Mona Caron donne vie aux quartiers du monde entier.
Mona Caron a déménagé à San Francisco pour étudier et voulait devenir écrivain. Au lieu de cela, elle a commencé à peindre sur les murs. Ses plantes sauvages qui parcourent les façades en béton lui valent une notoriété mondiale.
Gerhard Lob / ch médias
Vert et jaune sur gris : Mona Caron a décoré ce bâtiment de Göteborg, en Suède, avec un pissenlit.Image: Mona Caron
Personne n’est prophète dans son pays. Ce proverbe s’applique aussi un peu à Mona Caron, originaire du Tessin, qui vit à San Francisco, en Californie, depuis le milieu des années 1990. Elle est sans doute plus connue à l’international qu’en Suisse.
En tant qu’artiste de street art, elle s’est fait un nom non seulement aux États-Unis, mais aussi au Brésil, à Taiwan, au Mexique, en Équateur et en Inde. Ses œuvres se trouvent à New York, São Paulo et Mumbai. Sur des façades gigantesques, les plantes lumineuses de Caron prennent racine au milieu d’une mer d’immeubles et apporter de la couleur à une réalité souvent grise.
Ce sont des œuvres de sa série « Weeds », littéralement « mauvaises herbes ». Les petites plantes qui poussent à travers le béton sans se faire remarquer sont ici propulsées dans une dimension plus grande que nature. Les peintures murales ont non seulement un intérêt esthétique pour embellir les murs en béton, mais aussi une fonction symbolique :
« Ces petites plantes sont des symboles de résilience et de résistance. Même si on les arrache, ils repoussent. »
Mona Caron
Ici, une plante grimpe sur la façade d’un immeuble du New Jersey.Image: Mona Caron
Grues, échafaudages et brosses
Ces dernières semaines, l’artiste a séjourné au Tessin et a travaillé sur un projet de commande à Gravesano, près de Lugano – un projet plus petit comparé aux gratte-ciel des grandes villes auxquels elle est habituée. Alors que pour les grands projets, elle doit travailler avec des grues et des harnais à une hauteur vertigineuse, pour les petits projets, des échafaudages suffisent.
Il existe différents types de projets : dans les grandes villes, Caron souhaite créer un contraste entre l’urbanité concrète et les plantes peintes. Dans une ambiance plus chaleureuse, elle pense davantage aux « herbes sauvages » qu’aux « mauvaises herbes » lorsqu’elle choisit les objets.
“J’aime toujours faire de petits projets, car j’aime me salir les mains avec mes pinceaux”
Mona Caron
En effet, pour les grands projets, des équipes entières sont impliquées dans les travaux. Ils réalisent un projet selon un plan défini au mètre carré près.
Selfie de Mona Caron devant une plante d’asclépiade créée par l’artiste dans la ville de Denver.Image: Mona Caron
Des images qui racontent des histoires
Aujourd’hui âgé de 54 ans, l’artiste a grandi au Tessin au sein d’une famille suisse-allemande artistiquement active. Son père Peter Bissegger était scénographe, sa mère Bethli une créatrice de mode. Sa sœur Meret est connue comme cuisinière fantaisiste et auteur de livres, son frère Mario comme ébéniste et inventeur de meubles modulaires. L’enfance dans la maison d’Intragna dans les Centovalli – au milieu d’une nature luxuriante – les a tous marqués.
« Nous avons tous une passion pour les plantes »
Mona Caron.
Après le lycée à Locarno, Caron part à Zurich pour étudier l’anglais. Mais la vie purement académique ne lui convient pas et elle s’inscrit auAcadémie des Beaux-Arts de l’Université de San Francisco. La célèbre ville californienne et sa scène multiculturelle dynamique deviendra sa nouvelle maison.
« Au départ, je voulais écrire, mais j’ai réalisé que je pouvais aussi raconter des histoires avec des images »
Mona Caron.
Manon a d’abord développé son talent en tant qu’illustratrice de livres, et c’est un peu par hasard qu’elle reçoit sa première commande d’une fresque murale à San Francisco. Il s’agissait d’une grande fresque vue d’un avion de Market Street.
“Je compare différents moments de l’histoire : le passé, le présent et un futur imaginaire”
Sur l’image, on voit comment l’espace public se transforme. Caron s’est entretenue avec les résidents locaux, qu’elle a ensuite représentés dans la murale. Ce style caractérise la première phase du travail de Caron. La « Market Street Railway Mural » a été réalisée en 2004. « Entre-temps, elle a même été restaurée », dit-elle en souriant.
Le Tessin comme pause
Ce qui a suivi, c’est son intérêt pour les « mauvaises herbes » :
«J’ai commencé à peindre ces plantes, comment elles poussaient centimètre par centimètre, et j’en ai réalisé des vidéos animées. Ceci dans un contexte visuel où ils sont soudainement devenus plus grands que la ville elle-même.
Mona Caron.
Mona Caron a commencé ces peintures murales de mauvaises herbes sur les toits de San Francisco.
L’un de ses courts métrages publié sur Youtube a fait le tour du monde. Et de manière générale, les réseaux sociaux ont largement contribué à sa notoriété. Aujourd’hui, elle compte plus de 100 000 abonnés sur Facebook et près de 68 000 sur Instagram. Sa devise : « Réensauvager l’urbanité avec des métaphores botaniques ».
Mais des mouvements sociaux ou des associations l’ont également invitée à soutenir leurs actions. L’ouverture des travaux se transformait parfois en grand événement. On lui a attribué le label « artiviste », contraction de « artiste » et « activiste ». Mais entre-temps, elle estime que ce terme a un peu perdu de son sens.
Les Centovalli sont pour Caron une sorte de parenthèse avec la vie qu’elle mène dans les grandes villes du monde où elle travaille souvent, perchée entre pollution et bruit ambiant. A Intragna, elle a ses propres racines, qu’elle ressent encore plus depuis la mort de ses parents. C’est peut-être une des raisons pour lesquelles on la voit désormais plus souvent dans son canton d’origine.
Certaines plantes de Caron se trouvent également en Suisse, comme cette gentiane jaune du Locle.Image: Mona Caron
Elle a également pu créer quelques œuvres au Tessin – à Chiasso, Mendrisio ou Bellinzona. En Suisse romande, c’est au Locle qu’elle a décoré en 2021 un immeuble de 30 mètres de haut d’une gigantesque gentiane jaune.
Traduit de l’allemand par Anne Castella
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