Thorsten Gröger, négociateur du syndicat de l’automobile, lors d’une conférence de presse, le 20 décembre 2024 à Hanovre, en Allemagne (AFP / Ronny HARTMANN)
Le premier constructeur automobile européen Volkswagen supprimera plus de 35 000 emplois en Allemagne d’ici 2030 et réduira sa production dans le pays, tout en évitant des fermetures d’usines et des licenciements dans le cadre d’un accord conclu vendredi pour tenter de sauver le groupe en crise.
Direction et syndicat ont manifesté leur soulagement face à ce compromis, conclu au forceps après trois mois de négociations tendues, ponctuées de deux grèves qui ont paralysé les sites du groupe.
L’accord prévoit “une réduction socialement acceptable des effectifs” de plus de 35.000 personnes sur les sites allemands de la marque Volkswagen d’ici 2030, soit 29% de ses effectifs totaux, a annoncé le constructeur, fleuron de l’industrie allemande.
Ces départs ne seront pas contraints, ont souligné les représentants du personnel. De nombreux départs à la retraite, notamment, ne seront pas remplacés.
La formule trouvée “garantit des emplois, préserve la production dans les usines et permet en même - des investissements futurs importants”, a déclaré Thorsten Gröger, négociateur du syndicat de l’automobile.
“Il n’y aura pas de fermeture d’usine, les licenciements économiques sont exclus”, a-t-il assuré alors que ce scénario était sur la table depuis des mois.
– La Golf va au Mexique –
Selon les syndicats, la direction exigeait dans un premier - la suppression de 55 000 emplois.
En échange, les salariés ont accepté de renoncer à un certain nombre de primes et de réduire les capacités de production dans plusieurs des dix usines allemandes du groupe, qui seront réduites de plus de 700 000 unités.
Ils sacrifient également un site mineur : l’usine de Dresde (Est), qui emploie environ 340 personnes, ne produira plus de voitures après fin 2025. Et un symbole : l’emblématique Golf sera produite au Mexique à partir de 2027, et davantage en 2027. le berceau du groupe, à Wolfsburg (nord).
Sur ce site, qui est aussi le siège et la plus grande usine mondiale de Volkswagen, deux lignes de production sur quatre et 4 000 emplois seront supprimés.
L’usine d’Osnabrück (Ouest), où Volkswagen emploie 2.300 personnes, ne devrait plus produire de véhicules après mi-2027, en vue d’une « autre utilisation » de l’usine. Selon le quotidien économique allemand Handelsblatt, le groupe recherche un repreneur.
Les deux parties négocient de manière quasi continue depuis lundi pour parvenir à un accord avant la fin de l’année.
Grâce à cet accord, Volkswagen espère générer « 4 milliards d’euros par an » d’économies à moyen terme, dont 1,5 milliard proviendraient de la baisse du coût du travail et d’une réduction progressive des effectifs.
Un gel des salaires est prévu pour 2025 et 2026, ainsi que l’étalement de certaines primes sur plusieurs années
– VW « de plus en plus petit » –
Volkswagen souffre du ralentissement mondial des ventes de voitures, de la concurrence chinoise, de modèles à batterie peu attractifs qui ralentissent la dynamique de sa transition vers l’électrique et d’un coût de main d’œuvre élevé.
Avec les réductions annoncées, “VW devient de plus en plus petite en Allemagne”, commente auprès de l’AFP Ferdinand Dudenhoeffer, expert de l’industrie automobile au Centre Automotive Research (CAR).
Il en va de même pour de nombreux constructeurs automobiles historiques du pays, analyse-t-il, ajoutant que « l’Allemagne perd de son importance pour l’industrie automobile ».
Les malheurs de Volkswagen incarnent le malaise plus large de la plus grande économie d’Europe, qui a été frappée par les prix élevés de l’énergie et se dirige vers une deuxième année consécutive de contraction.
Au-delà des salariés, c’est tout le pays qui attendait le verdict du premier employeur industriel du pays.
Sabine Timpe, employée dans une filiale de services de VW, a déclaré à l’AFP qu’elle était “terrifiée” par la crise actuelle.
“Mon grand-père disait toujours : ‘Une fois que tu es chez Volkswagen, tu es en paix jusqu’à la fin de ta vie'”, a déclaré cette femme de 60 ans dont les deux enfants travaillent également chez VW et qui a manifesté en décembre à Wolfsburg, siège et plus grande usine du groupe.
La crise chez Volkswagen est également un sujet central de la campagne pour les élections législatives du 23 février en Allemagne.
Le chancelier social-démocrate Olaf Scholz, qui se bat pour un second mandat malgré son impopularité, a pris la cause des salariés car, selon lui, « de mauvaises décisions de la direction ont contribué à cette situation ».