Contrairement à certaines interprétations qui circulent dans l’espace public, le gouverneur de la Banque centrale marocaine, Abdellatif Jouahri, n’a en aucun cas demandé «la suppression» aide directe aux ménages vulnérables. Lors de son discours à l’issue de la réunion trimestrielle du Conseil d’administration de Bank Al-Maghrib, tenue mardi, M. Jouahri a simplement évoqué la nécessité d’adopter une approche équilibrée et durable des politiques sociales et économiques.
Répondant à une question sur les recommandations du rapport annuel 2023-2024 de la Cour des comptes, le premier financier du royaume a exprimé son soutien à l’idée d’une transition progressive vers des mécanismes de création d’emplois et d’amélioration des revenus des catégories vulnérables. Il a toutefois précisé qu’il n’avait pas encore étudié en détail le contenu de ce rapport.
Aide temporaire et circonstancielle
M. Jouahri a noté que le soutien direct, sous sa forme actuelle, « devrait être considérée comme une mesure temporaire adaptée à des circonstances spécifiques. » Il a insisté sur le fait que pérenniser ce mécanisme « pourrait avoir des conséquences négatives sur la conception, l’emploi et la viabilité des finances publiques. » Selon lui, un soutien direct permanent « risquerait de décourager certains bénéficiaires d’entrer sur le marché du travail, même s’il existe des perspectives d’emploi. »
Pour autant, M. Jouahri n’a jamais préconisé la suspension immédiate ou brutale des aides directes. Selon lui, il s’agit d’une réflexion à long terme visant à promouvoir des solutions structurelles, comme la création d’emplois productifs et durables. Il a souligné « l’importance de renforcer la croissance économique et de soutenir les secteurs non agricoles, notamment à travers une coopération accrue entre le secteur public et le secteur privé ».
Enjeux budgétaires et sociaux
M. Jouahri a également évoqué les contraintes budgétaires liées à une prolongation indéfinie du soutien direct, soulignant qu’une telle situation « pourrait compromettre la marge de manœuvre budgétaire nécessaire au financement d’autres priorités nationales. » Il a ainsi plaidé pour une politique intégrant des mesures transitoires et ciblées tout en favorisant des mécanismes qui stimulent la création de richesse et l’intégration socio-économique.
Un plaidoyer pour le développement durable
M. Jouahri a profité de son intervention pour revenir sur les défis actuels liés à la lutte contre le chômage, notamment chez les jeunes. Il a estimé que la relance de l’emploi ne pouvait passer que par un accroissement de la richesse nationale et une meilleure redistribution des ressources collectives. Il a également encouragé les efforts dans des secteurs prometteurs tels que le tourisme, le commerce et les services, qui constituent des moteurs essentiels de création d’emplois.
Interrogé sur d’autres sujets, M. Jouahri a mis en garde contre une incertitude mondiale exacerbée par des facteurs géopolitiques et économiques, comme les tensions entre grandes puissances ou le retour prochain de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis. Il a toutefois rappelé que les relations solides entre le Maroc et Washington, notamment après la reconnaissance par les Etats-Unis de la souveraineté marocaine sur le Sahara, restaient un atout stratégique pour Rabat.