C’est devenu un grand classique d’Emmanuel Macron : déambuler dans les rues en manches de chemise, manches retroussées comme un symbole… et la petite phrase polémique en réponse à un passant qui l’interpelle. Retour sur toutes ces fois où le président a lâché prise, avant de le regretter.
C’est peut-être pour cela qu’il est le meilleur – ou le pire, selon votre point de vue. Soleil d’été, manches de chemise, une promenade presque bon enfant dans les rues d’une ville, et puis le drame : un passant l’interpelle, lui demande son avis ou exprime un ressentiment lié à sa politique, et il répond. Emmanuel Macron est, depuis son entrée dans la vie politique française, adepte de la petite phrase, tantôt calculée, tantôt jaillissante un peu trop brusquement, sans se soucier des conséquences médiatiques et populaires, face à un interlocuteur un peu véhément.
“Ils sont complètement stupides”
Il a une nouvelle fois démontré tout son savoir-faire en la matière lors de son déplacement à Rio, en marge du G20 accueilli par le Brésil. Interrogé par un passant sur la situation en Haïti, ancienne colonie française, le président a évoqué le départ de Garry Conille, démis de ses fonctions en pleine crise politique, économique et sécuritaire sur l’île des Caraïbes. Tandis que le spectateur affirme au chef de l’Etat que la France est « responsable de la situation en Haïti »il répond que « là franchement, ce sont les haïtiens qui ont tué Haïti, laissant le trafic de drogue [prospérer] ».
Il poursuit ensuite avec des propos sur le Conseil présidentiel de transition haïtien qui ont depuis circulé sur les réseaux sociaux : « Et là, ce qu’ils ont fait, le Premier ministre a été génial, je l’ai défendu, ils l’ont viré ! C’est terrible. C’est terrible. Et je ne peux pas le remplacer. Ce sont des idiots complets, ils n’auraient jamais dû le sortir, le Premier ministre a été génial. » Son entourage dénonce une vidéo “tronqué”et explique que le Président de la République n’insultait pas le peuple haïtien.
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Sur les réseaux sociaux, le mal est fait : la présidente du groupe insoumis à l’Assemblée Mathilde Panot s’est éclatée : « Honte à Macron qui dit que les Haïtiens sont « complètement stupides ». Que le Président commence par connaître l’histoire et la dette voyous imposée par la France à Haïti, première République noire au monde, étendard de la lutte contre l’abomination de l’esclavage. Soutien au peuple haïtien, cible de l’arrogance impérialiste et raciste de Trump à Macron. »
OSS117 sur le vieux port
Autre scène, même scandale et même chemise retroussée. En juin 2023, interrogé par une mère dont le fils peine à trouver un emploi, le président fait une référence à peine déguisée à son célèbre “Il suffit de traverser la rue [pour trouver un emploi] ». Au milieu d’une foule de riverains, le président prend son ton paternel, que certains internautes ont comparé à celui d’OSS117 : « On descend ensemble, on fait le tour du port, je serais surpris s’il n’y a pas un restaurant ou un café qui ne regarde pas. »
Là encore, Mathilde Panot l’avait fait reculer, estimant que « Macron caricature Macron » sur X (ex-Twitter) : « La solution au chômage ? Traverser une rue en 2018. Marcher un mètre en mai 2023. C’est le moment de faire le tour du Vieux-Port en juin 2023. Face au mépris du peuple, le seul chômeur qu’on espère dans le pays est Emmanuel Macron. . Même à droite de l’échiquier politique, la vidéo a surpris.
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La sénatrice LR des Bouches-du-Rhône, Valérie Boyer, a eu ses petits mots sur l’avenir du chef de l’Etat réélu un an plus tôt : «Quand Emmanuel Macron ne sera plus président, il pourrait se reconvertir comme agent à Pôle emploi. »
Bras de chemise et acteur de studio
Mais lancer des déclarations controversées en manches de chemise n’est pas qu’un sport de plein air, pratiqué sous un soleil de plomb. Le confort d’un studio de radio parisien s’y prête tout aussi bien. C’est dans cette tenue de gala médiatique que celui qui venait de s’installer au ministère de l’Economie en 2014 affichait sa première marque de mépris social, en direct sur Europe 1. Interrogé sur les entreprises en difficulté, le futur président de la République a pris la liberté de citer l’abattoir de la société Gad, insultant certains de ses salariés : « Dans les sociétés qui m’ont été données, sur les dossiers que j’ai, il y a la société Gad. Tu sais ? Cet abattoir. Il y a une majorité de femmes dans cette société. Nombreux sont ceux qui sont analphabètes. »
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Conscient de l’impact que peuvent provoquer ses vidéos prises à la volée, manches retroussées, le locataire de l’Élysée a divulgué en 2018 une vidéo filmée par un caméraman, publiée par sa directrice de communication Sibeth Ndiaye sur Twitter). On le voit en pleine discussion informelle avec des conseillers, lâcher une courte phrase qui restera dans les annales de sa présidence : « La politique sociale, regardez : nous investissons des sommes folles dans les minima sociaux, les gens sont toujours pauvres. Nous n’en sortirons pas. Les gens qui naissent pauvres restent pauvres. Ceux qui tombent pauvres restent pauvres. Il faut avoir quelque chose qui permette aux gens de s’en sortir. » Là encore, loin de l’objectif initial – montrer un président social inquiet du sort des plus nécessiteux – la vidéo a fait scandale. Emmanuel Macron avait alors été accusé de dénigrer le modèle social français.