Les tensions géopolitiques persistent, les marchés mondiaux continuent de se fragmenter en blocs commerciaux et en marchés individuels qui se compartimentent les uns par rapport aux autres. Cela ne changera pas avec l’arrivée de Donald Trump à la tête du gouvernement américain. Au contraire, elle érigera probablement de nouvelles barrières commerciales, auxquelles d’autres pays répondront par des mesures de rétorsion. Les gouvernements devront veiller à ne pas alimenter l’inflation dans leur pays en augmentant les droits de douane. Les consommateurs sont trop conscients des conséquences négatives de l’inflation qui, notamment aux États-Unis ou dans les pays de l’UE, continue de toucher particulièrement les personnes à faibles revenus. L’inflation s’élève toujours à 2,6 % aux États-Unis et à 2,3 % dans l’UE, et n’est donc plus loin de l’objectif de 2 %. Mais l’inflation sous-jacente – c’est-à-dire le taux d’inflation sans les composantes volatiles des prix alimentaires et énergétiques – dépasse nettement cette valeur cible, aussi bien aux Etats-Unis (3,3%) que dans la zone euro (2,7%). Une augmentation des prix des importations, par exemple, alimenterait à nouveau très rapidement l’inflation. En Chine, l’inflation pose certes moins de problèmes, mais le pays ne joue actuellement plus le rôle de locomotive de la croissance dans l’économie mondiale. Son économie nationale souffre des conséquences de l’éclatement de la bulle immobilière : la consommation et les investissements sont faibles. En outre, les exportations sont freinées par le conflit commercial en cours, notamment avec les États-Unis. La guerre en Ukraine et le conflit au Moyen-Orient continuent de peser sur l’économie mondiale et de créer des incertitudes.
Entreprises exportatrices : 2025, une année de défis
Les difficultés rencontrées par l’économie mondiale pèsent sur l’industrie exportatrice suisse. Mais globalement, elle s’affirme néanmoins dans un contexte international difficile en misant sur des produits de niche très pointus et des spécialités innovantes. L’économie d’exportation suisse bénéficie d’une grande diversification et de son orientation mondiale. C’est un atout en ces - incertains. Si la demande s’affaiblit par exemple dans l’industrie automobile européenne, cela posera certainement un problème pour la Suisse, mais ne constituera pas une menace existentielle, car d’autres marchés compenseront, au moins en partie. En 2025, les défis à l’étranger auront tendance à s’intensifier plutôt qu’à diminuer. Dans l’ensemble, economysuisse s’attend à ce que les exportations de biens et de services n’augmentent que légèrement l’année prochaine. Les industries pharmaceutique et médicale, moins exposées aux fluctuations économiques, connaîtront une croissance stable. La faiblesse de la demande pèse particulièrement sur les secteurs des machines et de l’horlogerie. Les perspectives sont mitigées dans les secteurs du textile et de la chimie. Les secteurs qui connaissent le plus de difficultés sont ceux fortement orientés vers la Chine et l’Allemagne. Cela dit, la perspective sectorielle fausse quelque peu le tableau, car certaines entreprises peuvent réussir à se développer dans chaque secteur. On parle un peu moins des exportations suisses de services qui enregistrent pourtant une croissance robuste. Le secteur du tourisme ne revient certes pas aux chiffres de la période post-pandémique, mais regarde l’avenir de manière positive. Les services bancaires et d’assurance se développent régulièrement. Le négoce de matières premières a tendance à bénéficier d’un environnement volatil et de prix plus élevés.
Solide développement de l’économie nationale
L’économie nationale peut compter sur une consommation stable. Les ménages bénéficient des augmentations de salaires, en termes réels, et du faible taux de chômage. L’État consomme aussi de manière soutenue. Les entreprises sont beaucoup plus réservées, l’évolution incertaine du marché ralentissant les investissements. Mais en 2025, les investissements en biens d’équipement devraient à nouveau augmenter. De nombreux secteurs, principalement axés sur l’économie nationale, connaîtront des évolutions positives en 2025, après une bonne année 2024 : le bâtiment et surtout les travaux de second œuvre, le commerce de gros et de détail, la santé, le conseil ou encore l’informatique/télécoms pourront globalement progresser. L’année sera plus difficile dans le secteur de l’imprimerie et de l’édition. Les faibles taux d’intérêt et l’inflation, la hausse des salaires nominaux, la baisse des prix de l’électricité et la légère croissance de l’emploi sont autant de facteurs qui soutiennent l’économie nationale.
