De l’horlogerie à la santé

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À Neuchâtel, la fabrique de l’innovation, le CSEM, fête ses quarantièmes ans et propose une plongée dans la santé numérique.

Le CSEM intègre différents composants dans un système et le miniaturise. © Xavier Voirol

Le CSEM intègre différents composants dans un système et le miniaturise. © Xavier Voirol

Publié le 21/04/2024

Temps de lecture estimé : 7 minutes

Posées sur une immense paroi de verre, les minuscules cellules photovoltaïques se prélassent au soleil. A Neuchâtel, les panneaux solaires du CSEM, le centre suisse d’innovation technologique, sortent de leur torpeur hivernale. Âgés d’une dizaine d’années, ils ornent la façade blanche du bâtiment construit il y a quarante ans. «Nous sommes partis de l’horlogerie pour étendre nos domaines de recherche à l’astronomie, à la santé, au numérique et à l’énergie», explique la porte-parole de l’un des principaux sites technologiques suisses, Sabina Müller. Le moteur du CSEM depuis sa création en 1984 ? L’infiniment petit. « Nous intégrons différents composants dans un système et le miniaturisons. La haute précision, c’est notre métier», ajoute le porte-parole. Le centre d’innovation technologique a par exemple imprimé en 3D des pièces mécaniques complexes capables de résister aux conditions extrêmes de l’espace. Il a déjà collaboré avec la NASA. Au cours de son histoire, elle a participé au développement de la 3G, au lancement de panneaux solaires blancs et colorés sur les façades et a créé la plus petite puce Bluetooth au monde.

Prévoyez entre deux et sept ans pour le développement du produit. Le centre de transfert de technologie a récemment développé des capteurs d’énergie solaire intégrés à l’écran d’une montre autonome permettant de mesurer la fréquence cardiaque. Travaillant sur ces thématiques depuis plus de 20 ans, il a également inventé la technologie dédiée au bracelet de fertilité. En matière de prise en charge du diabète, elle travaille, l’Idiap de Martigny, sur un système d’alerte précoce permettant de détecter les hypoglycémies par la voix. Elle mène également de nombreux projets dans le domaine médical, notamment en cardiologie, neurologie, chirurgie viscérale et rééducation.

Le CSEM mène ses propres recherches et répond également aux demandes de PME ou de start-up en quête d’innovation. Elle compte plus de 230 clients industriels par an. « Outre les mandats d’entreprise, les licences d’exploitation que nous accordons à nos clients, notamment dans le domaine numérique, représentent également une petite Source de financement », souligne Gürkan Yilmaz, expert senior à l’unité de santé numérique. Fruit d’un partenariat public-privé, le centre n’a pas de but lucratif. Ses revenus publics et privés sont utilisés dans la recherche appliquée et le transfert de technologie. Les technologies restant entre nos mains, cela permet de les développer et de les affiner sur le long terme. En 2022, le CSEM a réalisé un chiffre d’affaires de 100 millions de francs et déposé une vingtaine de brevets.

Centrales

Côté fribourgeois, le centre a travaillé avec 18 entreprises, principalement du secteur industriel, entre 2018 et 2023. «Ces collaborations sont souvent liées à des projets soutenus par l’Agence suisse pour l’encouragement de l’innovation, Innosuisse», précise Jerry Krattiger, directeur de Promotion Economique du canton de Fribourg. La technologie du site neuchâtelois se retrouve sur le toit d’une ferme protégée à Ecuvillens. Ce sont des tuiles solaires ocres imitant la terre cuite.

MC-Monitoring, implanté à Givisiez, est un autre exemple de collaboration avec le CSEM. Ces organisations ont développé ensemble un capteur de haute précision adapté à un fonctionnement dans des conditions extrêmes. Ce capteur est spécialement conçu pour collecter et transmettre des données de maintenance vitales afin de prévenir les dommages dus aux vibrations dans les grands générateurs à turbine utilisés dans les centrales électriques. Salvatore Adamo, directeur de MC-Monitoring qui fait partie du groupe Infoteam, souligne l’importance de cette technologie : « Aujourd’hui, le CSEM fabrique les composants sensibles, appelés microsystèmes électromécaniques, pour nos capteurs, ce qui renforce notre compétitivité sur le marché mondial.

