La huitième édition de la manifestation Art Montpellier se déroule du 14 au 17 novembre au Parc des expositions. Son accession au pouvoir illustre l’ouverture de cet univers discret. Malgré un contexte actuel compliqué.
Marché discret du Languedoc Roussillon, l’art contemporain se résume souvent, dans l’esprit du grand public, par les œuvres de Soulages, Di Rosa et Combas. Il existe cependant une multitude d’artistes, implantés sur le territoire régional, qui opèrent dans un relatif anonymat.
Pour créer un marché, il faut des artistes, mais aussi des acheteurs. L’organisation du salon Art Montpellier, dont la huitième édition se tiendra à partir du mercredi 13 novembre à l’Arena Sud de France, démontre une certaine réalité en la matière.
« Nous traversons deux années difficiles »
« Aujourd’hui nous vivons des temps difficiles, nous traversons deux années difficiles pour notre marché »explique Roger Castang, galeriste depuis une trentaine d’années à Perpignan. « Le marché de l’art dans la région est dynamique, car il intéresse les gens, mais il reste néanmoins un marché à part » revendique Patrick Michel, qui a fondé en 2016 l’atypique Musée d’art brut de Montpellier, un projet 100% privé.
Selon Roger Castang, « les œuvres achetées aujourd’hui se positionnent dans une fourchette de prix comprise entre 1 500 euros et 3 000 euros ». Celui qui appelle « le créneau acceptable ». En fait, cela se justifie « nous sommes dans une période où les collectionneurs ne sont pas prêts à faire un effort financier ».
“Moins d’achats spontanés et compulsifs”
Et si dans la région, “Il y a des investisseurs”, ceux-ci ne sont « pas présents pour le moment ». « La particularité de l’art est qu’il est soumis à ces cycles, périodes prospères et périodes moins prospères »» ajoute Didier Vesse, galeriste et organisateur d’Art Montpellier.
«C’est un marché très fluctuantconfirme Hervé Solignat, galeriste d’Uzès, Nîmes et Biarritz. Il y a moins d’achats spontanés et compulsifs. Les gens réfléchissent davantage à leurs investissements, ils sont plus spéculatifs. “C’est comme si l’immobilier haut de gamme, l’art haut de gamme, se vendaient mieux”ajoute Patrick Michel.
Un réseau de tunnels insuffisant ?
Pourtant, comme le constate Clément Nouet, directeur du Musée régional d’art contemporain (Mrac) de Sérignan, dans l’Hérault, « nous sommes dans une région extrêmement dynamique en matière d’art contemporain ». Il ajoute : « nous sommes la deuxième région française pour le nombre de centres d’art ».
Quand les entreprises viennent en aide à l’art
De plus en plus d’entrepreneurs, passionnés ou opportunistes, investissent dans des œuvres d’art contemporain. «C’est une manière d’exonérer d’impôts leurs investissements»explique Didier Vesse, organisateur des rencontres Art Montpellier. « Nous voyons une nouvelle génération de chefs d’entreprise investir de grosses sommes d’argent ». Dans la région, l’un des plus connus est Gilbert Ganivenq, promoteur immobilier sétois (Promeo), reconverti en galeries, comme Le Réservoir à Sète ou La Serre à Montpellier. Très souvent, l’investissement est réalisé sous forme de crédit-bail. « Cela permet à l’entreprise d’amortir son investissement sur plusieurs années »ajoute Didier Vesse, qui prend la relève « ce phénomène économique apparu il y a quelques années est devenu la réalité économique d’aujourd’hui ». « Les chefs d’entreprise représentent 40 % de mon chiffre d’affaires »témoignage Hervé Solignat, galeriste à Nîmes, Uzès et Biarritz. Et, ajoute-t-il, “Ça continue de croître.” Avec une constante : « ces dirigeants veulent bien souvent rester discrets sur leurs investissements dans l’art ».
Mais l’économie de cet art est-elle aussi dynamique que ses artistes ? « Le seul bémol, si je puis dire, c’est le manque de galeriesajoute-t-il. Nous sommes dans un système très centralisé, où les galeries sont majoritairement centralisées à Paris. Ce n’est donc pas un phénomène exclusif à notre région. »
« Rejet d’une concurrence effrénée »
Dans sa dernière « Guide de la Galerie »dont la septième édition est présentée cette semaine lors d’Art Montpellier, la revue spécialisée Artension recense plus d’une quarantaine de galeries du Languedoc Roussillon. « Le nombre de galeristes a considérablement augmenté, passant d’un peu plus de 550 en 1980 à plus de 1 000 en 2020. » explique Nathalie Moreau, professeur à l’université Paul Valéry, à Montpellier. D’où le risque d’une concurrence impitoyable.
Selon Cécile Chiorino, galeriste d’Aigues-Mortes, “Nous sommes peu nombreux dans la région, le soleil se lève pour tout le monde, la compétition est plus nationale”. Expliquez comment cela fonctionne. “C’est une question de confiance entre l’artiste et le galeriste, j’ai l’exclusivité sur deux ou trois départements autour de moi, ce qui me protège de la concurrence directe”.