Avec la victoire revendiquée par son « ami » Donald Trump, le Premier ministre hongrois Viktor Orban apparaît en position de force alors qu’il reçoit les dirigeants européens à partir de jeudi, après des mois de tacles et de « provocations ».
Celui qui a tout misé sur le milliardaire américain, contrairement aux réticences de l’UE, jubilait mercredi, saluant un “succès retentissant, peut-être le plus grand retour en force de l’histoire politique occidentale”.
“Ils l’ont menacé de prison, ont confisqué ses biens, ont tenté de l’assassiner (…) et pourtant il a gagné”, a-t-il écrit sur le réseau social Facebook.
Les 47 pays de la Communauté politique européenne (CPE), composée des Vingt-Sept et leurs voisins, de la Turquie à l’Ukraine, se réunissent jeudi à Budapest, avant un conclave de l’UE le lendemain.
Pour ce plus grand rendez-vous diplomatique jamais organisé en Hongrie, Viktor Orban a choisi le flamboyant stade Puskas Arena, du nom du légendaire footballeur Ferenc Puskas, symbole de sa passion pour le football.
– « Rendre sa grandeur à l’Europe » –
Autant une élection de la démocrate Kamala Harris à la présidentielle américaine l’aurait fragilisé, autant un succès de Donald Trump lui donne “un net avantage”, analyse pour l’AFP Lukas Macek de l’Institut Jacques Delors.
Même mépris des élites et même haine de l’immigration : Viktor Orban soutient avec ferveur le Républicain depuis 2016. Au point de décliner son slogan pour les six mois de la présidence hongroise de l’UE, « Make Europe Great Again », inspiration directe de « Rendre sa grandeur à l’Amérique ».
Les deux alliés s’accordent sur l’urgence d’établir la paix en Ukraine, critiquent l’aide militaire à Kiev et partagent des affinités avec le président russe Vladimir Poutine.
“Si les Américains optent pour la paix” en choisissant Trump, “nous devrons nous adapter”, a prévenu le week-end dernier M. Orban, ajoutant que ce serait l’un des sujets de discussion du sommet.
Des rumeurs d’un appel vidéo avec l’ancien magnat des affaires circulent.
« Viktor Orban aime les flashs mais c’est difficile à organiser lors d’un sommet », réagit un diplomate européen. Il imagine plutôt un simple coup de fil entre les deux hommes après déjà deux entretiens cette année.
– « Apparences préservées » –
Depuis qu’il a pris la présidence tournante de l’UE en juillet, le leader nationaliste, resté proche du Kremlin, ne cesse d’irriter ses pairs qui critiquent ses « provocations ».
D’abord avec sa « mission de paix » à Moscou, décidée sans concertation, et plus récemment avec son voyage en Géorgie où il a salué des élections « libres et démocratiques » malgré les « irrégularités » signalées par Bruxelles et Washington.
M. Orban a également multiplié les attaques, accusant Bruxelles de vouloir le renverser pour installer « un gouvernement fantoche ».
L’ambiance ne sera sans doute pas très chaleureuse “mais en même temps, comme toujours dans ces circonstances, les apparences seront préservées”, souligne M. Macek.
Après le boycott sans précédent des commissaires européens et de certains ministres des réunions organisées à Budapest, les sommets de cette semaine devraient se dérouler sans de nombreux absents.
Ne pas venir serait une « mauvaise idée », selon le président du Conseil européen Charles Michel, appelant à « faire des remarques en personne » à Viktor Orban.
« De nombreux participants trouveront le moyen de faire entendre leurs désaccords », estime le politologue. « Leur patience s’épuise. »
A Bruxelles, un haut responsable confirme que « les dirigeants n’hésiteront pas à être francs et à s’expliquer » auprès du Premier ministre hongrois. Alors que « ne pas être présent reviendrait à laisser Orban dérouler son récit sans contradictions », murmure une Source diplomatique.
Mais d’autres tempèrent les enjeux. Loin des discours virulents de son leader, la Hongrie « s’en tient généralement au programme et à l’agenda » lorsqu’elle est responsable de l’organisation, affirme une autre Source, qui s’attend donc à un sommet classique. Si ce n’est pour son emplacement.