Pékin – Le géant chinois de l’internet et des jeux vidéo Tencent a annoncé mercredi son bénéfice net pour 2023 au plus bas depuis quatre ans, malgré une relative reprise de l’économie en Chine l’an dernier après la levée des restrictions draconiennes contre le Covid.
Son bénéfice net a chuté de 39%, tombant à 115,2 milliards de yuans (14,7 milliards d’euros) contre 188,2 milliards de yuans en 2022.
Le groupe, qui possède notamment la populaire application WeChat, a toutefois réalisé un chiffre d’affaires annuel en hausse de 10% en 2023, à 609,1 milliards de yuans (78 milliards d’euros).
Alors que l’économie chinoise est désormais sous pression avec une consommation atone et un chômage élevé des jeunes, ce chiffre semble indiquer que les consommateurs chinois, malgré ce contexte économique morose, sont restés enclins à dépenser en jeux vidéo et en divertissement.
Malgré cette situation, « nous avons fait des avancées », a déclaré Tencent, arguant que le temps passé par ses utilisateurs sur ses services vidéo a par exemple doublé.
Ses revenus en Chine pour les jeux vidéo ont augmenté l’an dernier de 2% par rapport à 2022.
Le secteur reprend ainsi des couleurs après plusieurs années de turbulences, qui avaient pesé sur sa rentabilité.
Les entreprises technologiques, qui avaient bénéficié d’années de croissance fulgurante sur le marché chinois, l’un des plus dynamiques et connectés au monde, ont connu à partir de 2020 une soudaine prise de contrôle pour les réguler davantage.
Tencent n’a pas été épargné : pour réduire la dépendance aux jeux vidéo chez les jeunes, les autorités chinoises ont imposé en 2021 une limite hebdomadaire drastique de trois heures pour les jeux en ligne pour les moins de 18 ans.
Le poids de la politique
Numéro un mondial du secteur, Tencent a enregistré en 2022 la première baisse depuis 18 ans de son chiffre d’affaires trimestriel.
Les autorités chinoises se montrent désormais plus indulgentes à l’égard d’un secteur clé, à l’heure où les marchés restent préoccupés par la santé de l’économie du pays.
Néanmoins, “le poids de la politique et des restrictions reste important”, explique à l’AFP l’analyste Li Chengdong, du cabinet spécialisé Dolphin à Pékin.
Tencent, qui travaille sur de nouveaux jeux, son cœur de métier, n’a donc “aucune garantie de pouvoir les distribuer”, souligne M. Li.
En Chine, une licence est nécessaire pour commercialiser un jeu. Les autorités les ont gelés pendant neuf mois en 2021.
L’octroi de licences a depuis repris, mais les activités de Tencent en Chine « souffrent » de cette réglementation, selon M. Li.
A la recherche d’autres opportunités, Tencent lorgne désormais sur le marché très prometteur de l’intelligence artificielle (IA), à l’instar d’autres géants chinois de la tech (Baidu, Huawei, Alibaba…).
Attention à l’IA
En septembre dernier, Tencent a dévoilé Hunyuan, son robot conversationnel maison destiné à concurrencer l’américain ChatGPT, dont les services ne sont pas accessibles en Chine.
“La principale Source de revenus de Tencent reste les jeux (…) à court terme il y a peu d’espoir que l’intelligence artificielle” prenne le relais, juge M. Li.
D’autant que le groupe a une approche « plus prudente » que ses concurrents dans ce domaine, souligne Kevin Zhou, un autre expert chinois en tech, également basé à Pékin.
Tencent, qui est « plus lent à investir » dans l’IA, risque d’avoir « un à deux ans de retard » sur ses concurrents, prévient M. Zhou.
Le groupe, dont le siège est à Shenzhen (sud de la Chine), renforce ainsi sa position dans le jeu vidéo en prenant des participations dans des studios emblématiques, notamment en Europe.
C’est un acteur incontournable de la tech en Chine du fait de l’omniprésence de son application WeChat (messagerie, paiement en ligne, réseau social). Présent sur presque tous les téléphones du pays, il sert de moyen de paiement quotidien à des centaines de millions de Chinois, qui utilisent désormais très peu le cash pour leurs achats.
Tencent a également annoncé mercredi vouloir plus que doubler son programme de rachat d’actions. (AFP)
