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À Valence, une goutte froide qui fait déborder la patience

À Valence, une goutte froide qui fait déborder la patience
À Valence, une goutte froide qui fait déborder la patience
Un tsunami terrestre ?

Ce n’est plus une goutte froide, c’est une douche glacée et, autant le dire tout de suite, tous les modèles de ville pour 2050, voire 2030 – les écoquartiers biosourcés par exemple, fièrement brandis pour masquer l’impuissance et l’incompétence – sont déjà obsolète.

En 2021, un « goutte froide » – la possibilité pour les non-spécialistes d’apprendre le mot – avait déjà fortement refroidi l’Allemagne de l’Ouest et le Benelux. Cela nous a seulement donné la mesure de ce qui nous attend. En effet, cette gouttelette n’était rien comparée à la lame qui a dévasté la région de Valence, au sud-est de l’Espagne, le 29 octobre 2024. Il est tombé autant de pluie en un jour qu’en un an. Aucun bâtiment, même s’il est fabriqué à partir de matériaux recyclés, aucune ville, même si elle est remplie d’écoquartiers, ne peut résister à une vague furieuse de deux mètres de haut. Un tsunami terrestre en somme !

Sans même parler des plus de deux cents morts, victimes d’une fin horrible – étouffés par la boue ! – et des centaines de disparus, mentionnons le coût incalculable à ce jour de la catastrophe puisque c’est toujours en termes financiers que les pouvoirs en place parlent d’écologie. Ce qui est sûr, c’est qu’en Espagne, le coût de l’inaction fera exploser les tableaux Excel des conseillers bien habillés et affolera les agences de notation, en particulier celles dont les actionnaires possèdent – ​​possédaient – ​​une maison sur les collines. de la région de Valence. Qu’est-ce qu’ils n’ont pas prescrit depuis trente ans ?

La réalité est que, au moins depuis Al Gore, pour ceux qui se souviennent de cette Cassandra – prix Nobel de la paix en 2007 et candidate malheureuse à la présidence américaine battue de peu en 2000 par George Bush fils – tous les dirigeants de tous les pays, à moins qu’ils ne se substituent à eux. bêtise pour cynisme, sachez sans illusion l’ampleur de la catastrophe qui nous attend. Pourtant, de la COP 15 à Paris à la COP 29 à Bakou (du 11 au 22 novembre 2024), sauf au Costa Rica, avez-vous vu la différence ?

En 2024, face aux ravages en Espagne, le gouvernement français feint de paniquer – cela ne fait que dix ans que l’ex-Jupiter vulcain est au pouvoir – et « fixe de nouveaux objectifs pour réduire les émissions de gaz à effet de serre « . Celui-là même qui a inventé le concept d’écoterrorisme ! Le mondedans un éditorial comme d’habitude plein de nuances (11/02/2024), pour ne pas dire trop prudent, invite à nouveau « la nécessité de s’adapter et de protéger « . Certes, mais aucune adaptation n’est possible face à un mur de boue de deux mètres de haut qui dévale la colline.

Il est vrai que tant que des îles exotiques s’enfonçaient seules, hors des yeux, loin des esprits, l’heure de l’adaptation semblait prometteuse ! Souvenez-vous de la farce du réchauffement contrôlé à 1,5°.

Bienvenue dans le nouveau monde réel. Imaginez maintenant la même goutte de froid au-dessus de Paris et que, comme ce qui s’est passé à Valence, il pleuve sur la région capitale en un jour autant qu’en un an, voire six mois. Il faut imaginer à quoi ressemblerait Paris au pied de la Butte Montmartre ou Ménilmontant, et de Meudon et de toutes les villes situées sur les bords de Seine ; on pourrait traverser le fleuve à sec en sautant par-dessus la pyramide des voitures, des volontaires par milliers pour nettoyer les couloirs du métro ou les réserves des musées parisiens ! Inimaginable? En 2021 une goutte froide en Allemagne et au Benelux, en 2024 en Espagne à Valence : en 2026 à Paris, en pleine diagonale ?

La bonne nouvelle, c’est que plus personne n’est épargné et, pour les survivalistes les plus favorisés, puisque pour Mars c’est usé, ce sera très drôle pour eux. Imaginez la fondation Vuitton emportée avec le jardin d’acclimatation par des vagues furieuses. On verrait alors si ça vole… Et Elon Musk qui fait construire une villa à San Cassiano, un resort de luxe dans les Alpes italiennes du Trentin-Haut-Adige, un immeuble de cinq étages de 800 m² qui comptera » 15 chambres et 15 salles de bains, un grand salon, une cave à vin et un spa souterrain » (JDN 3/01/2024). Que se passe-t-il si la montagne entière disparaît dans la vallée, emmenant avec elle ses enfants numérotés en abattis ? Donald Trump ne lui sera alors d’aucune utilité.

