Dans les années 60le bureau d’études Citroën est en pleine tourmente. Cela va même un peu dans tous les sens, entre le projet F jamais terminé, le G-Mini à peine esquissé, les blocs pour la DS qui ne verront jamais le jour et le moteur rotatif. Inventé par l’ingénieur Félix Wankel, un nazi au moins aussi fervent que le Dr Mengele de sinistre mémoire, il a intéressé de nombreux constructeurs qui l’ont testé.
Chez Fiat, Dante Giacosa, l’ingénieur en chef, comprend vite que c’est une impassemais tout le monde n’est pas aussi clairvoyant. NSU est le premier à le proposer en série, mais fait rapidement face à des défis des soucis de fiabilité colossauxs’associe à Citroën pour partager le développement. Ils créèrent une société commune, Comotor, et la première application commercialisée du double chevron fut le M35, en 1969.
Dans un éclair de génie, chez Citroën, où les finances sont déjà difficiles, nous décidons de changer complètement d’approche. Au lieu de développer ses voitures dans le secret le plus paranoïaque, le double chevron décide de communiquer à fond sur le moteur rotatif et a l’idée de faire payer aux clients une partie du développement.
En bref, nous sélectionnons des fidèles de la marque, nous nous assurons qu’ils passeront au moins par 30 000 km par an pendant deux ans et la voiture leur fut vendue à partir de janvier 1970, leur offrant un garantie royale pour l’époque : toutes les pannes mécaniques seront entièrement prises en charge pendant ces deux années (un an pour le reste de la voiture) et un véhicule de remplacement sera mis à disposition gratuitement.
À une époque où les voitures neuves n’étaient généralement garanties que six mois, il était
intéressant ! Cependant, les clients testeurs devront payer environ 13 500F (soit 17 000 € aujourd’hui selon l’Insee, sachant que la toute nouvelle GS colle aux 11 380F), et payer l’entretien.
Et quelle est cette Citroën expérimentale ? A la base, il s’agit d’un coupé basé sur l’AMI8 mais équipé d’un Moteur rotatif de 995 cm3 développant 49 ch à la place du bicylindre de 602 cm3 équipant la berline. Appelé M35, ce deux portes à la poupe très insaisissable, a aussi le suspension hydropneumatique maison.
500 exemplaires sont prévusqui sera assemblé à Heuliez. En conduisant, le M35 séduit sur de nombreux points. En plus d’un confort royal, elle tient très bien la route, émet peu de bruit et offre des performances bien meilleures que celles d’une AMI8 standard, pointant à près de 145 km/h. Aussi rapide qu’une Renault 12, de catégorie supérieure. Les clients sont également ravis de faire partie d’un groupe d’élite, sélectionné par Citroën.
Mais ils vont vite déchanter. Déjà, le M35 dévoile un solide appétit pour l’essenceconsommer allègrement 10 l/100 km. De plus, le moteur aime assaisonner son carburant avec beaucoup d’huileavant de se briser prématurément. Citroën arrête l’expérimentation alors que seuls 267 M35 ont été livrés et cherche à les écraser.
On pourrait penser que l’expérience Wankel est terminée pour le constructeur. Non! Il récidive en 1974 avec la fameuse GS Birotoret mêmes causes, mêmes effets. La voiture s’avère attractive à conduire, mais aussi chère, gourmande et peu fiable. Et là encore, Citroën cherchera à détruire les exemplaires fabriqués. Ce que Ferrari a eu la délicatesse de ne pas tenter avec les FXX et 599XX, qui n’étaient pourtant pas autorisées à rouler sur la voie publique… Quant au moteur Wankel, seule Mazda persiste à l’utiliser dans des automobiles avec des résultats qui ne sont pas encore concluants.