“Je ne me souviens d’aucune critique négative, ou je suis dans le déni”plaisante-t-elle. Et si quelques politiques parvenaient à retrouver certains éléments de la saison 1 ?trop manichéen”elle ne s’en soucie plus. “On ne se soucie pas de leur avis… Je ne m’attendais pas à une autre réaction de la part de certaines personnes… Ce n’est pas surprenant” confie l’actrice, également co-scénariste de ce thriller aux contours toujours plus psychologiques.
Le succès de Pandore dépasse largement les frontières de la Belgique. Preuve que les thématiques politiques et juridiques abordées par la série belge concernent les citoyens.
Comme La trêve et Ennemi public avant cela, la série avait connu un bon parcours à l’exportation. De quoi surprendre son trio de créatrices – Anne Coesens, Savina Dellicour et Vania Leturcq – face à la diversité des publics intéressés, aussi bien en Europe du Nord et du Sud qu’au Canada ou aux États-Unis…
« Quand on fait un film, on suit vraiment toutes les étapes, on est conscient de tout. C’est très différent de faire une série car ça nous échappe un peudétaille Vania Leturcq. Des gens nous ont dit que la série avait été vendue ou diffusée dans un certain pays. Quelqu’un fait un commentaire sur Instagram, ou nous recevons un e-mail des États-Unis disant “Je viens de regarder toute la série, c’était génial’ et nous sommes surpris. En tout cas, je n’ai pas l’impression d’avoir soudain compris que c’était une réussite. Les gens nous disent ‘c’est génial‘, mais c’est tout ce que nous savons… »
mouettePandora est la somme de ce que nous apportons tous les trois
“C’était une belle surprisepoursuit Savina Dellicour. On espérait évidemment que cette histoire, même si elle est ancrée en Belgique, aurait un côté universel. Lorsque nous l’avons écrit, nous nous sommes effectivement inspirés de l’actualité internationale. En 2016, lorsque le trio commence à écrire la saison 1, Trump et le Brexit secouent la scène internationale. “Nous nous demandions ce qui se passerait si cela se produisait en Belgique. C’est bien d’avoir la confirmation que ce problème de course aux élections – qui donne parfois l’impression que la politique manque de rigueur morale – est malheureusement quelque chose d’universel.» Et cela ressemble à une sorte de bataille de communication, comme le souligne la série. « C’est ce qui fait que, quand on en parle à l’étranger, les gens sont touchés. Même en France, le thème leur a semblé très d’actualité, même si la série est sortie bien plus tard qu’ici. Les critiques reçues l’année dernière disaient que le sujet était “au cœur de l’actualité”, alors qu’on craignait que la série ne soit plus tout à fait dans l’air du temps. Mais c’était toujours le cas, ou même plus. : certaines choses que nous avions écrites, que nous ne considérions pas tout à fait plausibles, se sont entre-temps concrétisées. C’est un phénomène que nous avons beaucoup observé et qui se produisait dans le monde. des nouvelles peu de temps après…
Un exemple parmi tant d’autres ? La récupération d’un fait divers dramatique, en l’occurrence un viol, par une personnalité politique. “C’était le cas de Giorgia Meloni, en Italie… Et cela s’est produit deux ans après qu’elle l’ait décrit dans la série.”
L’accueil de la saison 1 et l’actualité ont en partie guidé l’écriture de la saison 2.
« On avait le sentiment que ce qui marchait dans la saison 1, c’était de parler de choses qui nous touchaient, de plonger dans l’actualité, de s’imprégner de tout ce qui se passait.explique Vania Leturcq. Nous avons fait la même chose pour la saison 2 : non pas pour écrire pour les gens qui allaient voir la série, mais sur ce qui nous révolte, qui nous donne envie de passer autant de temps à écrire. On n’avait pas une idée précise de la saison 2 quand on a terminé la saison 1. Tout le monde se disait : ça pourrait être ça et, au final, ce n’était pas un des sujets qu’on avait imaginés. Parce que c’est un travail collectif. Pandore est la somme de ce que nous apportons tous les trois et de ce qui est créé lorsque nous le digérons ensemble.
mouetteLes lanceurs d’alerte se « guérissent » par l’action
“Mélanger l’actualité et le thème de la technologie, du hacking, du capitalisme de surveillance, reflétait les enjeux sociétaux que nous percevions autour de nous”précise Savina Dellicour.
Mais les trois auteurs n’y sont pas parvenus tout de suite. “On a réfléchi pendant 2-3 mois, on a réfléchi à plein de sujetsdétaille Vania Leturcq. Je ne vais pas évoquer des choses qu’on n’a pas écrites, comme dans la saison 1 d’ailleurs. À un moment donné, on a senti qu’une histoire se démarquait des autres, elle nous rassemblait et nous révoltait assez. Et nous nous sentions capables de travailler sur le sujet. Nous effectuons beaucoup de recherches pour Pandoreon rencontre beaucoup de monde et, parfois, la rencontre avec une personne s’avère décisive. Les figures des lanceurs d’alerte interrogés nous ont tellement touchés – nous n’allons pas citer leurs noms – que quelque chose est resté ancré en nous. On s’est dit qu’on voulait aller vers cette thématique-là.
Trouver des contacts dans ce milieu n’a pas forcément été évident au début…
« C’est là que le succès de la saison 1 a joué en notre faveur. Étonnamment, toutes les personnes que nous avons contactées avaient vu la saison 1 et étaient très positives à l’idée de nous rencontrer. La saison 1 nous a vraiment ouvert la porte pour rencontrer des gens et imaginer la saison 2. »
« Pour un lanceur d’alerte, le fait que sa parole serve sa cause est très importantsouligne Savina Dellicour. Parfois, ce sont des personnes qui se « guérissent » par leur action. Même si nous n’avons évidemment pas repris une seule histoire comme celle-ci, elle a nourri notre réflexion sur les enjeux sociétaux liés à la technologie.
mouetteCe courage des citoyens est extrêmement inspirant
« Une rencontre avec un lanceur d’alerte m’a vraiment marquéfaites confiance à Vania Leturcq. Nous étions dans son salon avec ses toutes petites filles, plus petites que mon fils. J’ai été choqué d’entendre tous les risques qu’elle avait pris, de voir dans quel état cela l’avait mise. Quand on lui a demandé : pourquoi tu fais ça ? Pourquoi ne choisissez-vous pas simplement le confort – vos deux enfants, votre relation, le calme et la tranquillité – elle nous a répondu : ‘J’aurais préféré prendre le risque de perdre mon emploi et bien d’autres choses, mais je ne peux pas offrir ce monde à mes filles. Cela m’a vraiment frappé que les gens soient encore animés par de vraies convictions et se disent : tant pis si je me casse les dents, tant pis si je souffre, car l’image générale – ce que nous donnons comme valeur au monde – est plus importante que ma propre valeur. confort. C’est même devenu une réplique de Claire dans la série”souligne le scénariste.
« Ce courage, parmi les citoyens, nous a beaucoup émuspoursuit Savina Dellicour. Nous sommes toujours à la recherche d’un petit moteur : ce qui nous donnera envie d’écrire et de respecter les délais. Ces moments sont extrêmement inspirants : les gens sont prêts à risquer leur sécurité pour dénoncer des choses injustes. C’est super rassurant.