– Article mis à jour à 19h32 –
La Fonderie de Bretagne menacée de fermeture ? C’est ce que craignent les 350 salariés de ce site industriel basé à Caudan (Morbihan), mobilisés depuis le début de la semaine pour défendre leur emploi. “ L’usine est complètement fermée », Supports Maël Le Goff, the CGT union delegate from the Fonderie de Bretagne.
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En question? Les difficiles négociations entre l’entreprise, l’Etat représenté par le ministère de l’Industrie, le groupe Renault, ancien propriétaire de la fonderie et son principal client, ainsi que la société German Private Assets, qui a déposé une offre de reprise depuis plusieurs mois.
« Le directeur du site, Jérôme Dupont, nous a indiqué que Renault ne souhaitait pas soutenir le projet du repreneur. Ils estiment que son projet de rachat n’est pas viable, même si deux experts indépendants assurent le contraire. Nous attendons la position officielle de Renault car pour l’instant nous n’avons pas de preuve de ce que dit le directeur », poursuit le délégué du personnel.
Quelques heures plus tôt, dans la soirée du mercredi 4 décembre, Jérôme Dupont prenait la plume pour adresser une lettre aux salariés sans cacher la complexité de la situation. ” Renault refuse de financer le projet Private Assets. Ce faisant, cela condamne l’entreprise à très court terme », a écrit le directeur général à ses salariés. Face à l’urgence de la situation, le président du tribunal judiciaire de Rennes a décidé de réunir au plus vite tous les protagonistes du dossier.
Un acheteur qui exige des volumes
La complexité de la situation trouve son origine il y a quelques années. Au début des années 2020, le groupe Renault, alors engagé dans un important plan d’économies, cherche à se séparer de la Fonderie de Bretagne (FDB) qui était jusqu’ici sa filiale et son unique client. Ce qu’il a réussi à faire en 2022 en le cédant au fonds d’investissement allemand Callista Private Equity, mais aussi en s’engageant dans des investissements communs avec son nouveau propriétaire afin de moderniser le site industriel, et surtout de le diversifier. Ce qui a été fait, timidement, dans le domaine ferroviaire, de la défense et du matériel agricole, alors queLa marque au losange fabrique des pièces de sécurité et des pièces pour les moteurs et boîtes de vitesses de ses voitures.
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«Deux ans plus tard, force est de constater que les experts avaient raison et que le projet ne peut être réalisé sans financement supplémentaire. La Fonderie de Bretagne a identifié un nouvel actionnaire potentiel, Private Assets, porteur d’un projet qui permettrait à FDB de finaliser son redressement et son retour à l’équilibre en 2027″, déplore la direction de la fonderie, dans un communiqué diffusé aujourd’hui et qui n’épargne pas Renault.
Ce repreneur allemand a pour premier intérêt d’avoir en sa possession d’autres fonderies en Allemagne et en Espagne, et propose ainsi une intégration dans un groupe de fonderie européen avec un partage de l’activité. Selon la direction de FDB, Actifs privés transférerait 11 000 tonnes par an de nouvelle production à FDB, permettant de sortir rapidement de la dépendance commerciale vis-à-vis du secteur automobile en général et du groupe Renault en particulier. Mais une telle manœuvre industrielle prend du -, entre adaptation des lignes de production sur site et montée en compétence des équipes. Ce projet implique donc l’engagement industriel de Renault afin de maintenir les flux liés à l’industrie automobile pendant que cette nouvelle production se concrétise.
« Ce qui est demandé au groupe Renault, c’est de maintenir les engagements pris en 2022, de maintenir des volumes suffisants jusqu’en 2028 sur la base des pièces actuellement produites et de financer un besoin supplémentaire de moins de 8 millions d’euros », écrit la direction de la Fonderie de Bretagne qui estime que Renault souhaite sa fermeture.
