Vous nous parlez des agents de sécurité…
Qui t’attend sur le site du Figaro et qui surveillent en vrai un bout de ville entre le 19e arrondissement de Paris et Aubervilliers, un espace vert aménagé pour les promenades et les pique-niques des salariés à la pause déjeuner…
… Mais cette forêt linéaire du nord, joli nom, est fermée au public, abandonnée au trafic de drogue et à la prostitution… Et parfois de cette forêt surgissent ceux qu’un policier local traite de zombies, je cite « des drogués dans le besoin qui brisent les vitres des voitures pour récupérer se changer, uriner et déféquer dans les parkings », qui mendient et attaquent, peuvent être des fous qui sortent le couteau, et sont la preuve, poursuit le policier, d’un pays qui est tiers-Monde…
… Mais ce tiers-monde, où l’on retrouve aussi des migrants, relis-je, est sur le chemin des salariés d’un immeuble ultramoderne, Millénaire 4, occupé par BNP Paribas… Des employés de banque parfois harcelés et agressés, à qui nous déconseillons marcher seul, et suivre une carte fournie par la banque, itinéraire conseillé en vert, itinéraire déconseillé en rouge… Et il y a aussi les agents de sécurité vêtus de noir, qui scrutent la forêt linéaire, qui sillonnent le secteur, et qui, sur Sur demande, escortez les salariés de BNP Paribas du bureau jusqu’à la station RER « Rosa Parks » (du nom d’un combattant noir contre la ségrégation) et les salariés se sentent, escortés, aussi importants que Beyoncé…
Et ce qui n’est pas inintéressant non plus, au-delà de la tristesse de cette histoire urbaine, c’est de lire que des salariés, certes rassurés par les agents de sécurité, disent aussi que cette protection ne résout pas le problème, que les toxicomanes qui sont en détresse et devraient être pris en charge; intervient un policier, « il faut les soigner, c’est une question de santé publique », dit-il, c’est plus agréable à lire que le mot zombie, l’insécurité n’empêche pas de réfléchir.
Sur le site du Monde, on lit d’autres histoires de drogue – le journal publie un numéro spécial sur le trafic, c’est glaçant, fascinant et étrange à la fois…
Et donc j’ai lu l’histoire d’un réseau Roubaix qui a inondé la France de cocaïne du Surinam transportée dans des corps de mulets, c’est l’expression, guyanaise, et ce réseau était soutenu par un groupe de rap, qui se berçait dans ses chansons, les protagonistes du trafic apparaissaient dans les clips et les paroles étaient explicite, « J’ai mes gars qui vendent ma dope », « La solution est dans l’avion, mes « mules » vous l’apportent… », ça a simplifié l’enquête… Mais à quoi pensent les bandits ?
j’ai aussi lu un autre réseau, celui de Marseilledont les bénéfices ont été investis dans la pierre, dans des tours de luxe à Dubaï… Cela a au moins une apparence de logique…
Dans le bien public J’ai une tendresse pour une femme qui a dû être très dure et qui n’a pas eu une vie facile, me dit gentiment le journal, depuis qu’elle a été enfermée dans la section des femmes de la prison. Dijon que le journal explore…
Ce qu’elle a fait, elle ne dit rien, ce qu’elle est, une dame aux cheveux blancs tressés qui attache des cœurs de laine dans sa cellule pour le surveillant et le patron, qui sont devenus « ma famille, mes stars », dit-elle, elle se sent libre enfermée debout, plus en sécurité qu’à l’extérieur, elle tricote avec des pics en bois car les aiguilles sont interdites, elle n’a plus personne dehors, mais quand elle sortira plus tard elle donnera des cours de broderie…
On parle aussi de solitude…
Dans lequel une femme est entrée il y a exactement un an, et qui nous parle dans l’Ouest de la France et La Dépêche, elle s’appelle Lydie Despaux, et le 4 novembre dernier, son mari Frédéric qui était un agent d’élite d’Enedis, un de ceux envoyés en urgence pour rétablir nos lignes électriques après des catastrophes, son mari Frédéric, parti sauver la Bretagne. , dit-elle, après la tempête Aviaire, morte électrocutée à Pont-Aven où l’on peint parfois, où une rue porte son nom, et ce qui ronge Lydie, un an après, c’est qu’on ne sait pas pourquoi l’accident s’est produit…
C’est une de ces blessures, ces crevasses de l’existence que véhiculent nos journaux… The Independent me raconte l’hommage De retour d’un village, Alenya vêtue de blanc chez un adolescent nommé Emilio retrouvé battu à mort au domicile de sa mère et de son beau-père, des enfants qui ne comprennent pas portent sa photo. Le Dauphiné raconte à Romains le traumatisme du club de Rugby Romanais-Péageois, où évoluait Nicolas, 22 ans, tué juste avant la Toussaint devant une discothèque, et à laquelle une infirmière de son âge, Clara lui a tenu la main jusqu’au bout… Le club de Roman Tollois Rugby fut aussi celui du jeune Thomas, poignardé à mort dans une rixe de bal à Crépol, cela fera un an dans quinze jours… Pourquoi eux, quel sort ?
