Canada mais qu’il a été fabriqué en Chine, fabriqué en Chineune première dans l’histoire de cette maison de couture fondée en 1970 par Louis Grenier.
Pendant des décennies, tous les manteaux Kanuk étaient cousus au premier étage de cet immeuble de la rue Rachel. La philosophie de l’entreprise ? Conçu au Québec pour l’hiver québécois. Dès le début, la marque Kanuk, avec son catalogue, est devenue une marque préférée des consommateurs. Le manteau était cher, mais il était garanti à vie et il a changé la vie de nombreuses personnes en garantissant qu’elles ne frissonnaient plus une fois qu’elles portaient leur manteau.
En 2015, Louis Grenier vend son entreprise à une société financière (le Groupe Champlain) qui avait de grandes ambitions pour cette marque. Elle s’associe à des créateurs pour relooker le style des manteaux et ouvre une boutique Kanuk à New York, une aventure qui n’aboutit pas.
Ces dernières années, l’entreprise a connu de sérieuses difficultés financières. Au printemps dernier, l’entreprise a été revendue, cette fois à Thread Collective.
C’est une marque qui est presque un héritage. En soi, c’est extraordinaire
explique Bertrand Cesvet qui, avec ses associés, a racheté Kanuk. Rejoint à Las Vegas, où il a visité les points de vente de Psycho Bunny, une marque de vêtements détenue, comme Kanuk, par Thread Collective et Bertrand Cesvet, il raconte que cette marque avait besoin d’amour.
On s’est dit qu’on pouvait non seulement sauver l’entreprise mais aussi déployer et promouvoir la marque à l’international.
Bertrand Cesvet rêve de faire de Kanuk une sorte de Ralph Lauren québécois.
Quand vous achetez des vêtements Ralph Lauren, vous achetez un art de vivre, vous achetez une vision de la vie, une certaine idée des Etats-Unis. Ce qu’on veut avec Kanuk, c’est vendre l’idée du Québec, des vêtements qui correspondront à notre nature, à notre façon de vivre au Québec. Ça va être basé sur l’idée que le plus luxueux maintenant, c’est la nature, et ça va être très québécois, vous verrez. Mais le marché a changé, les hivers ont changé. On a besoin de moins de manteaux par -40 degrés. Il faut confectionner des vêtements Kanuk pour toutes les saisons.
Cet homme d’affaires n’est pas né d’hier en matière de marketing et de marques. Bertrand Cesvet a notamment co-fondé et dirigé Sid Lee, une agence de créativité commerciale mondialement reconnue, et a piloté le repositionnement de grandes marques comme Adidas ou Absolut Vodka.
Cependant, pour repositionner la marque Kanuk, dit-il, il faut libérer de la marge. Faire fabriquer des manteaux en Chine coûte 50% moins cher que de les faire fabriquer au Québec
dit-il.
Après une première expérience de fabrication en Chine, les nouveaux propriétaires de Kanuk n’excluent pas de faire fabriquer leurs vêtements dans d’autres pays. Peut-être le Portugal, la Turquie, le Pérou ou le Vietnam. Tout est possible. Tout est sur la table.
Madeleine Goubau, lecturer at the École supérieure de mode (ÉSM).
Photo : - / Aude Garachon
Et le fabriqué au Canada, son?
Maître de conférences à l’École supérieure de mode, Madeleine Goubau n’est pas surprise par la récente décision de la maison Kanuk. La pénurie de main d’œuvre et les coûts de fabrication expliquent souvent pourquoi les entreprises doivent prendre cette décision. C’est survivre et déménager ou fermer
» dit-elle alors que nous la rencontrons rue Sainte-Catherine.
Ce jeune spécialiste de la mode nous raconte que désormais, les vêtements fabriqués en Chine sont de très bonne qualité. Ils disposent d’un volume de production qui leur permet d’acheter les meilleures machines au monde.
À l’ère des manteaux de fourrure, Montréal était une plaque tournante de la mode hivernale. Madeleine Goubau explique que notre histoire, nos hivers et le côté hanche de la métropole assurent toujours une place de choix aux manteaux fabriqué au Canada à l’étranger.
Il y a certainement une valeur ajoutée sur le marché lorsqu’un manteau est fabriqué ici. Les gens savent qu’il fait froid ici et se disent donc : « Il faut qu’ils soient au courant et qu’ils soient capables de faire quelque chose d’efficace. » En plus, Montréal a une certaine aura, un peu comme Berlin ou Barcelone et tout ça. Alors un manteau qui vient de Montréal dit : « c’est efficace pour l’hiver », et on n’aura sans doute pas non plus fait de compromis sur l’esthétique.
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Jean-Philippe Robert, copropriétaire de Quartz, un fabricant de manteaux québécois.
Photo : - / Aude Garachon
Le fabriqué au Canadac’est aussi le pari pris par la marque Quartz, dirigée par trois frères qui vendent des manteaux d’hiver fabriqués ici dans une douzaine de pays. Et le respect du savoir-faire local est réel.
Le Canada est synonyme de manteaux de qualité, capables d’affronter le froid, le vent, la neige.
explique Jean-Philippe Robert, rencontré dans sa boutique du Mile-End. Lorsque nous nous présentons sur les marchés internationaux avec un produit canadien au manteau d’hiver, nous sommes bien accueillis, nous sommes écoutés.
Les frères Robert ne font pas tout fabriquer au Québec. Les collections de vêtements du printemps et de l’automne sont rassemblées ailleurs. Mais les manteaux chauds et les manteaux d’hiver sont tous fabriqués ici. En période de pointe, près de 200 personnes travaillent sur la collection hiver Quartz. Et les frères Robert tiennent à maintenir la production ici pour des raisons de contrôle de la qualité. Cela coûte évidemment plus cher, mais vous pouvez surveiller les détails, les coutures, les tissus.
Jean-Philippe Robert croit en son produit. Il vend des manteaux aux compagnies aériennes et minières, notamment aux employeurs qui souhaitent offrir à leurs employés des manteaux capables de braver le froid du Grand Nord canadien.
Mais le jeune homme d’affaires est convaincu qu’il existe également un marché pour les gens ordinaires, qui considèrent l’achat d’un manteau chaud comme un investissement à long terme. au contraire consommation de mode jetable. Il y a des gens qui préfèrent investir dans la qualité, quelque chose qui durera sur le long terme, qui coûtera certes plus cher au départ mais qui offrira un bon retour sur investissement sur le long terme.
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Sophie Boyer, propriétaire d’Audvik, un fabricant québécois de manteaux d’hiver.
Photo : - / Aude Garachon
Toujours à Montréal, rue Chabanel, dans son atelier-boutique, Sophie Boyer, propriétaire des manteaux Audvik, abonde dans le même sens. Cette ancienne championne de ski de fond souhaite proposer des manteaux durables à ses clients, des manteaux qu’ils chériront et garderont comme nos grands-mères gardaient leurs manteaux de fourrure
.
Chez Audvik, Isabel Cabral, la couturière, confectionne chacun des manteaux qui portent la marque Audvik de A à Z. Elle est un as de la machine à coudre. Chaque assemblage prend plusieurs heures.
Sophie Boyer la regarde coudre avec fierté. En souriant, elle m’a dit : C’est certain que c’est plus cher à fabriquer au Québec. Nous avons moins de marge de manœuvre. Je ne suis pas millionnaire, mais j’arrive à bien vivre et à payer les employés. Mais surtout, je me réveille heureuse chaque matin, ravie de proposer ici des manteaux faits main.
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