« À l’époque, j’étais en dehors de la réalité. » La voix de Marion Sicot s’est brisée à plusieurs reprises mercredi à la barre du tribunal judiciaire de Montargis (Loiret). Son audition par la minutieuse présidente Elsa David fut une plongée brutale dans la triste réalité de son dopage, entre 2016 et 2019, à l’EPO et au clenbutérol.
Était-elle consciente des risques qu’elle prenait ? Marion Sicot, qui porte encore un tatouage de vélo au poignet, a avoué qu’elle était alors “dedans à tout prix” : “C’est sûr qu’il y a des risques cardiaques, qu’on risque sa vie… Mais je ne me voyais qu’en cycliste”. , pas en tant que femme.
Elle prenait du clenbutérol, un produit vétérinaire, pour perdre du poids. Et elle s’est injectée de l’EPO à plusieurs reprises, parfois par voie intraveineuse : « C’est beaucoup plus risqué que par voie intramusculaire. Il faut faire attention à ne pas avoir de bulles d’air.
«Je déclinais»
En 2020, sur France 2, Marion Sicot reconnaissait une injection d’EPO, un geste désespéré, disait-elle, pour échapper au « contrôle » de son directeur sportif Marc Bracke. Il lui a demandé des photos en sous-vêtements. Elle a encore évoqué cette période difficile mercredi : « Je n’allais pas bien du tout. C’était compliqué avec ma DS (Directrice Sportive) et je ne me voyais pas exister autrement qu’en tant que sportive professionnelle.
Elle fait également preuve d’autocritique : « Je baissais dans mes performances, mais je faisais aussi moins d’efforts. J’ai donc cherché la manière la plus simple de rester au même niveau. Celle qui ne compte que quelques Top 10 à son palmarès a avoué, un peu amèrement, que ce dopage ne lui apportait « quasiment aucun bénéfice sportif ».
Après avoir été un temps « recroquevillée dans le mensonge », elle a cette fois assumé la responsabilité de tout, y compris des premiers protocoles, en 2016 et 2017. « En 2016, je venais de quitter ma première équipe pro et je me suis dit que pour réussir à redevenir professionnel à cet âge, il fallait que je me montre”, a assuré l’athlète, pour qui “le dopage fait partie intégrante du cyclisme”. Marion Sicot a eu le statut professionnel pendant deux saisons mais n’a jamais été payée pour courir.
Elle a également raconté comment elle avait obtenu des produits améliorant les performances. D’abord, dit-elle, via une ordonnance de convenance obtenue par une connaissance, ancienne cycliste amateur, auprès d’un médecin réputé pour être « facilitateur ». » Ces deux hommes ont également été jugés mercredi. Puis sur Internet, « en quelques clics », précise-t-elle. Elle dit avoir payé entre 600 et 1 200 euros par protocole EPO.
Un an de prison avec sursis requis
Le procureur a requis un an de prison avec sursis et 5 000 euros d’amende contre Marion Sicot et 18 mois de prison avec sursis et 10 000 euros d’amende contre l’ancien cycliste amateur, qualifié d’« animateur cynique ». Enfin, Jean-Cédric Gaux a requis 18 mois de prison avec sursis, 20 000 euros d’amende et deux ans d’interdiction d’activité à l’encontre du médecin soupçonné d’avoir prescrit de l’EPO. La décision sera rendue le 22 janvier 2025.
Marion Sicot, qui savait qu’elle risquait une peine de prison avec sursis, s’est dite « soulagée » que ce procès soit réussi. Elle a parfois essuyé une larme à la barre, notamment lorsqu’elle évoque ses « regrets » et cette « étiquette qui lui colle à la peau ». Mais elle affiche un visage serein en affirmant avoir « appris à vivre » pendant ses quatre ans de suspension : « Dans cette quête de performance, j’ai sali mon sport. J’existais uniquement pour le vélo. J’ai appris à 30 ans que le sport n’était pas ma vie. Juste une partie de ma vie.
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