ce que veut faire la ministre de l’Éducation, Anne Genetet

ce que veut faire la ministre de l’Éducation, Anne Genetet
ce que veut faire la ministre de l’Éducation, Anne Genetet

Deux étudiants par classe. C’est le nombre moyen d’enfants victimes de harcèlement en milieu scolaire, selon les évaluations réalisées en 2023 par l’Éducation nationale. Du 7 au 15 novembre, la ministre Anne Genetet invite donc les enseignants à délivrer des questionnaires aux élèves du CE2 à la Terminale, pour mesurer s’ils sont susceptibles d’être victimes de harcèlement. A l’occasion de la Journée nationale contre le harcèlement scolaire, ce jeudi, celle qui recevra pour l’occasion les élèves victimes à la Sorbonne, explique ses priorités au ELLE.

ELLE. Quel est l’objectif des questionnaires d’auto-évaluation distribués aux étudiants à partir de ce jeudi ?

Anne Genetêt. Le premier antidote contre le harcèlement est la liberté d’expression. Il est intolérable qu’un enfant aille à l’école avec une boucle au ventre, c’est pourquoi je présiderai demain un grand événement pour faire passer un message d’engagement et de détermination : la loi du silence et de l’impunité, c’est fini. Nous ne devons jamais abandonner cela. Victimes et témoins doivent oser en parler, c’est pourquoi un questionnaire d’auto-évaluation sera distribué demain dans toutes les classes du CE2 à la Terminale avec un objectif : briser le tabou du harcèlement au travail. école. Je vous annonce également que ce questionnaire sera distribué chaque année.

« Les jeunes concernés doivent savoir qu’ils peuvent être écoutés, soutenus et surtout, que ce n’est pas une fatalité. »

C’est aussi l’occasion, dans le cadre d’un temps dédié en classe, de redéfinir avec les élèves ce qu’est le harcèlement : ce n’est pas seulement le fait d’avoir reçu, un jour, un mot peu insultant. Il s’agit de harcèlement, d’insultes, parfois de rumeurs lancées ou de violences physiques répétées. Les jeunes concernés doivent savoir qu’ils peuvent être écoutés, soutenus et surtout que ce n’est pas une fatalité.

ELLE. Les réponses aux questionnaires étant anonymes, comment les enseignants peuvent-ils agir en cas de harcèlement ?

AG Tout d’abord, pour remettre les choses dans leur contexte, demain il y aura des millions d’enfants qui pourront s’exprimer librement. Cette approche doit nous permettre d’avoir une vision précise des réalités auxquelles nos étudiants sont confrontés. Nous pourrons identifier, dans telle ou telle classe, si un enfant dit souffrir. C’est dans ce cadre qu’agissent les équipes de référence harcèlement, en accompagnant les élèves et leurs parents, notamment en les incitant à s’exprimer avec assurance. Et si un cas de harcèlement est identifié, c’est toute la chaîne de l’Éducation nationale qui se met en route.

ELLE. Que fera votre ministère des résultats de ces grilles d’auto-évaluation ?

AG Des étudiants désignés comme « ambassadeurs du harcèlement » dans chaque établissement permettront aux enfants de prendre la parole plus facilement. Ensuite, nous avons des « délégués au harcèlement » – une équipe de cinq personnes dans chaque établissement, avec des profils variés : un enseignant, un surveillant, un responsable de vie scolaire, une infirmière, etc. Ils ont été spécifiquement formés pour traiter le problème.

« L’objectif est que tous les enseignants soient formés d’ici 2027. »

Au-delà, tous nos professeurs ont accès à des formations pour leur apprendre à repérer les signaux. Près de 200 000 agents de l’Éducation nationale ont déjà été formés, avec pour objectif de tous être formés d’ici 2027. Au niveau national, nous avons mis en place des renforts humains dédiés à la lutte contre le harcèlement à l’école : 150 représentants prêts à se déplacer dans les écoles pour soutenir équipes pédagogiques.

ELLE. Le harcèlement scolaire commence parfois chez les plus jeunes. Que prévoyez-vous pour les cycles maternel et élémentaire ?

AG Pour ces jeunes de 3 à 8 ans, nous travaillons localement et les enseignants sont formés. De plus, nous avons cet automne des cours d’empathie généralisée afin que les élèves apprennent à gérer leurs émotions et leur relation avec leurs camarades. Le respect des autres, le vivre ensemble, ce sont des valeurs qui s’acquièrent dès le plus jeune âge.

ELLE. Un plan interministériel de lutte contre le harcèlement scolaire a été présenté en septembre 2023, prévoyant notamment la mise en place de cours d’empathie, la confiscation des téléphones des cyberharceleurs et leur exclusion des réseaux sociaux. Où en est sa mise en œuvre ?

AG La lutte contre le harcèlement ne doit jamais s’arrêter, c’est l’un des combats du siècle et une de mes grandes causes. Donc tout ce qui a été mis en place dans ce plan sera évidemment poursuivi. Ce sont des actions concrètes, désormais c’est l’étudiant harcelant qui change d’établissement. Jusqu’à présent, c’était plutôt la victime. Concernant les sanctions, comme je l’ai dit, l’impunité est terminée. La convocation d’un conseil de discipline dans les établissements secondaires (collèges et lycées) sera plus rapide avec un délai de cinq jours. Nous disposons également de formations pour les parents sur une plateforme mise à leur disposition. Car la lutte contre le harcèlement concerne aussi les parents.

ELLE. Envisagez-vous de nouvelles mesures inédites ?

AG Concernant les cours d’empathie, à partir de l’année 2026, les programmes d’éducation à la vie affective et à la vie relationnelle comprendront une section entière sur la compréhension des émotions d’autrui. Apprendre à vivre ensemble commence dès le plus jeune âge. La formation des enseignants sera encore une fois renforcée. J’y tiens beaucoup. En interne, je veillerai à ce que les enseignants fassent et refont cette autoformation régulièrement mise à jour.

ELLE. Envisagez-vous également de sensibiliser les parents aux enfants harceleurs ?

AG C’est la partie la plus difficile. Il est très compliqué d’accepter en tant que parents que notre enfant soit un tyran. Il doit encore le dire…. Il faut en parler avec ses enfants mais aussi avec l’école, des équipes éducatives sont également formées pour accompagner les familles des enfants harceleurs. Se confronter à ses enfants n’est pas forcément la bonne solution. Il faut savoir trouver les mots justes pour qu’à terme le harcèlement cesse complètement.

ELLE. Gabriel Attal lance ce mercredi sa fondation « Face Face » pour lutter contre le harcèlement scolaire. Allez-vous le rencontrer pour en parler ?

AG Oui, j’étais présent à ses côtés lors du lancement de son association, nous avançons côte à côte sur ce sujet. Les institutions et associations sont un jeu de communication qui profite à tous. Je veux travailler avec tous ceux de bonne volonté pour mener la bataille contre le harcèlement scolaire.

 
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