Le drame musical « Emilia Perez » du cinéaste français est nominé dans de nombreuses catégories pour le prestigieux Oscar. Il fait suite aux 14 nominations pour le célèbre Titanic.
“Emilia Perez” de Jacques Audiard a récolté jeudi 13 nominations aux Oscars, notamment dans la catégorie première du meilleur film, et a dominé une cérémonie assombrie par les incendies meurtriers de Los Angeles. Déjà primé à Cannes, cette odyssée musicale sur la transition de genre d’un trafiquant de drogue mexicain devient ainsi le film non anglophone le plus nominé de tous les temps. Cette production inclassable, définie par le cinéaste français comme un « film transgenre », devance cette année « Le Brutaliste », vaste fresque sur la vie d’un immigré juif, et la comédie musicale « Wicked », qui ont obtenu chacune dix nominations.
Meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur film international… « Emilia Perez » a été nominée dans la plupart des grandes catégories, ainsi que dans de nombreuses catégories techniques pour sa bande originale et sa musique. De quoi mettre la pression sur Jacques Audiard. Avec la double nomination du meilleur réalisateur et du meilleur film, “c’est une campagne très solide qui doit être menée”a réagi le cinéaste auAFP.
Karla Sofía Gascón, qui joue le rôle-titre, est devenue la première actrice ouvertement transgenre nominée pour l’Oscar de la meilleure actrice. Autre pilier du film, Zoe Saldaña a été nominée pour la meilleure actrice dans un second rôle. Tourné principalement en espagnol, « Emilia Perez » et ses 13 nominations effacent le record codétenu auparavant par deux autres films non anglophones : « Tigres et Dragons » (2000), du réalisateur taïwanais Ang Lee, et « Roma » ( 2018), du Mexicain Alfonso Cuaron.
Le cinéma français à l’honneur
Outre le biopic de Bob Dylan, “A Perfect Stranger”, et le thriller papal “Conclave”, avec huit nominations chacun, un autre film français s’est démarqué jeudi : “The Substance”. Cette fable horrifique de Coralie Fargeat, où Demi Moore incarne une ancienne gloire hollywoodienne accro à un sérum jeunesse, a récolté cinq nominations. Elle concourra dans un trio prestigieux : meilleur film, meilleur réalisateur et meilleure actrice. Ces honneurs sont « un moment magique », a réagi le‘AFP Coralie Fargeat, « fière » que son travail féministe et très gore ait plu à l’Académie. “J’ai fait ce film avec mes tripes et mon cœur, c’est pour ça qu’il est si viscéral et intransigeant”, a-t-elle ajouté.
Parmi les actrices, Demi Moore et Karla Sofía Gascón affronteront Mikey Madison (« Anora »), Cynthia Erivo (« Wicked ») et la Brésilienne Fernanda Torres (« Je suis toujours là »). Côté acteurs, le grand favori Adrien Brody (« Le Brutaliste ») était nominé aux côtés de Ralph Fiennes (« Conclave »), Timothée Chalamet (« Un parfait inconnu ») et Colman Domingo (« Sing Sing »). Un quatuor complété par Sebastian Stan, nominé pour son portrait troublant des années de jeunesse de Donald Trump, dans « The Apprentice ».
-Le film a fait l’objet de menaces de poursuites de la part des avocats du milliardaire républicain, notamment à cause d’une scène où l’on voit le nouveau président des Etats-Unis violer son épouse d’alors, Ivana. L’Académie envoie ainsi un message politique clair, quelques jours après l’investiture du 47e président américain. D’autant que Jeremy Strong, qui incarne dans le film Roy Cohn, avocat hors-la-loi et mentor de Donald Trump, est nominé pour le meilleur second rôle.
Incendies
Los Angeles se remet à peine des incendies massifs qui ont tué près de trois douzaines de personnes et contraint des milliers de personnes à fuir. Dans ce contexte, la cérémonie des Oscars prévue le 2 mars prendra une tournure particulière, a annoncé le directeur général de l’Académie, Bill Kramer. Il « rendra hommage au courage des premiers intervenants » qui sont intervenus lors des incendies « et célébrera l’esprit de résilience » de Los Angeles, a-t-il expliqué.
La date limite de vote des candidatures a été reportée en raison de ces incendies. Mais même avec cette mesure, les milliers d’évacuations ont probablement empêché certains électeurs de participer, selon Pete Hammond, chroniqueur du site Deadline. De quoi accroître l’influence des électeurs non américains, qui vivent loin d’Hollywood et préfèrent souvent les films d’art et d’essai. Le palmarès de jeudi fait également la part belle aux films internationaux. Outre « Emilia Perez » et « The Substance », le film brésilien « I’m Still Here » a bien marché.
Ce drame historique, qui se déroule dans les années 1970, alors que le Brésil était encore une dictature, a reçu trois nominations, dont une dans la catégorie du meilleur film. Le film d’animation letton « Flow », où l’on suit le voyage d’un chat dans un monde imaginaire ravagé par la montée des eaux, a obtenu deux nominations.