Jonathan Gradit, Kevin Danso, Facundo Medina. Depuis trois ans, ce trio fait pleuvoir et (surtout) briller dans la défense lensoise. Mais en début de saison, un jeune fauteur de troubles originaire d’Asie centrale fait son apparition. Son nom ? Abdukodir Khusanov. Match après match, l’international ouzbek s’est fait une place dans le onze sang et or qu’il n’a jamais quitté malgré le retour de Danso après son transfert raté à la Roma.
Lorsqu’il arrive en Artois pour 100 000 euros à l’été 2023, Khusanov est un illustre inconnu. Il faut dire qu’avec sa tête régénérateur de football et son caractère taciturne, le défenseur né un 29 février passe facilement inaperçu. « C’est Kodir, il ne parle pas, mais il va bien », résumait son entraîneur Will Still en septembre dernier. « Il est très timide, explique Narzulla Saidullaev, journaliste au média sportif ouzbek Championat.asia. Quand il joue avec l’équipe nationale, on ne l’entend jamais. » Ce natif de Tachkent étudie au centre de formation FK Bunyodkor, un « Masia ouzbèke » partenaire du FC Barcelone. Il suit les traces de son père Hikmat Hashimov, ancien défenseur central du club et de l’équipe nationale.« Son père a toujours été son idole, déclare Murod Otajanov, entraîneur de Khusanov à Bunyodkor et ancien coéquipier de son père . Il lui a inculqué une discipline qui continue de le guider aujourd’hui. »
« Quand Abdukodir joue, des millions d’Ouzbeks regardent les matchs de Lens »
Le chemin n’a pas été simple pour « Kodir » qui, en 2022, est jugé trop petit et trop maigre par ses entraîneurs, le poussant à faire ses adieux à Bunyodkor. Il tente ensuite sa chance en Biélorussie, chez Energetik-BGU. “C’est là qu’il a vraiment décollé”juge Narzulla Saydullaev. Quelques mois après son arrivée à Minsk, il devient un titulaire indiscutable du club et remporte avec sa sélection la Coupe d’Asie U20. Ses performances n’échappent ni au CIES (qui le considère comme l’un des défenseurs centraux les plus prometteurs au monde) ni au RC Lens, qui s’attachent ses services pour une somme dérisoire.
En débarquant en Ligue 1, le défenseur de 19 ans porte les espoirs footballistiques de tout un pays : avec son compatriote Eldor Shomurodov (AS Roma), ils ne sont que deux Ouzbeks à disputer l’un des cinq grands championnats. La progression du jeune prodige est donc suivie de près par ses fans dans le pays. « QQuand Abdukodir joue,Des millions d’Ouzbeks regardent les matches de Lenss’enflamme Saidullaev. C’est le premier Ouzbek de l’histoire de la Ligue 1, donc nous sommes très fiers de lui. » Le compte Instagram du RC Lens est témoin de cette ferveur : chaque photo où apparaît Khusanov est plébiscitée par les fans ouzbeks, qui envahissent la section commentaires de leur drapeau bleu, blanc et vert.
Un peu plus d’un an après son arrivée sur la pointe des pieds en Artois, celui qui compte désormais seize capes chez les Loups Blancs intègre progressivement le collectif lensois. La barrière de la langue ne semble pas vraiment le freiner, le nouveau venu dans l’arrière-garde sang et or s’étant lié d’amitié avec l’Équatorien Jhoanner Chávez. “Je n’ai aucune idée de la manière dont ils communiquent” Will Still rit lors d’une conférence de presse. “Au début, avant que le club n’embauche un interprète, nous communiquions avec un traducteur sur mon téléphone, explique le principal impliqué dans une interview accordée aux médias ouzbeks. Frankowski parle un peu russe, ça aide aussi. » Pour sa première saison en France, il dispute quinze matches et goûte à la Ligue des Champions. Le jeune international laisse aussi une impression qu’il finira par confirmer : celle d’un joueur imposant.
Bien plus qu’un bourrin
Le malheur des uns fait le bonheur des autres. Cette saison, l’imbroglio entourant le transfert de Danso à la Roma permet à « Kodir » de s’imposer comme titulaire dans la charnière lensoise à trois. Même s’il est habile avec le ballon et possède un bon sens du positionnement, Khusanov impressionne avant tout par sa puissance physique. ” C’est un monstre, ce qu’il a encore fait ce soir… Il me fait peur », » s’est moqué Brice Samba après une énième prestation solide de son jeune coéquipier contre Nice (0-0).
Venant d’un pays où la lutte est une tradition séculaire, Khusanov semble taillé pour le duel. Quand Still le compare à un “machine de guerre”ses compatriotes vont plus loin.« En Ouzbékistan, on dit qu’être heurté par un train ou par Abdukodir, c’est la même chose »rit Narzulla Saydullaev. Un goût pour le face-à-face qui se reflète dans les stats : parmi les défenseurs centraux de Ligue 1, les Lensois ont le plus haut taux de réussite dans les duels (84,6%). Loin du cliché du défenseur bourrin, Khusanov développe différents aspects de son jeu. Ces dernières semaines, il s’est illustré par son apport offensif, avec deux tirs contre Saint-Étienne et une frappe non transformée d’Anass Zaroury contre le LOSC.
Ces prouesses ont des conséquences majeures pour le collectif artésien. Alors que depuis trois ans, Danso, Medina et Gradit vivent des jours heureux sans qu’aucun concurrent sérieux n’émerge, les trois amis ont désormais de quoi s’inquiéter. De quoi donner mal à la tête à Will Still : faut-il sacrifier l’un des membres du trio établi au profit de la jeune entreprise en pleine croissance ? Le Belgo-Britannique semble avoir choisi : face à l’ASSE, c’est Gradit qui a fait les frais de cette nouvelle compétition. Un choix qui semble logique, puisque” percer “ Blood and Gold semble avoir perdu sa capacité à pénétrer les lignes ennemies. Mais l’ancien entraîneur de Reims se cherche encore et semble prêt à tous les ajustements tactiques pour conserver le jeune Ouzbek dans le onze : une semaine plus tard, dans le derby contre le LOSC, combine toujours Gradit, Danso et Khusanov, reléguant Medina en sentinelle. rôle. Si l’Argentin s’est plutôt bien adapté à la découverte de son entraîneur, il est difficile d’imaginer cette tendance sur le long terme. Le choc de ce samedi contre le PSG aidera sans doute Will Still à trancher.
“Je n’avais jamais entendu une telle explication”, déclare Kevin Danso à propos de son transfert avorté à Rome
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