Si le gouvernement de Michel Barnier tombe, que se passera-t-il ensuite ?

Si le gouvernement de Michel Barnier tombe, que se passera-t-il ensuite ?
Si le gouvernement de Michel Barnier tombe, que se passera-t-il ensuite ?

L’Assemblée nationale examine mercredi deux motions de censure déposées par le Nouveau Front populaire et le Rassemblement national. Franceinfo résume les différents scénarios si l’un des deux textes obtenait la majorité.

Un saut dans l’inconnu. Le Premier ministre Michel Barnier a pris, lundi 2 décembre, les responsabilités de son gouvernement en déclenchant l’article 49.3 de la Constitution sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). Ce dernier a assuré qu’il avait été “à la fin du dialogue” avec des formations politiques, notamment le Rassemblement national, à qui il a accordé plusieurs concessions ces derniers jours.

En contrepartie, le Nouveau Front populaire et le RN ont déposé deux motions de censure contre le gouvernement, Marine Le Pen dénonçant une « Budget dangereux, injuste et punitif ». N’ayant pas réussi à convaincre l’opposition, l’exécutif a désormais toutes les chances d’être renversé mercredi soir, lors de l’examen de ces deux textes. En additionnant leurs voix, les deux blocs peuvent en effet rassembler environ 330 voix, bien au-delà des 288 requises. Que se passerait-il dans ce cas ? Franceinfo se penche sur les scénarios.

Nommer un nouveau gouvernement… mais lequel ?

En cas de censure, plusieurs options s’offrent à Emmanuel Macron pour former un nouveau gouvernement. Il pouvait, comme il l’a fait au lendemain des élections législatives, prendre son - et laisser le gouvernement démissionnaire en charge des affaires courantes. Mais cette option ne semble pas être sa préférence, a appris Télévisions mardi. Si Michel Barnier tombe, il faudra «une nomination absolument rapide d’un nouveau Premier ministre, au plus tard en début de semaine»assure l’entourage du chef de l’Etat, soulignant qu’il faudra « calmer les marchés financiers » et qu’il y aura « un pays à diriger et un budget à voter ».

Emmanuel Macron pourrait également reconduire Michel Barnier (qui a écarté cette hypothèse mardi soir sur France 2) ou une autre personnalité compatible avec le socle commun, composé de macronistes, de centristes et de droite. Les noms de Sébastien Lecornu (ministre des Armées) et de François Bayrou (président du MoDem) circulent notamment. Mais ce nouveau gouvernement risquerait alors d’être à son tour censuré par l’Assemblée nationale, la motion de censure pouvant intervenir même sans recours à l’article 49.3 par le Premier ministre.

Le président de la République pourrait alors choisir un gouvernement technique, ce qui ne l’avait pas convaincu après les élections législatives anticipées. Mais l’idée est loin de faire l’unanimité au sein du socle commun. « Un gouvernement technique ? Je ne sais pas ce que cela signifie »» décide un député macroniste. “Ce serait une forme d’immobilité”rejette un député de droite. D’autres s’interrogent plus sérieusement.

« C’est la voie ultime, mais je n’y crois pas du tout. Quelle légitimité aurait un gouvernement technique vis-à-vis du Parlement ? Mais nous devrons peut-être passer par là.

Un parlementaire macroniste

sur franceinfo

De leur côté, les députés du Nouveau Front Populaire évoquent une nouvelle fois le nom de Lucie Castetschoisi cet été par la gauche pour les représenter. Mais sa capacité à former un gouvernement qui ne serait pas censuré est incertaine. Invitée de franceinfo, elle a écarté la possibilité qu’un gouvernement de gauche puisse intégrer les macronistes..?….(Nouvelle fenêtre)…

Enfin, Emmanuel Macron pourrait envisager de construire une large coalition, allant de la droite au Parti socialiste – une hypothèse qui a également échoué au lendemain des élections législatives, le NFP étant resté uni. “Il y a un point d’équilibre à trouver” pour durer jusqu’en juillet, date auquel une nouvelle dissolution de l’Assemblée nationale sera possible, glisse son entourage.

“Nous avons besoin d’une nouvelle méthode : travailler, y compris avec les socialistes (…) pour un gouvernement non censurable jusqu’en juillet prochain.”

L’entourage d’Emmanuel Macron

at France Télévisions

“Il faut éviter d’être sous la menace de la censure pendant des mois, et la seule voie que je vois aujourd’hui est du côté des socialistes”dit aussi un sénateur macroniste. Le PS voudrait travailler sur “un accord de non-censure”explique le député Arthur Delaporte. L’objectif est de discuter avec tous les partis présents à l’Assemblée, à l’exception du RN, pour élaborer un accord qui permettrait de nommer un nouveau gouvernement, « avec à sa tête une personnalité de gauche »précise le député du Calvados.

L’idée a été reprise par l’ancien Premier ministre Gabriel Attal, qui envisage de proposer son propre pacte de non-agression. En cas de censure gouvernementale, le président du groupe Ensemble pour la République entend appeler tous les partis républicains, à l’exception du Rassemblement national et de La France insoumise, à trouver un compromis, a appris le service politique de franceinfo. L’idée est que chaque parti se sent libre de voter pour ou contre une proposition du prochain Premier ministre, mais s’engage à ne pas le censurer à la moindre occasion. « Il faut surmonter les divisions pendant un an ou deux pour sortir de la crise »» pousse un exécutif du parti Renaissance.

