« Hollywood », la comédie américaine de Florence Foresti

« Hollywood », la comédie américaine de Florence Foresti
« Hollywood », la comédie américaine de Florence Foresti

Dans les coulisses des comédies françaises (1/5) – Cet hiver, BFMTV dévoile les secrets des films de comédie extraordinaires, cultes ou insolites. Aujourd’hui, Hollywoo.

On sous-estime parfois le potentiel érotique des comédies françaises. En avril 2024, dans les colonnes du , une jeune femme, Sofia, confiait qu’elle se masturbait en pensant à Hollywoo. Un destin étonnant pour cette comédie populaire, grand succès de 2011, où Florence Foresti et Jamel Debbouze vivent des aventures passionnantes à Hollywood.

Quand on raconte cette anecdote à Frédéric Berthe, le directeur de Hollywooil éclate de rire. “Mon Dieu! Je serais curieux de savoir sur quelle scène de Hollywoo cette jeune femme pourrait se caresser sous la couette. Et d’ajouter : « C’est sûr, c’est surprenant. C’est la première fois (que cela m’arrive). Pourquoi pas?”

Le projet n’a pourtant rien d’érotique. Tout est parti de la volonté de Florence Foresti (qui n’a pas souhaité s’exprimer dans cet article) de rendre hommage aux acteurs du doublage. « C’était sympa parce qu’il y avait encore une vraie substance dans le film. Ce n’était pas qu’une série de croquis », salue Frédéric Berthe.

L’histoire est aussi simple qu’efficace : lorsque la star américaine Jennifer Marshall décide de prendre sa retraite, sa doubleuse française, Jeanne (Florence Foresti), se rend à Hollywood pour changer d’avis. Là, elle rencontre Farrès (Jamel Debbouze), qui va l’aider à traquer la star américaine.

Avec Jennifer Aniston ?

Florence Foresti rêve d’une comédie populaire à grand spectacle. Elle demande à Manu Payet de lui donner la réponse. Et pour incarner Jennifer Marshall, la production veut Jennifer Aniston. « C’était l’idée », confirme Frédéric Berthe. « Nous avons essayé de le contacter. C’était un peu un rejet. Mais bon, ce n’est pas très grave.

L’humoriste développe le projet avec Cyril Colbeau-Justin, producteur de grands succès des années 2000 comme 36 quai des orfèvres. «C’était un producteur comme on en a moins maintenant», salue Frédéric Berthe. « C’était un gars un peu fantaisiste, un peu fou, mais flamboyant. Il avait l’énergie nécessaire pour monter des films comme celui-là.

Pascal Serieis, complice de Florence Foresti sur tous ses spectacles écrits, une première version jugée très réussie par la production. Mais deux mois avant le tournage, en pleine préparation, Manu Payet a quitté le projet pour Les Aventures de Philibert, Capitaine Vierge. Jamel Debbouze le remplace dans de brefs délais. Une aubaine, sauf…

« Pas envie de jouer » ce rôle, écrit pour Manu Payet, nécessite une réécriture. “Comme c’était prévu pour quelqu’un d’autre, qu’il était au courant et que nous sommes venus le voir après, il a demandé qu’on l’adapte à sa personnalité.”

Problèmes de visa

Dans la première version du scénario, son personnage de margoulin était un « acteur raté » devenu « un figurant spécialisé dans les morts », se souvient Frédéric Berthe. “On l’a retrouvé pendu dans un western, écrasé sous un tank, décapité pendant la Révolution… Chaque fois qu’elle l’appelait, il était dans une position incroyable.”

Une dimension comique qui disparaît du film final. “Je ne suis pas sûr que ce soit la meilleure chose” à changer de rôle, ajoute-t-il. « Le film est toujours aussi génial, mais je pense que nous avons malheureusement un peu perdu à ce moment-là. Après, il faudrait demander à Jamel s’il a des souvenirs du premier scénario et s’il n’a aucun regret ». «Peut-être qu’il regrette», sourit-il.

Alors que l’équipe prépare le tournage à Los Angeles à l’été 2010, Pascal Serieis n’a eu que quelques semaines pour revoir le scénario. La préparation du film se déroule aux Etats-Unis avec la même urgence. «Je me souviens des tracas des visas», s’amuse Frédéric Berthe.

