«J’ai besoin d’exister par moi-même».

«J’ai besoin d’exister par moi-même».
«J’ai besoin d’exister par moi-même».

Thomas Dutronc sort « Il n’est jamais trop tard », un nouvel album qui porte bien son nom puisque plus de 9 ans se sont écoulés depuis le précédent.

De sa mère Françoise Hardy, Thomas Dutronc a hérité d’une gentillesse et d’une élégance que l’on pourrait qualifier de modeste. De son papa Jacques Dutronc, il a reçu les codes du parfait playboy nonchalant et la paire de lunettes Ray-Ban Aviator qui vont avec. En tant que musicien, il se développe en revanche de manière autonome en apprenant les accords de guitare manouche dans les clubs de jazz parisiens. Après la tournée réunissant père et fils, l’album de reprises « Frenchy » enregistré avec une cohorte de stars (Iggy Pop, Diana Krall, Billy Gibbons de ZZ Top) et de longs moments intimes passés au chevet de Françoise Hardy, il revient avec le très joli « Il n’est jamais trop tard », premier album de chansons originales depuis « Éternels, jusqu’à demain » (2015).

Rire réparateur

Alors, il n’est jamais trop tard pour quoi ? Aimer, pardonner, profiter de sa liberté et bien d’autres choses encore. C’est le message de ces titres écrits ces neuf dernières années avec son vieil ami David Chiron. Thomas Dutronc, 51 ans, énumère les joies simples du quotidien, évoque les amitiés indéfectibles, revient avec des paroles sobres sur les ruptures qui blessent et les rires réparateurs. Chanson française survoltée aux ondes positives qui se démarque par sa richesse instrumentale. Et non, vous n’y trouverez pas d’hommage à Françoise Hardy. »Le record a été construit avant sa mort. J’avais besoin de créer mon propre espace, avec silence, oxygène et liberté.« Quand on vous parlait de pudeur…

Prendre neuf ans pour écrire un nouvel album permet aussi de voir si les chansons vieillissent bien et tiennent le coup ?

THOMAS DUTRONC – Le vrai déclic, c’est qu’après avoir pris autant de plaisir à réaliser tous ces side-projects, j’ai eu envie de remonter sur scène avec mes propres chansons. Pour les plus grands, on peut effectivement prendre du recul, réécrire des couplets, enrichir avec un solo de guitare… On est forcément moins pressés. J’ai également ajouté deux chansons récentes, Katmandou et Marie-Lou. Ils sont plus légers, plus comiques. Je ne voulais pas non plus être trop sérieux.

Il n’y a aucune critique sociale, aucune négativité dans cet album. C’est rare de nos jours, non ?

En Belgique, je pense qu’on garde encore son humour pour surmonter tout ça. Mais en , c’est fini. Personne ne peut plus être dupe. La gauche déteste la droite, la droite déteste la gauche, les ethnies et les classes sociales se détestent. Ce ne sont plus seulement des insultes, ce sont des coups. C’est très violent. Même dans les médias, il n’y a plus de place au débat ni à la nuance. Alors en tant qu’artiste, vous pouvez vous donner le droit d’échapper à cette réalité et de faire des chansons qui vous rappellent des valeurs stupides mais qui font du bien.

On parle beaucoup d’amitié dans vos chansons. En fin de compte, votre meilleure amie est votre guitare ?

Bien sûr, avoir de la musique dans sa vie est une formidable opportunité. Lorsque vous êtes perdu, vous pouvez vous accrocher à la guitare et vous échapper. Je ne vais pas dire que je suis comme Paco de Lucia qui avait besoin de vivre face à la mer pour en jouer, mais quand même… Avec le temps, je me rends compte que j’aime prendre la guitare quand je suis dans la nature, un un peu de calme, et je me mets à “dialogue» avec elle. Ils disent “jouer d’un instrument». C’est vrai, il y a quelque chose de ludique et j’en ai besoin. C’est un bon médicament.

Thomas Dutronc – album « Il n’est jamais trop tard »

Vous produisez-vous encore sous un faux nom dans les clubs de jazz, juste pour le plaisir ?

Oui, cela me permet de tester mes capacités de musicien et de me rappeler pourquoi je fais ce métier. Jouez un standard de blues de 10 minutes, réapprenez les grilles Mais pas pour moi par Chet Baker, un jam entre amis… Putain, c’est beau ! Il n’y a aucun problème. Je me sens moins »surveillé». Je peux aussi introduire de tels moments dans mes concerts, mais c’est plus compliqué.

Qu’avez-vous appris lors de la tournée Dutronc & Dutronc ?

J’étais musicien mais aussi chef d’orchestre. J’ai dû apprendre à gérer la personnalité de chacun, y compris celle de mon père. C’est aussi la première fois que je joue dans de très grandes salles. J’ai eu autant de plaisir à jouer les chansons très rock and roll de mon père qu’à monter sur scène avec lui avec mon propre répertoire. En fin de compte, cette tournée a fait de moi un meilleur chanteur et un meilleur musicien. En tant que fils, c’était la joie de passer encore plus de temps ensemble.

Vous nous avez dit que vous aviez écrit des chansons que l’on retrouverait sur un nouvel album de votre père. Et ça ?

Il y a des chansons qui lui iraient très bien, mais je veux que ça vienne de lui. Ce serait très beau, mais je ne veux plus forcer. Là, j’existerai par moi-même.

7/5, Théâtre Royal, Mons.

Thomas Dutronc Il n’est jamais trop tard Universal

 
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