L’ancien président américain Jimmy Carter fête ce mardi son 100e anniversairee anniversaire. Une occasion idéale de revenir sur son héritage, dont il faudrait s’inspirer, explique Martine St-Victor.
Publié à 00h42
Mis à jour à 6h00
” Qu’est-ce que c’est ? m’a demandé une connaissance en désignant les mots « Carter/Mondale 76 » écrits sur le t-shirt que je portais. Elle est d’une autre génération et ne s’intéresse pas particulièrement à la politique américaine.
Je lui ai donc pardonné de ne pas avoir reconnu, dans ce vêtement ancien, un clin d’œil à la campagne, il y a près de 50 ans, du président Jimmy Carter et de son colistier Walter Mondale.
Mais au-delà de ce bout de coton, comment parler du doyen des anciens présidents des Etats-Unis, qui fête ses 100 ans ?e anniversaire ce 1est octobre ?
Pour expliquer Jimmy Carter, on ne pouvait évidemment parler que de son idéologie politique. Mais on peut aussi avoir le courage de parler d’amour. Entre autres choses, la plus grande de sa vie, celle qu’il a vécue avec son épouse Rosalynn, décédée en novembre dernier, après 77 ans de mariage.
Dans les pages du livre Ce qui fait durer un mariage : 40 couples célèbres partagent avec nous les secrets d’une vie heureuseLe président Carter raconte que lors des disputes avec Rosalynn, il prenait toujours l’initiative de la réconciliation parce qu’il savait que toute histoire avait deux côtés et, parfois, il avait tort. C’est cette approche basée sur l’amour qui semble avoir inspiré Carter tout au long de sa carrière.
Musique, maestro !
Le soutien des célébrités en politique n’a rien de nouveau. Bien avant Taylor Swift pour Kamala Harris, il y a eu – notamment – Bob Dylan, Willie Nelson et Dizzy Gillespie pour Jimmy Carter, lorsque celui qui était gouverneur de Géorgie a décidé de se présenter à la Maison Blanche.
La musique a permis à Jimmy Carter de jeter des ponts entre démocrates et républicains et de réconcilier les opposants idéologiques, ne serait-ce que le temps d’une chanson.
Son amour pour le gospel – musique qui l’a vu grandir –, la country et le jazz feront de ses soirées sur la pelouse de la Maison Blanche de beaux exemples d’intégration, dans un pays où ce n’était pas encore la norme. Les musiciens noirs partageaient partitions et couplets avec leurs contemporains blancs devant des invités de diverses communautés qui, en dehors de ce lieu de rencontre unique, ne se sont probablement jamais croisés.
Ces efforts de rapprochement n’est pas sans rappeler ceux qui ont permis la promesse de la plus grande des réconciliations. En 1978, Jimmy Carter est l’architecte des accords de Camp David entre le président égyptien Anouar Sadate et le Premier ministre israélien Menachem Begin, fruit d’une médiation visant à tracer la voie vers la paix au Moyen-Orient. -Est.
Mais le premier exercice de sensibilisation de Jimmy Carter en tant que président des États-Unis sera celui qui deviendra le plus apolitique, adopté à la fois par les démocrates et les républicains. Le jour de son investiture, en 1977, Jimmy Carter marchait depuis le Capitole, où il prêtait serment, jusqu’à la Maison Blanche, une première. Depuis, cette marche est devenue une tradition, emblématique de la volonté d’être accessible aux électeurs.
Carter, précurseur
Jimmy Carter a toujours pratiqué le leadership empathique, bien avant que cette expression ne devienne le sujet de nombreuses conférences et podcasts sur l’entrepreneuriat. Ce qu’il a démontré tout au long de sa vie publique était une grande intelligence émotionnelle, des décennies avant que ce principe ne transcende le monde de la psychologie.
Carter est un poète, un ingénieur, un lieutenant de marine et surtout un homme de paix.
À la tête d’un pays dont les cicatrices de nombreuses interventions militaires n’étaient pas encore cicatrisées, Jimmy Carter – prix Nobel de la paix en 2002 – a réussi à ne pas larguer une seule bombe ni lancer un seul missile durant sa présidence.
Il a également négocié la libération de 52 Américains pris en otage à Téhéran même si les images donnent la fausse impression que son successeur Ronald Reagan est le héros de cette histoire.
L’amour et le bien-être de son prochain resteront le fil conducteur de Jimmy Carter et donneront le ton de sa vie post-présidentielle et de ses œuvres humanitaires, une Source d’inspiration pour presque tous les présidents américains qui l’ont suivi.
Mais son style, loin de toute flamboyance, plairait-il aux électeurs d’aujourd’hui ? Jimmy Carter aurait-il survécu à ce qui peut ressembler à un manque de charisme et aux primaires démocrates en route vers la Maison Blanche ?
Peut-être sommes-nous au contraire prêts à renouer avec le style Carter et à tourner le dos à l’exubérance, aux escapades et à la fanfaronnade ?
En début d’année, le nouveau Premier ministre britannique, Keir Starmer, a détaillé ses objectifs dans un discours inaugural dénué de toute envolée lyrique. Il a promis d’œuvrer pour restaurer le respect en politique et mettre fin aux performances politiques tonitruantes, tout en mettant fin à la fracture qui existe dans son pays. C’est une ordonnance que j’espérais voir d’autres dirigeants adopter.
En annonçant son projet, de la voix la plus calme et loin des tambours et des trompettes, Keir Starmer a-t-il démontré une certaine influence de Carter ?
Faire le point
Quels sont les indicateurs utilisés pour déterminer le succès d’une présidence ? Est-ce là l’état de l’économie ? L’évolution du taux de criminalité ? Sous Jimmy Carter, les États-Unis ont notamment connu un taux d’inflation élevé, accompagné d’une flambée du prix de l’essence.
Jimmy Carter n’a pas été réélu, ce qui pourrait donner l’impression d’un échec. Pourtant, en regardant en arrière, nous voyons à quel point ses convictions et ses engagements ainsi que son riche héritage de non-violence, d’inclusion, de compassion et de dévouement au service public et aux droits civiques se sont infiltrés. C’est peut-être avec ce genre de paramètres qu’il faudra un jour juger le mandat unique de quatre ans de Joe Biden.
Selon les mots de Marilyn Monroe : « Joyeux anniversaire, Monsieur le Président » et merci pour tout.
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