Factures de restaurant payées sur fonds publics, remboursées après nos questions

Des hauts fonctionnaires et des élus ont récemment remboursé des notes de restaurant après avoir été interrogés par notre Bureau d’enquête, dont le délégué du Québec à Londres qui a « accidentellement » demandé aux contribuables un repas incluant une bouteille de vin à 150 $.

Le dîner remboursé par la déléguée générale Line Rivard fait partie des nombreux repas arrosés qu’elle a payés avec les fonds publics. Une dizaine de ces dîners n’avaient pas été divulgués au public, encore une fois « par erreur », a-t-on également découvert.

Le 15 septembre 2023, Mmoi Rivard a dépensé 364 $ dans un restaurant d’Oslo, en Norvège, pour un repas incluant une bouteille de pinot noir pour environ 150 $ (conversion basée sur le taux de change à la date du repas).

Le 9 janvier dernier, notre Bureau d’enquête contactait le ministère des Relations internationales et de la Francophonie (MRIF) pour connaître la justification de certaines dépenses, dont celle-ci.

“Le projet de loi à Oslo n’aurait pas dû être réclamé”, a répondu une semaine plus tard la porte-parole du ministère, Camille Jobin. Elle a ensuite expliqué qu’il s’agissait d’une « erreur administrative ».

Elle rembourse le lendemain

Au lendemain de la réponse de son ministère, Mmoi Rivard a émis un chèque pour rembourser la totalité du montant.

Le but de ce repas était de discuter des suites à donner à une mission à laquelle le délégué venait de participer, a précisé le porte-parole.

Les jours précédents, Mmoi Rivard s’est joint au ministre de l’Économie Pierre Fitzgibbon pour une tournée en Suède, au Danemark et en Norvège.

C’est lors de ce déplacement que le ministre a visité les installations de la société Northvolt. Deux semaines plus tard, le gouvernement du Québec annonçait qu’il investirait jusqu’à 3 milliards de dollars en fonds publics dans sa méga-usine de batteries située en Montérégie.

Le repas à Oslo n’est pas une dépense liée à cette mission et il a été décidé de ne pas réclamer les frais, assure-t-on.

« Une directive a été donnée à une employée administrative pour exclure cette facture qui s’est retrouvée par hasard parmi un ensemble de factures qui lui ont été remises. Fraîchement embauché, le salarié a mal compris la directive”, écrit Mmoi Jobin.

Courtoisie

Pénurie de main d’œuvre

Notre bureau d’enquête a également découvert que les informations concernant neuf repas d’affaires du délégué n’avaient pas été rendues publiques sur le site de diffusion d’informations du gouvernement, comme l’exige la loi.

Certaines de ces factures obtenues grâce à la Loi sur l’accès à l’information incluaient des dépenses importantes en alcool, dont plus de 170 $ en vin pour un dîner pour deux personnes (voir encadrés).

« La DGQL a été gravement touchée par une pénurie de main-d’œuvre durant la période visée par ces erreurs », nous dit-on. « En 2022, certaines tâches, notamment la saisie et la divulgation des dépenses, ont dû être prises en charge par une équipe temporaire. »

Parmi les mesures mises en place pour éviter que ces erreurs ne se reproduisent, le ministère cite : une vigilance accrue, des rappels de procédures, une sensibilisation des nouveaux salariés et des contrôles plus réguliers.

“Le ministère […] prend au sérieux son devoir de transparence et agit à tout moment avec rigueur et diligence », précise M.moi Jobin.

Deux exemples de factures non divulguées

– Le 15 octobre 2022, le délégué s’est fait rembourser une facture de 440 $, qui comprenait 4 bouteilles de vin totalisant 353 $ (selon le taux de change à cette date). Il s’agissait d’un dîner de clôture pour les employés de la délégation présents à l’assemblée générale du Cercle Arctique à Reykjavik, explique le ministère. La délégation était composée d’une vingtaine de personnes.

– Une dépense de 423 $ a également été effectuée le 14 décembre 2022, dont 172 $ en vin (une bouteille de Sancerre à 108 $ et deux verres de rosé à 32 $ chacun) pour un repas avec le président d’une entreprise britannique. Le ministère reste toutefois flou quant aux raisons de ce repas et à l’identité de cette personne.

L’objectif de la rencontre était de développer « des partenariats stratégiques pour plusieurs entreprises québécoises, notamment dans les secteurs du marché immobilier et de l’efficacité énergétique », nous dit-on.

