mar 03 décembre 2024 ▪
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Luc José A.
À mesure que la guerre en Ukraine se prolonge, les conséquences économiques pour la Russie commencent à se faire sentir avec plus d’acuité. Initialement connue pour sa résilience face à l’un des régimes de sanctions les plus sévères de l’histoire moderne, l’économie russe montre désormais des signes évidents d’essoufflement. L’inflation s’accompagne d’une montée en flèche des taux d’intérêt. Dans le même -, la fragilité du rouble, en baisse constante face au yuan, reflète une dépendance croissante à l’égard de la Chine, principal partenaire commercial de Moscou.
Un effort de guerre disproportionné qui fragilise l’économie russe
Depuis le début de la guerre en Ukraine, la Russie a considérablement augmenté ses dépenses militaires, qui représentent 40 % de son budget total de défense et de sécurité. Ce chiffre, qui représente 8 % du PIB, n’a plus été atteint depuis la guerre froide. Il s’agit d’un effort financier sans précédent dans l’histoire récente du pays. En 2024, ces dépenses devraient augmenter de 25 %, pour atteindre un total de 17 000 milliards de roubles (170 milliards de dollars), selon les prévisions budgétaires officielles. Cette allocation massive reflète la détermination du Kremlin à maintenir son effort militaire, malgré les fortes pressions exercées sur son économie nationale.
Pour soutenir ces dépenses, la banque centrale russe a été contrainte d’augmenter son taux directeur à 21 %, un niveau jamais vu depuis deux décennies. Si cette politique vise à contenir une inflation galopante, actuellement estimée à 8 %, elle a néanmoins des répercussions directes sur la population et les entreprises. Les ménages voient leur pouvoir d’achat s’éroder, tandis que les entreprises sont confrontées à des coûts d’emprunt prohibitifs. En juillet, la suppression des subventions sur les prêts hypothécaires, qui permettaient jusqu’alors d’emprunter à 8 %, a entraîné une réduction de moitié des nouveaux prêts. Ainsi, cette situation a plongé le marché immobilier dans un ralentissement brutal. Dans le même -, les faillites d’entreprises ont bondi de 20 % cette année, signe clair de l’affaiblissement du tissu économique russe. La situation nécessite des sacrifices économiques sans précédent, qui illustrent les tensions croissantes d’un modèle sous pression.
Une monnaie sous pression et une dépendance croissante à l’égard de la Chine
Cette dépréciation du rouble par rapport au yuan, en baisse de 10 % cette année, illustre l’isolement croissant de la Russie sur la scène économique internationale. Une telle situation reflète également une dépendance accrue à l’égard de la Chine, qui joue désormais un rôle central dans le commerce extérieur russe. Pékin fournit plus de 90 % de la microélectronique utilisée dans les armes russes, notamment les drones, les missiles et les chars. Bien que stratégique, cette collaboration s’avère coûteuse, car elle soumet Moscou aux conditions imposées par son partenaire asiatique. Cet état de fait accroît les déséquilibres économiques extérieurs. En outre, cela rend complexe la gestion monétaire et budgétaire du Kremlin.
Sur le plan intérieur, la situation économique continue de se détériorer. Le Fonds monétaire international prévoit une croissance limitée à 1,3% pour la Russie en 2024, contre 3,6% en 2023. Ce ralentissement économique est la conséquence directe de la hausse des coûts d’emprunt, qui ralentit les investissements, ainsi que de la perte de main d’œuvre qualifiée, mobilisée en masse sur le devant. De plus, la priorité accordée aux dépenses militaires détourne des ressources essentielles d’autres secteurs économiques. Ce contexte expose encore davantage le Kremlin à des défis financiers majeurs, avec une économie en surchauffe et des perspectives de financement militaire de plus en plus limitées. En l’absence d’ajustements stratégiques, ces tensions pourraient altérer durablement la capacité de la Russie à soutenir un effort de guerre prolongé.
L’économie russe est confrontée à des défis croissants, entre un effort de guerre intensif et une dépendance accrue à l’égard de ses partenaires extérieurs. Cette fragilité du rouble et une inflation durable pourraient contraindre le Kremlin à revoir ses priorités économiques. Même si Moscou mise sur une possible évolution géopolitique favorable, notamment avec le retour de Donald Trump, cette stratégie reste incertaine. La capacité de la Russie à supporter durablement le coût de cette guerre reste une question ouverte, avec des implications potentiellement décisives pour son avenir économique et politique.
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Luc José A.
Diplômé de Sciences Po Toulouse et titulaire d’une certification de consultant blockchain délivrée par Alyra, j’ai rejoint l’aventure Cointribune en 2019. Convaincu du potentiel de la blockchain pour transformer de nombreux secteurs de l’économie, j’ai pris l’engagement de sensibiliser et d’informer le grand public. public sur cet écosystème en constante évolution. Mon objectif est de permettre à chacun de mieux comprendre la blockchain et de saisir les opportunités qu’elle offre. Je m’efforce chaque jour de fournir une analyse objective de l’actualité, de décrypter les tendances du marché, de relayer les dernières innovations technologiques et de mettre en perspective les enjeux économiques et sociétaux de cette révolution en cours.