Le marché du travail suisse se normalise quelque peu : le nombre de postes vacants diminue et la pénurie de main-d’œuvre diminue légèrement. Cela dit, les perspectives d’emploi restent généralement bonnes, les entreprises étant plus nombreuses à vouloir augmenter leurs effectifs plutôt qu’à les réduire. economiesuisse s’attend à une légère augmentation du taux de chômage, passant de 2,4% (2024) à 2,6% (2025).
L’inflation en Suisse est faible. Cela s’est résolu plus rapidement que prévu. Tant que les prix de l’énergie ne s’envolent pas à nouveau, les augmentations de prix pour 2025 seront limitées. L’inflation restera dans la marge de fluctuation de la BNS et tombera en dessous de 1%. En comparaison annuelle, le franc va se renforcer (en termes nominaux), pour plusieurs raisons. Premièrement, les écarts de taux d’intérêt du franc suisse par rapport à l’euro et au dollar américain diminuent. Deuxièmement, l’inflation en Suisse est durablement plus faible que dans les autres zones monétaires. Troisièmement, la dette publique globale de notre pays et les nouvelles dettes sont faibles. Et quatrièmement, l’excédent de la balance commerciale de la Suisse est maintenu. Dès lors, le franc va se renforcer face à l’euro. economiesuisse s’attend à un taux de change moyen du franc par rapport à l’euro de 91 cents en 2025. Comme l’évolution économique aux Etats-Unis est nettement meilleure que dans la zone euro, le franc s’appréciera moins fortement par rapport au dollar américain. C’est surtout l’euro qui connaît une phase de faiblesse.
Risques cycliques et facteurs freinant la croissance
Les participants à l’enquête réalisée par Economiesuisse en novembre estiment que les tensions géopolitiques constituent le principal risque économique. Comme le montrent certaines réponses, les risques sont principalement localisés à l’étranger, l’Allemagne et les États-Unis étant particulièrement mis en avant. Cela dit, des facteurs nationaux entravent également la croissance économique, à commencer par la bureaucratie et la réglementation. Près d’un cinquième des participants à l’enquête déclarent que cela limite leur croissance. Par rapport à juin 2024 et à l’année dernière, la part des entreprises souffrant d’une grave pénurie de main-d’œuvre a diminué. Cependant, environ 7% des participants indiquent que cela représente toujours le principal risque économique pour leur entreprise. Enfin, les taux de change inquiètent 10 % des personnes interrogées.
Prévisions concernant l’évolution des comptes nationaux | |||||
Variation par rapport à l’année précédente (en %) | |||||
2021 | 2022 | 2023 | 2024P | 2025P | |
Produit intérieur brut, réel | 5,4 | 2,7 | 0,7 | 1,1 | 1,4 |
Consommation des ménages | 1,8 | 4,2 | 2,1 | 1,5 | 1,6 |
Dépenses publiques | 3,3 | -0,8 | -2,0 | 2,0 | 1,4 |
Investissements dans la construction | -3,1 | -5,5 | -2,0 | 0,8 | 0,9 |
Investissements en biens d’équipement | 6,0 | 4,6 | -1,1 | -0,1 | 3,0 |
Exportations (totales)1 | 12,6 | 4,5 | 2,0 | 1,7 | 1,0 |
Importations (totales)1 | 5,9 | 5,9 | 4,5 | 2,1 | 1,6 |
1Sans or et objets de valeur non monétaires | |||||
Prévisions relatives à l’évolution des prix et du marché du travail | |||||
Taux d’inflation | 0,6 | 2,8 | 2,2 | 1,3 | 0,8 |
Taux de chômage | 3,0 | 2,2 | 2,0 | 2,4 | 2,6 |
Hypothèses exogènes* | ||
2024 | 2025 | |
Taux de change CHF/EUR | 0,95 | 0,91 |
Taux de change CHF/USD | 0,88 | 0,86 |
Prix du pétrole, en USD | 81 | 73 |
Croissance aux États-Unis | 2,6 | 1,6 |
Croissance dans la zone euro | 0,6 | 1,0 |
Croissance en Chine | 4,5 | 4,2 |
Taux d’intérêt à court terme | 1,3 | 0,8 |
Rendement des prêts fédéraux | 0,6 | 0,3 |
* Valeurs sous-jacentes aux prévisions économiques |