«Plusieurs projets sont au point mort en Suisse, ce qui risque de compromettre son avantage concurrentiel»
Sabine Müller

Exclusion de l’UE

Le centre de recherche appliquée développe également des projets avec la communauté académique. Quid de l’exclusion de la Confédération de certains programmes de recherche européens, suite à la fin des négociations bilatérales en 2021 ? Y a-t-il un projet concret qui est menacé en raison de l’absence d’accord avec l’UE ? «Actuellement, plusieurs projets concrets sont au point mort en Suisse, ce qui risque de compromettre son avantage concurrentiel et de la priver d’une opportunité cruciale dans le virage technologique», répond la porte-parole Sabina Müller.

Ainsi, le projet Macqsimal, porté par le CSEM pour la recherche sur les capteurs quantiques, a impliqué un consortium de 14 partenaires académiques et industriels, dont Bosch. «La Suisse se retrouve désormais dans l’incapacité de participer à de telles initiatives européennes, ce qui nous a exclus de la suite du projet achevé en 2022. De même, notre exclusion du programme européen pour une Europe numérique, doté de plus de 8 milliards d’euros pour soutenir la transformation numérique. des PME européennes est inquiétante. Nous étions à l’avant-garde de ce programme en Suisse, activement engagés dans son réseau Digital Innovation Hubs. Aujourd’hui, nous en sommes réduits à regarder de loin, empêchés de participer et d’impliquer les PME suisses. De plus, notre exclusion de tous les projets de l’initiative Chips for Europe rend extrêmement difficile le maintien de notre compétitivité », estime-t-elle.

Agrandissement en vue

Le pendule. C’est le nom du futur complexe destiné à compléter les infrastructures existantes du quartier de l’innovation de Neuchâtel. Prévu à deux pas du bâtiment historique du CSEM, le projet retenu a été dévoilé début mars. “Pour le moment, la demande de permis de construire est en cours”, précise la porte-parole du CSEM Sabina Müller. L’ancien bâtiment sur le site a déjà été démoli.

Le nouveau venu, qui reprend la forme d’un cadran de montre, accueillera des bureaux, des laboratoires ainsi que des espaces partagés par plusieurs entreprises. Le CSEM louera un espace de plus de 10’000 mètres carrés pour regrouper une partie de ses sites neuchâtelois. Un accent particulier sera mis sur les technologies numériques. La fin des travaux est prévue pour l’été 2027.

Issu d’un partenariat public-privé, la foncière Silatech est chargée de la construction. Coût de l’opération : environ 70 millions de francs, investis par Silatech, le canton de Neuchâtel via la Nouvelle Politique Régionale Neuchâteloise et un financement bancaire. A terme, le bâtiment devrait accueillir près de 250 salariés. Le CSEM emploie 600 personnes avec plusieurs sites en Suisse.

Les couleurs du futur se dessinent à Fribourg

L’Université de Fribourg travaille avec le CSEM. Son Institut Adolphe Merkle collabore notamment avec le site technologique. Spécialisée dans le développement de nouveaux matériaux, elle développe une couleur dite structurelle qui ne se dégrade pas dans le temps. « Cette découverte repose sur un effet physique et non chimique, comme les pigments de peinture traditionnels. Cet effet se retrouve à l’état naturel, par exemple sur les ailes des papillons », explique le Docteur Eliav Haskal, chargé de l’innovation du Centre National de Recherche (PRN) Matériaux Bio-Inspirés basé à l’Institut Adolphe. Merkle. Le procédé repose sur une accumulation de fines couches déposées sur une surface. Pour son industrialisation, lemère nourricière La Fribourgeoise s’est tournée vers le CSEM. « Outre les connaissances en recherche et développement, le centre neuchâtelois dispose de capacités de pré-industrialisation et dispose d’un large réseau d’entreprises partenaires. Cette complémentarité augmente le potentiel de réussite des nouvelles technologies issues de l’université », estime Eliav Haskal. Le chercheur travaille au CSEM depuis plus de 20 ans. Le centre d’innovation travaille entre le monde universitaire et les entreprises. « Dans la plupart des universités, il y a souvent un manque de capacité, de mentalité et de désir de transférer la recherche vers des résultats appliqués. Le CSEM est un partenaire intéressant pour valoriser les recherches menées par les établissements d’enseignement supérieur », ajoute le spécialiste de l’innovation. La couleur structurelle intéresse par exemple l’horlogerie. L’Université de Fribourg conserve la propriété intellectuelle de l’invention.

 
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