Faire adopter un budget… mais comment ?

Le le projet de loi de finances a été rejeté lors d’un vote à l’Assemblée le 12 novembre. Depuis le 25 novembre, il est examiné par le Sénat. En cas de censure, les avocats sont divisés sur le sort du budget 2025, constate Le monde. « Le texte ne meurt pas si le gouvernement tombe »assure le constitutionnaliste Benjamin Morel à franceinfo. Les débats seraient simplement gelés jusqu’à ce qu’un gouvernement reprenne le projet de loi de finances.

Mais ce texte aurait-il un avenir ? En cas de nomination d’un Premier ministre du même côté que Michel Barnier, “on peut supposer qu’il [tenterait] pour adopter le même budget, avec en l’occurrence une motion de censure le 20 décembre″estime Eric Coquerel. Un gouvernement démissionnaire ne serait pas mieux placé pour faire adopter le budget, puisque le Premier ministre ne pourrait pas engager sa responsabilité en utilisant l’article 49.3. Par ailleurs, la possibilité de faire adopter le budget par ordonnance, permise par la Constitution, a été écartée par le gouvernement.

Un gouvernement d’une autre couleur politique que celle de Michel Barnier pourrait tenter « modifier suffisamment le budget pour tenter de faire passer la partie recettes » d’ici fin décembre, délai fixé par la Constitution. Mais le timing est extrêmement serré et nécessite de pouvoir prendre ses responsabilités sans être censuré par l’opposition – un scénario qui n’est, en l’état actuel des choses, acquis par aucune force politique.

“L’option la plus probable”selon Eric Coquerel, n’est donc qu’un « loi spéciale » être voté pour permettre la collecte des impôts et le fonctionnement de l’État au minimum, afin de « tenir quatre à six semaines, en attendant un nouveau budget » début 2025. L’hypothèse, permise par l’article 45(Nouvelle fenêtre) de la loi organique relative aux lois de finances, a été évoquée par le Premier ministre sur TF1.

“Si le gouvernement tombe, il y a des mesures d’urgence que nous prenons avec le Parlement pour pouvoir payer.”

Michel Barnier, Premier ministre

sur TF1

“Plusil a continué, cela ne couvre pas toute l’année 2025 et surtout cela n’empêche pas la crise ou la méfiance des marchés financiers, ni que tout s’arrête et qu’il faille recommencer.»

De la même manière, la censure du gouvernement Barnier ne ferait pas non plus baisser le budget de la Sécurité sociale. Mais, en l’absence d’une majorité capable de faire adopter ce texte ou un autre d’ici la fin de l’année, l’urgence sera de trouver un financement pour la Sécurité sociale. Pour financer une partie de ses dépenses, cette dernière emprunte de l’argent sur les marchés grâce à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) avec l’autorisation du Parlement, rappelle Les Echos. Cette dernière devrait donc adopter en urgence une loi spéciale permettant à la Sécurité sociale de se financer en empruntant sur les marchés financiers. Dans le cas contraire, le versement des prestations sociales ne pourrait être assuré indéfiniment.

Démissionner ? Emmanuel Macron a rejeté l’idée…

En retrait depuis la nomination de l’ancien négociateur du Brexit à Matignon, Emmanuel Macron reviendrait, en cas de censure, sur le devant de la scène politique nationale. « MMaintenant, la main est à Macron, il va falloir qu’il redescende et ça va le frapper.»résume un député de droite interrogé par franceinfo. « L’enjeu pour lui sera de rester au sommet, alors que l’opinion publique le tient pour responsable de la situation, du fait des deux éléments déterminants que sont la dissolution et le déficit public dégradé de la France »explique à l’AFP l’enquêteur Bernard Sananès, de l’institut Elabe.

« Emmanuel Macron reçoit la facture de tout ce qui lui est reproché, y compris par une partie de son électorat »

Bernard Sananès, sondeur

à l’AFP

Si les stratèges de l’Elysée espéraient que la réserve présidentielle lui redonnerait de la couleur dans l’opinion publique, il n’en est rien : sa popularité est au plus bas depuis son arrivée au pouvoir en 2017 ou depuis la crise des “gilets jaunes” l’année suivante, selon les différents baromètres. L’échec de Michel Barnier est aussi considéré par plusieurs de ses adversaires comme le sien, puisque c’est lui qui a fait sortir l’ancien commissaire européen de sa retraite.

Comme après les élections législatives, un certain nombre d’acteurs politiques – de Jean-François Copé à https://twitter.com/JLMelenchon/status/1863589697705910688?ref_src=twsrc%5Egoogle%7Ctwcamp%5Eserp%7Ctwgr%5Etweet through Charles de Courson – now assert qu’une démission du président est la seule solution pour résoudre la crise. Un scénario qui concerne le “politique-fiction”a balayé la personne d’Arabie Saoudite mardi soir. Si tel devait finalement être le cas, une élection présidentielle devrait avoir lieu dans un délai de 20 à 35 jours, selon l’article 7 de la Constitution. Et Emmanuel Macron n’a pas pu s’y présenter.

 
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