Avez-vous mangé de la tarte, de la dinde, de la tourte à la viande ou du ragoût de pattes ces derniers jours ? Même si les repas de fête en famille sont devenus plus légers au fil des années, ils sont encore très loin d’être végétariens, ce qui souligne l’échec cuisant de l’industrie de la viande d’imitation.
Rarement aura-t-on vu une nouvelle catégorie d’aliments susciter un tel engouement avant de pratiquement tomber dans l’oubli.
Il suffit de chercher un contenant de hachis de légumes dans votre supermarché pour s’en rendre compte. On ne les trouve pas facilement. Les derniers que j’ai pu trouver n’étaient pas placés avec le tofu ou avec le bœuf haché. Ils attendaient de trouver preneur dans un congélateur entre les nuggets de poulet et les frites. Et semblait être là depuis des lunes…
Cela contraste tout à fait avec la frénésie suscitée par l’arrivée des burgers végétariens dans les chaînes de restauration rapide il y a quelques années.
Rappelez-vous quand A&W a lancé un hamburger à base de galette Beyond Meat : tout s’est vendu en criant « root beer ». Cette jeune pousse californienne prometteuse allait révolutionner le contenu de notre assiette. Cependant, elle n’a jamais réalisé un seul dollar de profit. L’année dernière, ses ventes ont atteint 343 millions de dollars, mais sa perte nette était presque la même : 338 millions de dollars. Pas étonnant que la valeur de ses actions ait chuté de 95 % au cours des 5 dernières années.
Son principal concurrent, Impossible Foods, n’est guère plus rentable. Depuis sa création en 2011, l’entreprise a toujours été dans le rouge.
Face à la menace végétarienne qui se profilait, l’industrie de la viande a réagi. Le géant ontarien du hot-dog et de la charcuterie, Maple Leaf, est allé jusqu’à débourser 140 millions pour racheter la marque américaine de viande d’imitation Lightlife. L’année dernière, les ventes de cette filiale végétarienne ont chuté de 16 % et la perte nette s’est élevée à 220 millions.
Même si on a inventé le pepperoni et le bacon sans porc, les croquettes de poulet et les escalopes sans volaille, le succès de la filière reste mitigé malgré tout le battage médiatique qui l’entoure. Le volume des ventes de protéines végétales a chuté de 19 % aux États-Unis l’année dernière, selon le Good Food Institute (GFI). Au Québec, Nielsen a observé une baisse de 8 % cette année.
« C’est quand même assez cher, assez gras et assez salé. Les consommateurs peuvent donc avoir l’impression qu’en termes de santé et en termes financiers, il n’y a pas beaucoup de gain», analyse Laurence Godin, professeure à la Faculté des sciences agricoles et agronomiques. approvisionnement alimentaire à l’Université Laval. La liste des ingrédients, longue et difficile à comprendre, n’est pas attractive et on peut se demander si le public cible a été suffisamment identifié.
Les végétariens ne vont pas au rayon du bœuf haché et ceux qui achètent de la viande ont peut-être essayé le produit Beyond Meat, mais s’ils n’en voient aucun avantage, ils continueront avec du bœuf haché. . C’est le mur qu’ils ont heurté.
Laurence Godin, professeure à la Faculté des sciences de l’agriculture et de l’alimentation de l’Université Laval
Une étude réalisée pour GFI conclut que le goût et la texture sont en tête des raisons de ne pas les racheter.
Quant aux arguments éthiques (bien-être animal, environnement) mis en avant pour booster les ventes, ils ne suffisent pas à changer les habitudes de consommation, conclut la doctorante Claudia Laviolette, dont les recherches portent sur les protéines végétales. Nous craignons le greenwashing, nous remettons en question la fiabilité des données. Les recettes et astuces pour cuisiner de la fausse viande fonctionnent davantage, mais l’expert estime toujours que l’industrie de la fausse viande risque de disparaître.
Ce qui est fascinant, dans ces circonstances, c’est de voir à quel point les laits végétaux ont connu une trajectoire inverse.
Le volume des ventes a bondi de 36 % au Canada au cours des cinq dernières années, ce qui en fait la catégorie qui connaît la croissance la plus rapide parmi tous les « produits alimentaires emballés », selon Agriculture Canada.
Aux États-Unis, le marché du lait végétal (2,9 milliards de dollars, selon GFI) dépasse de loin celui de la viande végétale (1,2 milliard de dollars), même si le prix unitaire est bien plus élevé.
Si la viande végétale souffre de ses prix plus élevés que la viande, cela ne constitue pas un frein au rayon des produits laitiers, même si celle produite par les vaches est bien moins chère.
Un litre de lait Québon 2 % se vend 2,26 $, alors qu’il faut débourser environ 3,50 $ pour un plus petit contenant de 946 ml de lait d’avoine ou de soya. La même quantité de lait d’amande se vend 4,99 $, tandis que le litre d’Elmhurst Cashew Drink coûte 10 $.
Face à cet engouement, que les prix ne freinent pas, les transformateurs laitiers ont imité leurs confrères de la filière viande en investissant dans des usines de production de lait végétal. Ils ont même inventé le lait de poule végétalien qui plaît aux carnivores. Vous devez le faire !