Ça coupe, ça colle, ça écrit et ça discute. Un vendredi de novembre, un atelier de création de fanzines se déroule à la bibliothèque Langelier de Montréal.
Ce soir-là, six participants ont été accueillis par Natacha Audet-Morissette. L’étudiante en études littéraires a concocté cette série de quatre ateliers pour partager son amour des zines.
Qu’est-ce qu’un zine ou un fanzine ? Il s’agit d’un petit objet imprimé, le plus souvent sous forme de livre, dont l’artisan prend en charge toutes les étapes de création — de la confection à la diffusion.
À la croisée de la littérature, des arts visuels et du graphisme, le zine peut être poésie, fiction, carnets, activiste, etc. La pratique, individuelle ou collective, est multidisciplinaire ; ses contours sont flous. Il y en a pour tous les goûts.
Ce que chaque zine a en commun, c’est qu’il sera imprimé. “Vous l’avez imprimé à la main, c’est imprimé, vous l’avez imprimé sur une machine à écrire, c’est imprimé, vous l’avez imprimé sur une imprimante, sur un photocopieur, en sérigraphie, en risographie, il n’y a aucune limite, mais c’est imprimé”, explique Pandora. Von Derkasten, artiste et zinester, fin connaisseur du médium et de la pratique.
Pour inspirer les participants, dont la plupart n’avaient jamais vu de zine, Natacha a disposé une série d’exemples sur une table. « Ce que j’aime beaucoup dans le zine, c’est de m’éloigner un peu de cette culture du marché du livre, de les faire quand on veut : en faire un, deux, faire quelque chose de différent. « original », dit-elle.
Natacha aime utiliser ses mains, écrire, couper, coller, depuis son enfance. « Mes parents m’ont offert du scotch à Noël, confie-t-elle. Passionnée, elle accumule les petits papiers et les petits objets. C’est dans cette optique qu’elle propose des pochettes bleues, dans lesquelles les participants pourront ranger les objets et papiers qui les inspirent entre deux séances.
« Il ne s’agit pas seulement du fond d’un tiroir, mais de donner vie à des choses auxquelles vous accordez de l’importance, qui peuvent vous obséder ou qui traînent dans un fond de votre esprit », explique la bibliothécaire adjointe.
L’animateur invite les participants à plonger dans leurs souvenirs, ce qui séduit les zinesters en herbe. Maria, 10 ans, s’est inscrite à l’atelier pour « créer des histoires et avoir un peu d’imagination ». Le thème des souvenirs inspire tout autant son amie d’enfance, Asma. « J’aime parler de ma petite vie, confie-t-elle.
«J’aime écrire sur tout», déclare Rayhana, qui refuse de se limiter à une seule idée. Le chat collé sur la couverture de son zine lui rappelle Cookie, un matou gris et blanc dont la famille a dû se débarrasser d’eux lors de leur emménagement dans leur nouvel appartement.
L’inspiration n’est pas aussi évidente pour tous les participants. « Y a-t-il un souvenir qui me vient à l’esprit ? » », demande Natacha à une petite fille en manque d’idées. « Au pire, inventez-vous une vie. Faites comme si vous étiez au cinéma », suggère son amie.
Le zine se veut une pratique populaire, explique Pandora Von Derkasten. « Il est très important de garder à l’esprit que le zine est doté d’une accessibilité. C’est un enjeu dans un monde où les prix de tous les matériaux augmentent. C’est pourquoi il est intéressant de récupérer des matériaux et du papier. »
A Langelier, Natacha a sorti le grand jeu : neufs ou recyclés, papiers de toutes sortes, colle, crayons pastel, billes, un jeu de reliures, aiguilles, chemises, règles et autres matériels d’art recouvrent l’une des tables. Mais surtout une montagne de livres, de BD anciennes, de dictionnaires. Les images sont au cœur de la recherche d’idées et du processus créatif.
« Les fleurs sont toujours amusantes. Un cimetière, pourquoi pas ? Fossiles… Nous ne savons vraiment pas ce que les gens peuvent faire. Mon préféré est celui-ci, sur les pierres précieuses, précise Natacha. Au lieu de les envoyer au recyclage, nous les utilisons pour découper le livre. »
Point fort du spectacle : une machine à écrire bleue trône au milieu de la pièce. Un artefact fascinant pour ceux qui voient cet objet dans la vraie vie pour la première fois. « Il y a beaucoup de fautes d’orthographe. Mais ça ne me dérange pas, j’aime les erreurs. Les erreurs sont belles », philosophe Ève-Catherine. La jeune fille de 6 anse année profite de la machine à écrire pour taper une anecdote de somnambulisme et faire la fête un pyjama qui la fait encore rire aujourd’hui.
La jeune fille ambitieuse vise un livre de treize pages. «J’ai beaucoup de choses à dire», s’exclame Ève-Catherine, qui pense déjà à son prochain zine.
Selon Pandora, avoir quelque chose à dire est ce qui rend un zine intéressant. « La plupart des gens ont quelque chose à dire. C’est ce qui est beau. C’est pourquoi la plupart des gens pourraient facilement créer un zine. »
L’atelier se veut un lieu d’échange, où chacun peut créer, s’exprimer librement, et apprendre de nouvelles techniques.
Ariane, seule adulte inscrite, n’en est pas à sa première création de zine. L’atelier lui donne la liberté de retourner en enfance, tout en découvrant de nouvelles techniques de reliure. «Je trouve vraiment relaxant d’avoir un espace pour faire du bricolage», explique-t-elle. Je ne sais jamais ce que je fais, c’est sans aucune envie de performer. »
Pour mieux découvrir le zine
S’inscrire à un atelier
Bibliothèques, centres communautaires, centres culturels, plusieurs ateliers sont offerts partout dans la province. Soyez à l’affût ! En voici quelques exemples : la ruche de zines à la bibliothèque Frontenac, les ateliers FAB-ZINES donnés à la FabricARThèque du Vieux-Saint-Laurent à Montréal, un atelier zine donné en janvier à la bibliothèque du Haut-Anjou et une séance complète du samedi cours dédiés aux zines à l’UQAM.
Parcourez les librairies indépendantes
De plus en plus de librairies vendent des zines, comme L’Euguélionne, N’tait-ce pas l’été ou Planète BD, à Montréal. L’Expozine ou l’Espace zine du Salon du livre de Montréal sont également des rendez-vous annuels incontournables pour acheter des zines et rencontrer des artistes.
Découvrez les collections de la bibliothèque
BAnQ possède sa collection de zines depuis 2022. Vous pouvez consulter plus de 200 titres et même en emprunter pour les lire à la maison. La bibliothèque Langelier est en train de constituer sa propre collection qui devrait être accessible cette année.
Rechercher sur les réseaux sociaux
Puisque les zines suivent une logique d’autodistribution, de nombreux zinesters utilisent les réseaux sociaux comme outil promotionnel. L’émission hebdomadaire Zine tonique sur CIBL 101.5 est un point de départ intéressant pour découvrir de nouveaux artistes.
Consultez la page de la ruche Zine
Consultez la page des ateliers FAB-ZINES
Consultez la page atelier zine à la bibliothèque du Haut-Anjou
Consultez le site Internet des cours offerts à l’UQAM