A Rome, on aime les Romains

Certaines factures de restaurant de la déléguée Line Rivard comportent des quantités importantes d’alcool. Dans une facture de 675 $ pour 3 personnes datée du 14 avril 2023 au restaurant Selfridges à Londres, 320 $ (192 £) ont été dépensés pour 3 cocktails, deux bouteilles de vin et un autre verre (selon le taux de changement de la date du repas). ).


Le 10 novembre 2022, le délégué a facturé 185 $ (109 £) pour une bouteille de Chablis lors d’un repas pour deux au très exclusif club privé Annabel’s, qui se targue d’être l’un des plus élégants au monde. Le total de cette facture est de 513$.

Ces dépenses sont conformes aux directives du ministère qui autorisent les dépenses en alcool lors des réceptions ou les frais de représentation.

« La dépense doit être raisonnable et justifiable, être conforme aux coutumes du pays, prendre en considération le coût de la vie qui diffère d’un pays à l’autre et respecter les principes de gestion responsable des fonds. public», explique la porte-parole Camille Jobin.

Au ministère, on rappelle que l’un des mandats des délégués du Québec à l’étranger est de faire « des représentations et du démarchage pour les entreprises ». Ces délégués représentent l’image du Québec sur la scène internationale et les relations diplomatiques doivent respecter un certain décorum, poursuit le MRIF.

Ainsi, pour le repas du 14 avril, Mmoi Rivard avait invité un « acteur versé dans la dynamique des industries émergentes, principalement au Royaume-Uni, et un autre œuvrant en gestion en milieu académique au sein d’une des grandes universités britanniques ». Nous n’avons pas pu obtenir plus de détails.

À Montréal aussi, ils remboursent

La mairesse Valérie Plante, son directeur général Serge Lamontagne et d’autres responsables montréalais ont également remboursé les frais d’alcool après nos questions ou nos rapports.

Une erreur plaide le PDG

En novembre dernier, le directeur général de la Ville de Montréal, Serge Lamontagne, a remboursé une facture de 217,69 $ qui datait d’avril 2023, après des questions de notre Bureau d’enquête.

Il s’agissait d’un achat de deux bouteilles de Sauvignon blanc pour 126 £, au restaurant de cuisine indienne Dishoom dans le quartier de Covent Garden à Londres.

Le directeur général a plaidé une erreur de bonne foi.

« La dépense a été faite par M. Lamontagne à titre personnel et le montant a été facturé sur sa carte de crédit personnelle, car son objectif était d’assumer lui-même 100 % de cette facture. La facture faisait malheureusement partie des frais à rembourser par la Ville», a indiqué Gonzalo Nunez, porte-parole de la Ville de Montréal.

Le maire rembourse

La mairesse de Montréal, Valérie Plante, a remis 526,72 $ dans les coffres de la Ville, suite à nos questions sur un dîner arrosé à Vienne, facturé aux contribuables montréalais.

Douze invités montréalais, dont le maire et trois personnes de la communauté, ont participé à ce dîner au cours duquel huit bouteilles de vin ont été bues.

« L’événement a été considéré, à tort, comme une réunion d’accueil et de travail pour marquer le lancement de la mission », expliquait en novembre l’attachée de presse du maire, Catherine Cadotte.

Le montant des bouteilles avant le pourboire a été remboursé.

«Je m’excuse sincèrement», avait alors déclaré M.moi Plante le jour de la présentation de son dernier budget.

Des dirigeants proactifs

Au moment où notre Bureau d’enquête révélait les dépenses douteuses des dirigeants de l’Office de consultation publique de Montréal, des dirigeants d’un autre organisme rattaché à la Ville de Montréal remboursaient d’anciennes dépenses d’alcool.

Les dirigeants de la Société du parc Jean-Drapeau (SPJD) ont fait le ménage dans certaines de leurs factures pour 2023 et même 2022, dans le but d’être « exemplaires », a déclaré la directrice Véronique Doucet en entrevue.

Ainsi, des frais d’alcool, totalisant 535 $ pour trois dîners exécutifs, ont été remboursés.

Mmoi Doucet convient que nos reportages ont « accéléré » la réflexion sur les lignes directrices des dépenses et l’ont incitée à revoir les factures depuis son arrivée à la tête du SPJD.

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