Jeudi 14 novembre, les départements menés par la droite et le centre ont tapé du poing sur la table : ils ont menacé de suspendre le versement du revenu de solidarité active (RSA) et de cesser de prendre en charge les nouveaux mineurs non accompagnés (MNA) si le gouvernement le faisait. pas revenir sur les coupes budgétaires prévues pour 2025. Selon vous, que se passerait-il ? Le Premier ministre, pour calmer la fureur des départements, a proposé de renflouer les caisses des départements… en augmentant les DMTO (Foreign Transfer Rights), improprement appelés « frais de notaire ». “ La droite a longtemps été la gauche sans impôts, mais aujourd’hui ce n’est même plus le cas », notait Philippe de Villiers récemment devant le public de l’IFP (Institut de Formation Politique).
Laissons l’État gérer !
Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit « un effort » de 5 milliards d’euros pour les collectivités, dont deux milliards d’euros pour les départements, qui n’arrivent plus à faire face. « Aujourd’hui, les mineurs non accompagnés, laissons l’État les gérer et prendre en charge » a déclaré Nicolas Lacroix (LR), président du groupe des départements de la droite, du centre et des indépendants (DCI). Il faut savoir que la question des mineurs non accompagnés est une patate chaude entre les départements et l’Etat : ce dernier considère qu’elle relève de la responsabilité de la protection de l’enfance, et donc du département. Les départements estiment que, puisqu’il s’agit d’une question migratoire, c’est à l’État de s’en charger.
Il faut savoir aussi que depuis l’élection de Macron en 2017, plus de 100 000 mineurs ont été pris en charge par les départements. L’année 2023 a été une année record avec une augmentation de 31 %. Les mineurs non accompagnés représentent actuellement entre 15 % et 20 % des mineurs pris en charge par l’ASE (Assistance sociale à l’enfance), désormais saturée. Le coût annuel par personne est estimé entre 36 500 euros par la Drees (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques) et 50 000 euros selon l’Assemblée des départements de France. A cela il faut ajouter, par exemple, les tests osseux (1 500 euros), lorsque la justice les autorise… et parfois, les frais de justice : comme le soulignait la sénatrice LR Valérie Boyer lors d’une question au ministre de l’Intérieur en 2023, ces soi-disant les mineurs non accompagnés sont souvent victimes d’exploitation sexuelle ou économique, d’esclavage domestique, de mendicité forcée, ils sont forcés ou entraînés à commettre des délits (notamment par des trafiquants de drogue)… et parfois tout cela à la fois. Cette situation simple et triste devrait, à elle seule, pousser chacun à lutter contre ce phénomène devenu une voie d’immigration ordinaire, au nom de la Convention relative aux droits de l’enfant signée par la France : celle-ci stipule qu’un enfant a le droit essentiel de vivre avec ses parents. Qui garderait un enfant trouvé chez lui, au risque de le mettre en danger, sans lui demander d’où il vient, qui sont ses parents, et sans chercher à le ramener chez lui ? C’est pourtant ce que fait la France, et bien d’autres pays occidentaux d’ailleurs, qui avec un paternalisme bienveillant d’inspiration néocolonialiste, se considèrent comme le devoir moral d’entretenir et (mal) d’élever les enfants des autres.
S’enfonçant directement dans le mur
La révolte des départements aurait pu être l’occasion pour le Premier ministre de remettre sur la table la question des mineurs non accompagnés. N’avait-il pas simplement déclaré, sur France bleue, qu’il y avait « urgence de contrôler l’immigration clandestine » ? Non, il a choisi la stratégie FADM (Flight Forward Straight into the Wall). Pour compenser le trou de caisse causé – notamment – par les mineurs non accompagnés, Michel Barnier propose d’augmenter les frais de notaire de 0,5 point en 2025. Des frais qui ne vont pas dans les poches des notaires, comme leur nom l’indique. ne l’indique pas, mais dans celui de l’Etat et des collectivités territoriales (en l’occurrence, les départements et communes). Pour l’achat d’un bien à 200 000 euros, la hausse des droits de mutation serait de 1 000 euros de plus sur l’achat, sachant que ces « frais » ne peuvent être financés par un emprunt bancaire, et doivent donc venir du fond de la laine personnelle. Ce que les jeunes ménages, par exemple, n’ont pas forcément.
Cette augmentation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) inquiète beaucoup les professionnels du secteur, alertant d’un possible coup d’arrêt de la (petite) reprise immobilière, notamment chez les primo-accédants. Qui est ainsi visé ? Le propriétaire. Qui aura du mal à le réaliser ? Les classes moyennes. Une fois de plus, nous nous abstenons de réfléchir au sujet central – les mineurs non accompagnés – pour utiliser la seule solution que nos dirigeants connaissent depuis des décennies : la traite des vaches laitières affamées. Le symbole, si on le résume, est inquiétant : c’est l’argent privé des racines foncières qui va financer la mauvaise gestion publique du déracinement mondialisé. Ajoutons enfin qu’appeler presque au même moment au réarmement démographique est une farce cynique : ce n’est pas en dissuadant les jeunes couples de se construire un nid et en les maintenant dans la précarité locative que l’État les incitera à procréer. Dans le même temps, l’Italie de Meloni et la Hongrie d’Orban ont, parmi leurs premières mesures visant à encourager la natalité, prévu un prêt immobilier nul pour les jeunes parents.
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