Dans le Maine libre J’ai lu un footballeur de l’ES Moncé en Velin, Alain Gouffier, qui habitait à deux pas du stade, un bénévole irremplaçable, l’homme des casse-croûtes, des plaisanteries pendant les matchs, et qui jouait encore comme un vétéran et qui s’est effondré hier après son égal, mort devant ses amis, et ce serait une belle mort pour un artiste, si elle n’était pas très tôt à 64 ans…
Ces drames sont des mondes, chacun d’eux – j’en parle aujourd’hui alors que Samuel Paty qui était un homme libre et qui nous appartient fait la Une de journaux aux titres disparates… « Huit suspects devant la justice », dit Sud- L’Ouest, « procès d’une escalade meurtrière », dit l’Est républicain, « procès d’une spirale terrible », dit Libération, « procès de chasse à l’homme », dit l’Humanité, « procès de fanatisme islamiste » dit Le Figaro, qui, avec la Croix, seule ose ce mot… Ces différences sont nos paysages mentaux…
Sur le site du Nouvel obs J’ai lu, mené par l’actrice Judith Godrèche, une adresse sévère aux jurés du Prix Fémina pour qu’ils ne couronnent pas l’essai sur « Meetoo le vertige » de la journaliste Caroline Fourest. Cette bataille nous le dit aussi.
Et tu nous parles enfin d’une robe…
Pour nous apaiser avec luxe… La robe que portait la régente Marie de Médicis au baptême du futur Louis XIII et que le Populaire du Centre et la Montagne je m’émerveille, cette robe était ornée de 32 000 perles d’eau douce, venues de toute l’Europe, et pour ces perles, nous avions sacrifié 32 millions de moules perlières… Car c’est une proportion d’une seule moule sur mille qui est porteuse de perle…
Mais ce massacre est daté… car après des siècles de coquetterie luxueuse, de bibelots, et de pollution des rivières, l’heure est venue de sauver la moule, qui survit en Haute-Vienne sur la Briance ou en Creuse sur la Béraude, la Gosne, la Gartempe. ou Grand Rieu, et surveillé par le Conservatoire des Espaces Naturels de Nouvelle-Aquitaine.
On suit les femelles, la ponte, on suit un poisson, la truite fario, dont les branchies servent de berceau à des larves invisibles à l’œil nu…
Pour que les moules se reproduisent, il faut trouver 10 à 30 truites par 100 m2 de cours d’eau. Pas facile… Alors, nous récoltons des larves en Limousin pour les envoyer en Bretagne dans une pisciculture où les attendent les truites, 800 larves par truite, elles seront hébergées quelques mois chez la truite hôte, nos futures moules, puis retourneront dans leur élément, les sédiments d’une rivière dont ils filtrent le courant…
S’ils vivent, ils prouvent que nos rivières sont vivantes et fraîches… Elles sont un miracle sans cesse renouvelé. J’ai lu que sur un million de larves produites, moins de dix parviendront à devenir une jeune moule. J’ai lu que certaines moules vivent alors jusqu’à cent ans, et qu’une octogénaire que les chercheurs ont repérée et baptisée L29 pond encore des milliers d’œufs placés dans des nurseries en Bretagne. De quelle vie me parlerait-elle ?
En Provence Je lis et salive du bonheur de Romain Paro, poissonnier à Aix, qui après des années de recherche a acquis un Royal Lampris, alias « le saumon des dieux », qu’il découpe pour le rare plaisir de ses clients…
Dans l’ADN je lis un portrait sublimement écrit par un sublime homme de livres et de lettres, écrivain bibliophile né à Saverne et qui vit dans le Morvan à l’écart du monde, dans une mélancolie qui, dit-il, « touche à la sainteté », faisant réapparaître en lui des visages d’anciens : Gérard Oberlé, qui est le frère français de l’Américain Jim Harrison et qui dans son enfance rêvait d’être kidnappé par des bohèmes…
Dans la Républicaine Lorraine, J’ai lu un village, Olley, dont les habitants ont voté, ils veulent qu’on les appelle désormais « ânes brûlés », c’est un autre hommage à la langue.
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