13h02, épais brouillard sur Itzig. Le bruit d’un tracteur brise le bourdonnement du calme. Au loin, une paire de phares peine à percer la brume gluante de novembre qui enveloppe l’église Saint-Hubert, puis la silhouette sombre du monstre de métal surgit, et descend la rue de Contern. En début d’après-midi, l’obscurité ne fait plus qu’un avec le jour. Mystique, mais pas dérangeant. L’éclairage du vieux tacot dévoile une à une les maisons de ce village de 2 000 âmes sans véritable charme. C’est soigné, c’est ordonné, bienvenue au Luxembourg, à quelques kilomètres au sud-est de la capitale.
Au coin, une grande bâtisse rouge capucine contraste avec ce décor mi-banlieue, mi-campagne profonde. Les lumières sont allumées, il semble y avoir de la vie. La porte d’entrée laisse échapper une lumière chaleureuse qui éclaire et dévoile une petite fresque : le portrait d’un jeune homme imberbe, aux traits fins et aux serrures indisciplinées. Un visage de bébé entouré d’un disque doré, une roue de vélo, tel un saint auréolé. Et en dessous, simplement « Andy ». Le décor est planté.
Même endroit, même heure, le lendemain. “Le brouillard était terrible hier, c’est comme ça chez nous à cette époque de l’année”glisse le propriétaire des lieux. M. Andy Schleck. Ce jour-là, le smog local s’était levé sur Itzig, mais il était gris. Du gris pour se lamenter, mais aussi pour raconter des histoires. Ça tombe bien, c’est ce que compte faire l’ancien champion cycliste luxembourgeois, qui nous accueille avec bonheur dans son magasin de cycles, exactement dix ans après avoir annoncé sa retraite et avoir reçu son Tour de France des mains de François Hollande. France 2010, à seulement 29 ans.
A l’occasion de cet anniversaire, Ouest-France vous propose de rencontrer ce grimpeur d’exception qui a conquis les cœurs et enflammé les routes de la Grande Boucle au tournant des années 2010. Premier volet d’une série de trois épisodes avec l’un des derniers romantiques de la pédale.
Dix minutes, dix ans, toute une vie. Andy Schleck est là, la main tendue et les joues encore roses de l’air frais de début novembre. Il vient d’arriver. “Désolé pour mon léger retard”il s’excuse. Un sourire, une poignée de main franche et une plongée pour un petit après-midi dans sa vie. « Pas une bonne journée, je suis d’humeur à parler »glisse l’ancien cycliste luxembourgeois avec un accent de baryton hésitant, traînant et légèrement saccadé. Il est assis à une petite table qui lèche le comptoir du bar de chez lui : le magasin Andy Schleck Cycles, ouvert en 2016, un peu plus d’un an après l’annonce de sa retraite sportive, précipitée par une rupture des ligaments croisés. du genou.
Construit dans une ancienne grange, ce concept store de près de 1 000 m² – perdu dans le petit village d’Itzig, à un quart d’heure au sud-est de la capitale – est le symbole de son “nouvelle naissance”comme il aime l’appeler. Autour de lui on ne sait plus où donner de la tête : des vélos en rangées, beaucoup de vélos, mais surtout un musée à sa gloire qui s’étend sur trois niveaux, et tout cela dans un style qui mêle modernité et art déco, avec mosaïques et mer. papier peint floral vert.
Des maillots jaunes, verts, blancs, un casque Armstrong, des photos de son père Johnny Schleck,…