Lors d’une soirée à laquelle j’ai assisté il n’y a pas si longtemps, la conversation a tourné, à contrecœur, vers la religion. L’étranger m’a demandé si j’étais religieux, un statut que j’ai concédé de manière hésitante et hollywoodienne. Il a répondu qu’il était athée, une position qu’il avait atteinte après avoir lu le Talmud, la Bible et le Coran et trouvé que tout y manquait.
J’ai soutenu que c’était une façon terrible de procéder : parfois le contexte compte tout autant que le texte ; si tu lis “Ferme des animaux » sans une connaissance pratique de Joseph Staline, vous pourriez repartir avec une histoire farfelue sur des cochons en haut-de-forme.
Je n’ai pas pu m’empêcher de revivre cette conversation tout au long de l’exécution de “Hérétique” de A24 qui détaille le pire scénario d’un tel autodidacte Reddit.
Le film suit sœur Barnes (Sophie Thatcher) et sœur Paxton (Chloe East), deux jeunes saintes des derniers jours en mission. Elles n’ont pas eu beaucoup de succès, ce qui est surprenant car si l’une ou l’autre de ces actrices évangélisait à la porte de ce critique, j’écrirais probablement pour une autre publication.
Sœur Paxton est le berceau mormon, tout en sucre, en arc-en-ciel et en optimisme blond. Sœur Barnes est une convertie et donc plus streetwise et cynique, le « méchant flic » du partenariat. Leur dernier arrêt après une longue journée de rejet est la maison de M. Reed. Reed (Hugh Grant), semble assez sympathique, invitant les filles dans sa demeure rustique avec la promesse d’une discussion théologique et d’une tarte aux myrtilles.
Read est comme l’homme ci-dessus, un chercheur autoproclamé du divin sans jamais être satisfait des réponses données. Lui aussi a lu la trilogie Abrahamique et, en fin de compte, le Livre de Mormon. Ses questions passent de l’inquisitrice à l’inquisition, les filles n’ayant pas beaucoup de réfutations à ses questions pointues sur l’histoire douteuse de l’église.
Mais distinguer la théologie mormone n’est ni difficile ni sportif, et ce qui était censé être une conversation ressemble d’autant plus à un homme adulte intimidant quelques étudiants, comme une vidéo plus infâme de Ben Shapiro. Ses questions de plus en plus hostiles suscitent des questions silencieuses de la part des filles, comme : où est la femme qu’il avait promis d’être dans l’autre pièce ? Pourquoi est-il si réticent à les laisser partir ? Et à quel type de public captif pense-t-il ?
Hugh Grant, pour sa part, a passé la majeure partie des 30 dernières années à bégayer et à charmer les cœurs américains et les maisons de plus en plus grandes. Aujourd’hui dans les neuf dernières années de sa carrière, il a décidé d’utiliser cette bonne volonté comme une arme et ainsi de la détruire. Ses derniers rôles ont renversé le personnage pour révéler le vieil homme sale en dessous, que de telles manières déguisent généralement. Après tous ces mariages, il arrive enfin aux funérailles, et c’est plus amusant qu’il n’en a eu depuis des années.
Grant est la meilleure partie du film, un rake charmant même si l’histoire plonge inévitablement dans l’enfer sanglant. Il s’avère que Reed n’est pas tant intéressé par la conversation que par une… expérience, où il décidera une fois pour toutes si sa propre théorie sur la religion est acceptée.
Reed est intelligent, ce qui est tout à fait différent d’intelligent. Il est facile de tomber dans le piège de la cadence apaisante de Grant, tandis que ses arguments sophistiqués n’invoquent pas la contemplation mais du déjà vu, un souvenir proustien ramené dans la corbeille à linge de votre colocataire de première année.
Des films de moindre importance lui auraient permis de s’en tirer. Mais ce n’est pas le cas de « Heretic », ce qui est à son honneur. Les missionnaires ne sont peut-être pas en mesure d’expliquer la polygamie, mais ils peuvent au moins réfuter ces absurdités selon lesquelles Jésus aurait été volé à Horus. Reed s’en fiche ; il est incapable d’improviser à partir de son cours, ou d’expliquer de nouveaux arguments que ceux qu’il a déjà répétés et gagnés sous la douche.
Une fois passé le premier acte stellaire, le film semble similaire, soigneusement répété et incapable d’anticiper la spontanéité de la nature humaine. Nos personnages s’effondrent en symboles, simples véhicules de monologues alors même qu’ils saignent. Une partie de l’élément humain qui manque est une véritable compréhension de la religion.
Il n’est pas nécessaire de comprendre la religion pour la comprendre, si cela a du sens. Cela signifie simplement prendre le croyant au mot et dire qu’il y croit réellement. Il y a un dialogue vers la fin qui résume mes frustrations, où l’une des missionnaires admet qu’elle ne croit pas à l’œuvre de la prière. Pour elle, c’est juste une façon de penser aux autres et d’être gentil, et en fin de compte, n’est-ce pas ça la religion ?
Pape François met en garde contre cette mentalitéoù la foi n’est pas acceptée selon ses propres termes mais plutôt comme une « ONG spirituelle » et où la religion est considérée comme un simple prétexte pour les bonnes œuvres. (La phrase de Flannery O’Connor à propos de l’Eucharistie : « Si c’est un symbole, alors au diable », me vient à l’esprit.) La religion peut être calomniée d’une myriade de façons, mais le nom le plus insultant que l’on puisse lui donner est « utile ». » Si ce n’est que cela, il existe des moyens plus utiles d’être utile.
Le film tente d’adopter un agnosticisme de principe, mais une partie de cette équation consiste à tolérer la possibilité, voire la pure terreur, que Dieu soit réel. Malgré les propositions diplomatiques des cinéastes, ils commencent à ressembler énormément à leur M. Reed, entamant un dialogue où les paramètres (et donc les résultats) sont truqués dès le départ.
Alors même si je reconnais le rameau d’olivier étendu, je le piétine. En fin de compte, je préférerais me faire casser le nez par un fervent athée plutôt que de subir les largesses d’une tape condescendante sur la tête.