Le graphisme, ou design graphique, également appelé graffiti, est l’art de concevoir et d’organiser des éléments visuels, tels que des images, des textes, des formes et des couleurs généralement sur les murs ou le trottoir. La démarche vise à faire passer un message ou à provoquer une émotion. Aujourd’hui, ce métier est exercé par quelques jeunes de Conakry, avec de nombreuses difficultés. Dans un entretien avec un journaliste de Guineematin.com, Abdourahmane Bangoura, graphiste professionnel depuis de nombreuses années, a expliqué que cet art est synonyme d’engagement. Il est également revenu sur les difficultés que connaît le secteur et a dénoncé le manque d’intérêt qu’il suscite malgré son caractère engagé.
Abdouramane Bangoura, graphiste, est revenu sur les origines et le sens de ce métier.
« Le graphisme est né dans les années 1980 aux États-Unis et en France. C’était une forme d’expression urbaine née en même temps que le Rap. Le graphisme est un art que les gens de la rue utilisent pour transmettre des messages. Le graffiti est un art qui consiste à désigner sur le mur, notamment sur les murs où il est interdit de le faire ; c’est une marque de révolte. Je fais ce métier par passion. A un moment donné, j’ai fréquenté le monde du Hip Hop, et j’ai vu que dans ce milieu, si j’ai un rôle à jouer, c’est celui de désigner, puisque je savais déjà désigner, je me suis lancé dans le graphisme vers les années 1996- 1997. Et à l’époque, nous le faisions avec des stylos, des crayons, etc. Le graphisme n’était pas aussi populaire, c’était à une époque où les pays n’étaient pas complètement ouverts à l’Occident, les jeunes n’avaient pas accès aux magazines où ils pouvaient voir de jeunes artistes pour être mieux inspirés. Voilà donc les difficultés que nous avons traversées. Je réalise mes œuvres à 300 000 GNF, ou plus ou moins, car cela dépend de l’œuvre à désigner », a expliqué notre interlocuteur.
Par ailleurs, Abdourahmane Bangoura a énuméré les difficultés qu’ils rencontrent dans cet art avant de prodiguer des conseils aux jeunes. « Il y a plusieurs difficultés. Le tout premier est l’acquisition des matériaux qui pose problème, car les peintures de bôme sont ici excessivement chères. Un artiste sur dix est en mesure de financer une création graphique. Le graffiti en général, on ne le fait pas pour un gain financier, on le fait pour une expression personnelle. Deuxièmement, trouvez les emplacements disponibles pour pouvoir réaliser votre art. Cette liberté qu’ont les autres jeunes de l’autre côté est un peu absente chez nous. D’ailleurs, dans notre pays, j’ai remarqué qu’aujourd’hui les jeunes transforment leur graffiti en business, même si le graffiti n’est pas commercial. Elle a été créée uniquement pour défendre les causes et les intérêts des enfants des rues. C’est donc pour vous dire qu’il vise à faire passer un message et en même temps à interpeller les autorités. Mais, je dirais qu’ils ont raison, car ce n’est pas facile pour eux de venir faire du graffiti juste pour une simple exaltation de l’âme, dans la mesure où ce sont des matériaux excessivement chers pour les artistes africains. . Et à vouloir débourser une grosse somme rien que pour se faire plaisir, on connaît le niveau de vie de chacun ici, donc ce ne serait pas facile. Tous ces freins empêchent les jeunes d’évoluer dans le contexte réel du graffiti. Je faisais du graffiti et je le fais encore parfois et les œuvres que vous voyez sur le mur ici dans le couloir du marché (Sanoyah) sont de moi. Par exemple, j’ai réalisé cette image de Navigator pour présenter mes condoléances à la jeunesse guinéenne et pour leur rendre hommage. Je suis toujours dans le métier, mais il n’existe aucune structure intéressée par le graffiti en Guinée, même les rappeurs. Et c’est décevant. Je dirais à la nouvelle génération de se lancer, mais surtout de parler de son combat. Parce que celui qui fait des graffitis est un rebelle, il n’est pas là pour plaire à quelqu’un, mais pour défendre sa cause, sa situation à travers ses œuvres », a-t-il suggéré.
Fatoumata Diouldé Diallo for Guineematin.com