En d’autres termes, alors que même les plus riches sont contraints d’envisager le pire, l’heure n’est plus à la facilité d’adaptation qui permet aux pouvoirs en place et à leurs copains industriels d’essayer de préserver la chèvre et le chou et aux bonnes gens de continuer croire que ça n’arrive qu’aux autres. Maintenant que cela s’est produit une fois à Valence, cela va se reproduire, ce n’est qu’une question de temps, ce n’est pas comme si la Méditerranée allait se rafraîchir… Et alors ? Reconstruire comme avant ? Une fois ? Deux fois…

Et une goutte froide sur l’EPR de Flamanville, que se passe-t-il ? Qu’on se rassure, avec la montée du niveau de la mer, la a un plan Canadair ! Quelqu’un sait encore comment construire des hydravions ? Les Hauts-de-France prennent…

En effet, à l’heure où j’écris ces lignes, la véritable préoccupation est celle des effets de seuil, comme la goutte (froide) qui fait déborder le vase de l’anxiété. On constate déjà de nos propres yeux les dégâts à +1,5° (selon la police). Que se passera-t-il à +1,8°, des grêlons de la taille d’une orange ? A +2,1°, des grêlons de la taille d’une pastèque ? Et Christophe Béchu, ancien ministre de l’Ecologie qui évoque une France à +4°.* Des grêlons de la taille d’une Clio ?

Il est indéniable que plus le temps passe, plus chaque centième d’augmentation de la température de la planète entraîne des menaces aux conséquences de plus en plus dévastatrices. Ce sont les effets de seuil qui énervent vraiment les scientifiques du GIEC. Et que dire à ceux qui vont prendre une douche ou avoir un coup de soleil demain ? Leur envoyer nos condoléances ? Des bouées ?

Plus précisément, pour en revenir à la politique et à l’architecture, c’est désormais une nouvelle géographie à très grande échelle qui est en cause, qui nécessitera par essence de grands travaux afin de répondre aux nouveaux impératifs urbains et architecturaux. . En d’autres termes, un nouveau paradigme est déjà à l’œuvre et nous disposons désormais de très peu de temps pour résoudre de multiples équations à plusieurs inconnues. Pour ceux qui doutent, recalculez les coûts de l’inaction à Valence…

Ce qu’il faut faire? Créer des villes souterraines comme dans Dune se protéger du cagnard et développer les troglodytes de Saumur ? Créer des maisons en pisé en béton armé pour résister quels que soient les éléments ? Retrouvez l’urbanisme de la ville basse fait de ruelles protégées du soleil et sans voitures à s’entasser en bas de la rue en cas de manifestation cévenole ? Surélever des banlieues entières pour faire face aux inondations ?

Parlons du déluge ! Des solutions existent, c’est la volonté politique qui manque. Cela est abondamment démontré dans nos chroniques de la catastrophe annoncée**, par l’architecte Eric Daniel-Lacombe. Un autre exemple, pour ne froisser personne ici en Gaule, est celui de la ville de Chicago. Pour faire face aux inondations du lac Michigan, la décision fut prise en 1856 de surélever la ville de deux mètres ; toute la ville ! Ce qui fut fait. Un réseau logistique souterrain a été créé – Wacker Drive – et trente « blocs » à l’ouest de la 22e rue, tous les anciens rez-de-chaussée sont encore aujourd’hui des sous-sols, les potagers étant en dessous du niveau du lac.

Il est donc possible d’imaginer une action politique décisive. Mais cela fait sans aucun doute trop d’honneur à notre peuple, à nos hommes politiques. Prenez par exemple le ministère de la Culture, doté d’une vision prospective et à la tête de ce combat exaltant ! Cependant, pour penser dans 50 ou 100 ans, qui de mieux que les architectes ? Ah oui, combien d’hommes et de femmes d’art parmi les ministres et vice-ministres dont tout l’horizon de l’intérêt général s’arrête aux prochaines élections ?

En tout cas, les pouvoirs en place, pusillanimes et tellement soucieux de leurs propres intérêts, peuvent désormais réfléchir à la manière dont ils ont été accueillis à Valence ; même le roi fut hué et contraint de rebrousser chemin. Bonjour Don Quichotte ! À l’heure où ils se sentent désolés pour les Ibères, cela en dit long sur la douche écossaise qui attend désormais nos politiques à la moindre nouvelle catastrophe non naturelle. D’autant plus que le pays tout entier se retrouvera bientôt dans une situation de catastrophe non naturelle.

A à un moment donné, au plus tard lorsque les actionnaires de l’assurance commencent à se jeter du haut de leurs immeubles à New York, à La Défense ou au VIIIee Paris, nos dirigeants, ceux d’aujourd’hui – votant le budget du pays par exemple – comme ceux d’hier et d’avant-hier ne pourront plus se cacher. Cependant, qu’elle soit justifiée ou non, la colère est déjà grande, en Espagne au bord du régicide. En France, on sait faire…

Mais bon, ce sera trop tard.

Christophe Leray

* France + 6°. Plans pour Vulcain ex-Jupiter
** Lisez les Chroniques du désastre annoncé d’Éric Daniel-Lacombe

 
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