Critique
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L’adaptation du roman de Nicolas Mathieu par les frères Boukherma sacrifie jusqu’à la contradiction le sujet sociopolitique, mettant en scène l’amour adolescent dans une région désindustrialisée des années 90.
Par son succès et ses lauriers (Prix Goncourt 2018), Leurs enfants après eux de Nicolas Mathieu a participé comme aucune autre œuvre littéraire récente au grand aggiornamento de la fiction française dans la représentation des classes populaires. Tout un pan de la production littéraire de Barbusse à Eribon, et cinématographique de Carné à Kechiche, avait bien sûr déjà regardé au-delà de leur destin, parallèlement à son intérêt particulier pour les existences bourgeoises. a priori plus proches de ceux des artistes, façonnant des langages et des types de narration spécifiques et, souvent, engagés. Mais Mathieu, par sa propre proximité avec le monde qu’il décrit dans son deuxième roman (celui du périurbain vosgien) et sa volonté d’élaborer une histoire romantique jouant pleinement sur la connivence par la nostalgie (l’action, ponctuée par les tubes de l’époque, se déroule dans les années 90) a considérablement fait bouger les lignes, voire fait tomber un mur de soutènement : son histoire contée pour « tous », sans médiation laborieuse, pour le pur plaisir d’une fiction électrisée par