« Nous avons repéré les lieux en trois semaines et sommes rentrés en . Ensuite, nous avons couru après les visas qui n’étaient toujours pas arrivés et nous sommes arrivés à Los Angeles dix jours avant le tournage.

Nuit de négociations

Pascal Seiries, qui n’a jamais réalisé de film et ne parle pas anglais, doit partager la réalisation avec Frédéric Berthe. Il vient de tourner la comédie aux Etats-Unis RTT produit par Cyril Colbeau-Justin. C’est le candidat idéal. “Ça a été une longue nuit de négociations parce que moi, co-réalisateur, sur le papier, c’était impossible, à moins d’être Nakache et Toledano, ayant toujours fait ça, c’est-à-dire ayant toujours eu une sorte de double cerveau”, se souvient Frédéric. Berthe.

Contre toute attente, la collaboration fonctionne. « Nous avons très bien réparti les tâches. Il s’est beaucoup occupé de Flo, Jamel et des autres acteurs. J’ai fait quelque chose qui était probablement plus technique. C’était paisible. Nous sommes partis en disant : « Nous verrons si nous pouvons le faire. Mais au final, nous ne nous en sommes pas trop mal sortis », s’enthousiasme Frédéric Berthe.

Sur le tournage, les réalisateurs ont ressenti de petites lacunes dans le scénario. Des improvisations sont nécessaires pour fluidifier les interactions entre les personnages incarnés par Florence Foresti et Jamel Debbouze. Notamment lors de la scène où Farrès se moque du louchement de Jeanne.

« On s’est dit qu’il fallait une scène entre les deux qui soit tendre parce qu’on n’en avait pas », confirme Frédéric Berthe. “C’est peut-être ce qui manque au film : des scènes entre elles.” Le réalisateur le regrette d’autant plus que l’alchimie entre Jamel Debbouze et Florence Foresti transparaît à l’écran.

Sur le plateau, les improvisations de Jamel Debbouze sont telles qu’il faut parfois calmer son enthousiasme, se souvient le chef opérateur Ludovic Colbeau-Justin. « Aux Etats-Unis, chaque fois qu’un figurant parle, il devient acteur (et il faut le payer en conséquence). Et comme Jamel parlait à tous les figurants, et que ce n’était pas prévu, à chaque prise, la facture du film était de 5 000 $ !

Une vraie pression

Si Florence Foresti n’en est pas à son coup d’essai au cinéma lorsqu’elle tourne Hollywooelle est cependant sous pression après les échecs de ses deux premiers films au cinéma Mes amis, mes amours (2008) et le roi Guillaume (2009). “Elle n’était pas brisée comme un animal au cinéma, contrairement à Jamel, qui avait déjà fait beaucoup de films”, souligne Frédéric Berthe.

Le budget gigantesque du film – environ 15 millions d’euros – n’aide pas. « StudioCanal avait quand même mis pas mal d’argent. Evidemment il y a une pression parce qu’il faut ramener un film, il faut qu’il fasse rire”, explique Frédéric Berthe. “Elle était très concentrée, très tendue (…) Elle l’a vécu un peu dans la souffrance.”

“J’ai le souvenir d’une Florence qui portait le projet, qui avait très envie que le projet marche et qui n’avait peut-être pas le sentiment d’être allée au bout de ses (précédents) projets”, modère le chef opérateur Ludovic Colbeau-Justin. “Elle ne voulait rien abandonner pour être fière du film.”

Sur le plateau, Florence Foresti peut compter sur Jamel Debbouze. “Il était extrêmement gentil avec elle quand elle avait beaucoup de doutes”, se souvient le réalisateur, qui se souvient aussi d’un “super tournage”. “L’idée était de mettre en valeur son énorme talent car elle a un énorme talent.”

“Nous étions mécontents pour elle”

Sur le plateau, la pression était telle que Florence Foresti est restée un jour enfermée dans sa loge. Une partie de la journée, l’équipe attend qu’elle sorte de sa loge pour tourner une scène cruciale de la fin du film, sur le parking du Dodger Stadium. Heureusement, avec Jamel Debbouze, ils ont renversé la situation très rapidement, raconte Frédéric Berthe.