Autres cas similaires dans un passé récent
Ces conditions auraient pourtant été refusées par les négociateurs de Renault. La direction de l’usine bretonne le regrette » stratégie de déliquescence visant à étouffer l’entreprise et à contraindre l’acquéreur à abandonner ». « Ils ont identifié d’autres fonderies pour transférer notre production vers », a précisé Jérôme Dupont, dans sa lettre adressée aux salariés. Toutefois, l’État a pris position cette semaine dans s’engageant dans le projet de l’acheteur potentiel avec un prêt de 14 millions d’euros. ” L’État est intervenu trop tard », regrette Maël Le Goff de la CGT. Avec le renversement du gouvernement par l’Assemblée nationale quelques heures plus tôt, qui peut désormais faire pression sur Renault ?
Le dossier Fonderie de Bretagne doit rappeler certains souvenirs dans le département de l’Aveyron, orphelin de la fonderie SAM depuis trois ans quasiment jour pour jour. Cette fonderie – qui employait plus de 300 personnes lors de sa liquidation – travaillait uniquement pour Renault dans ses dernières années, le constructeur ayant demandé une certaine exclusivité dans la production. Mais le constructeur automobile français a décidé de chercher un repreneur, privilégiant ainsi un grand groupe espagnol, tandis que le conseil régional d’Occitanie s’est lancé dans le dossier avec une solution locale, Lotois MH Industries, qui souhaitait dynamiser son activité. fonderie. Après de très longs mois de négociations, MH Industries n’est jamais parvenu à obtenir le soutien de Renault, via des commandes industrielles, le - de diversifier l’activité de cette fonderie historique. Ce qui a précipité sa liquidation.
Pour relancer la fonderie SAM, “il n’y a pas de plan B sans Renault” selon MH Industries
Dans l’affaire des Fonderies du Poitou, le comportement de Renault a également été pointé du doigt par les salariés. Fin 2022, lea fonderie Poitou Alu, basée à Ingrandes-sur-Vienne, avait été liquidée par le tribunal de commerce de Paris. L’usine de culasses avait Renault pour seul client, tout comme la fonderie poitevine Fonte, liquidée en décembre 2020. Elle fabriquait des carters pour moteurs diesel et thermiques uniquement pour Renault. Près de 900 salariés se sont retrouvés au chômage avec l’arrêt de l’activité de ces deux usines. La récente hémorragie des fonderies françaises a poussé Carole Delga, présidente des Régions de France, à engager une réflexion au sein de cette structure pour un plan en faveur des fonderies du pays au nom de la souveraineté. Depuis, aucune annonce n’a été faite.
Contacté par La Tribune, Renault nie fermement ne pas agir dans le dossier de la Fonderie de Bretagne. “ Les discussions ne sont pas totalement terminées (…) Depuis fin 2022, nous entretenons une relation client-fournisseur avec FDB. Cependant, avec la transition que connaît l’industrie automobile, un véhicule électrique a besoin de moins de pièces en fonte qu’un véhicule thermique. », explique le groupe français, tandis que Fonderie de Bretagne évoque un futur volume d’affaires avec Renault de -30 %. ” Avec aucun de nos fournisseurs nous nous engageons sur des volumes fermes. Chaque année, les volumes prévisionnels sont communiqués aux fournisseurs. Et chez tous les fournisseurs, pas seulement la Fonderie de Bretagne, le chiffre d’affaires réalisé n’est pas au niveau prévu car le secteur automobile évolue fortement. Nous maintiendrons le lien commercial avec FDB, mais à la hauteur de nos besoins », informe la direction de Renault. Outre ce lien commercial, le constructeur automobile affirme avoir un engagement ferme avec l’acquéreur de 30 millions d’euros de soutien financier, en plus des 14 millions prêtés par l’Etat. Mais pour la direction de la Fonderie de Bretagne, il manquerait huit à neuf millions d’euros pour mener à bien le plan de sauvetage.