« Ce jour-là, Flo ne se sentait pas bien. Elle était dans sa loge, elle ne pouvait pas sortir, elle était anxieuse. Bref, elle n’était pas en forme. Nous avons attendu. Puis elle est finalement sortie. Elle s’excuse. Elle est désolée. Nous avons fait la séquence en 2 heures car nous n’avions plus le temps.

Lors de la soirée de fin de tournage, Frédéric Berthe tente de la réconforter. “C’est dommage car j’ai l’impression que tu n’en as pas assez profité”, lui dit-il. “J’espère que vous n’avez pas trop manqué.” « Non, pas trop, mais un peu quand même », répond-elle.

A l’écran en revanche, ce stress ne se ressent pas. Florence Foresti affiche la même énergie tourbillonnante que sur scène. « Elle a un talent absolument étonnant. Et puis c’est une soldate. Donc ça n’a jamais ressenti ça. Sur le plateau, nous étions mécontents pour elle. Elle était gentille avec tout le monde. Mais nous avons estimé que ce n’était pas le cas. ça ne se passait pas bien. »

Plagiat

La bonne entente se poursuit lors du montage. Frédéric Berthe débute le montage avant de céder sa place à Pascal Sieires et Florence Foresti. “Ils ont terminé le film comme ils le voulaient.” Les différences sont « de l’ordre de la dentelle », précise-t-il. « Ils y ont passé beaucoup de temps. Après, ils ont probablement raison.

«C’était encore un peu leur film. Je n’ai aucun ego par rapport à ça”, assure le réalisateur. «Je l’ai réalisé, j’ai adoré le faire. On a bien rigolé, c’était super, mais c’était quand même comme leur bébé. Ils l’avaient écrit, ils y avaient pensé.

Hollywoo sorti en salles le 7 décembre 2011. Plusieurs journalistes se voient interdire l’accès aux séances de presse. L’autre partie de la presse fait l’éloge du film. « Ce n’est pas la comédie de l’année, mais on rigole beaucoup », juge Le Parisien. « Foresti a un vrai caractère comique pour faire décoller cette sympathique comédie », estime Le Figaro.

Le public est de cet avis : avec 2,3 millions d’entrées, c’est un triomphe. Mais le triomphe est de courte durée. Le 5 janvier 2012, Florence Foresti, Pascal Sieires et leur co-scénariste Xavier Maingon sont accusés de plagiat par le scénariste Dodine Herry-Grimaldi. Elle affirme avoir écrit, en 2005, un scénario similaire à celui de Hollywoo.

“J’ai un peu de moralité”

La production nie avoir lu son scénario. Tout comme Florence Foresti. “Je ne conteste pas le fait qu’elle ait pu développer une histoire similaire puisque c’est très souvent le cas dans le domaine de la création et de l’écriture”, avait-elle déclaré à l’époque dans un communiqué.

« Comme toutes les idées fortes, l’idée initiale de ce film a évidemment été partagée par d’autres. Depuis la sortie du film, mes co-auteurs et moi avons déjà reçu près d’une dizaine de mails d'”auteurs, professionnels ou non, en témoignant”, a ajouté l’humoriste en précisant :

« Si j’avais plagié le scénario du plaignant, je me serais épargné trois ans de travail et peut-être même quelques erreurs » Je ne suis ni assez stupide ni assez incompétent pour devoir piller impunément des œuvres existantes. J’ai aussi un peu de moral.

L’humoriste se dit également blessée par cette accusation. « Mon travail dans des one-woman shows et à la télévision a, je crois, déjà attesté de mes capacités d’auteur créatif. Je suis très offensé par l’interprétation de cette information, qui constitue un dépôt de plainte et non une condamnation.»

Florence Foresti obtient gain de cause : la société LGM, qui produit Hollywoon’est pas condamné. Des différences majeures entre les deux scripts ont été notées. Et Hollywoo connaît de bons jours à la télévision : lors de sa première diffusion en 2013, le film a attiré plus de 5,8 millions de téléspectateurs.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV Que signifie le mot « ultime » ? « Dernier » ou « suprême » ?
NEXT D’où vient Bye Bye ? – CHRONOMISTES – estrieplus.com | Journal Web