à Rion-des-Landes, ses amis d’enfance et amis rugbymen se souviennent

CCe matin, Rion et les Landes pleurent Maïté. Le célèbre cuisinier est décédé à l’âge de 86 ans, dans la nuit du vendredi 20 au samedi 21 décembre 2024. Et il n’y a qu’à regarder les messages d’hommage laissés sur les réseaux sociaux – du plus anonyme des Gascons au Président. de la République – pour se rendre compte que sa disparition provoque une certaine nostalgie. Celui d’un passé révolu, d’un monde antique, qui plonge chacun dans sa jeunesse, comme un réconfort nécessaire au malaise ambiant.

Maïté a parlé de cette vie dans son autobiographie « Tout est simple », publiée en 1998 chez Robert-Laffont. Mais aujourd’hui, « Sud Ouest » est revenu sur ses traces, à Rion-des-Landes, et a retrouvé certains témoins de son enfance et de sa jeunesse, celle d’avant la télévision (1).

En sabots sur le chemin de l’école

Ils s’appellent Janine (il y en a même deux), Françoise, Pierre et François. Tous les cinq ont connu Maïté à différentes périodes de sa vie. Les trois premiers ont côtoyé les mêmes salles de classe de l’école locale. « Elle est née le 2 juin 1938 à Pérote, métairie du quartier de Cournaou. Elle était la troisième d’une famille de sept enfants, se souvient Janette Lamarque. Sa maison était située à environ 5 kilomètres de la ville, elle se rendait donc à l’école à pied. Et en sabots. Les jours de chance, son père Pierrot venait avec les mules et emmenait les enfants qu’il avait récupérés en chemin”, ajoute celle qui est également correspondante du journal “Sud Ouest”.


Friends of Maïté Ordonez in Rion-des-Landes.

Philippe Salvat / SO

A l’intérieur de la classe, Maïté n’est pas passée inaperçue. C’est cette forte impression que ses camarades gardent en tête. « Physiquement déjà. Parce que c’était le plus grand de tous. Partant du principe qu’il fallait mettre les petits devant et les plus grands derrière, la prof l’avait placée derrière”, se souvient Françoise Lalanne, 85 ans, ancienne couturière et préparatrice en pharmacie entre Rion et Tartas.

« Je me sentais désolé pour les autres enfants qui étaient obligés d’apprendre l’orthographe et le calcul, la géographie, l’histoire, la grammaire… »

«Quand elle était petite, elle avait déjà la parole libre», s’amuse Janine Macque, ancienne gouvernante et nounou, qui a eu une vie communautaire tout aussi riche, avec trente années passées au Secours catholique et aux Restos du coeur. « Elle plaisait à tout le monde et était plutôt distraite en classe. Je pense qu’elle n’aimait pas beaucoup l’école», ajoute l’octogénaire.


Une nouvelle photo, du - de « la commune ». Maïté Ordonez est ici au dernier rang, au milieu.

Reproduction Philippe Salvat / SO

En effet, dans ses mémoires, Maïté revient longuement sur cette période : « J’ai maintenu jusqu’au bout ce refus obstiné d’étudier. Bizarrement, je n’ai même pas de souvenir de la grande école, celle de Mmoi Bétis. Et pourtant, tout le monde m’assure que j’y suis allé. Mais c’était une telle punition pour moi… J’avais pitié des autres enfants qui étaient obligés d’apprendre l’orthographe et le calcul, la géographie, l’histoire, la grammaire, toutes ces choses à savoir par cœur, enfermés toute la journée. Tandis que dehors… Dehors, il y avait la forêt, le ruisseau, les sentiers dans les fougères, les petits oiseaux à retrouver. » Ce chapitre du livre s’intitule également « Trop d’école ». Tout un programme.

Chant et théâtre

Mais Maïté avait plus d’une corde à son arc. Et si la jeune fille n’a pas brillé à l’école, de son propre aveu, elle a montré un visage insoupçonné à l’aube des années 1950. « Nous allions à l’église tous les dimanches après-midi pour la chorale paroissiale avec le Père Brèthes. C’est là que nous avons découvert la vraie Maïté. Elle avait une très belle voix et une sacrée poitrine. Sa voix était portée, c’était une alto, je pense», se souvient Janette Lamarque.

En 1953, la clique est sélectionnée au concours national musical de Clermont-Ferrand. « Nous étions hébergés chez les religieuses. C’était une aventure pour nous. Nous avions 12 ou 13 ans et nous n’avions jamais quitté Rion », raconte Françoise. « Il y a quelques mois, à la maison de retraite, elle chantait encore des chansons. ”La Dacquoise”, elle ne l’a jamais oubliée. Et pas mal de chants religieux aussi comme « Estela de la mar » », poursuit Janette.


Maïté à l’époque de la chorale de l’Abbé Brèthes. Ici, au quatrième rang, à droite, juste à côté de l’homme à la veste.

Reproduction Philippe Salvat / SO

C’est ce même abbé Brèthes qui l’initie aux joies du théâtre. A Rion, il y avait deux représentations par an. « L’essentiel était de faire rire les gens. Il n’y avait pas beaucoup d’autres distractions à l’époque. Et Maïté savait faire rire. Pour jouer avec elle, il fallait être fort. Elle ne se souvenait plus des textes, alors elle a improvisé. Il fallait donc bien connaître les rôles pour s’adapter à son rôle. Et elle n’a pas écouté le souffleur », rit encore Janette.

C’est dans ce milieu que Marie-Thérèse Badet – son nom de jeune fille – va rencontrer un certain Pierre Ordonez. Il travaillait à la SNCF et jouait au rugby. Ils se marient et une nouvelle vie commence pour Maïté.

A table avec les ouvriers et les rugbymen

Une carrière à la SNCF. Vingt-trois ans au bord des pistes. Si l’histoire est connue de nombreux Landais, elle reste encore confidentielle pour le reste de la . C’est pourtant là que la vie de Maïté va peu à peu prendre un nouveau départ. « Mon conte de fées n’a commencé que lorsque j’avais cinquante ans », se souvient-elle dans son livre.

« Elle était une « tutrice » ou un avertissement si vous préférez. Équipée d’un petit klaxon, elle assurait la sécurité des ouvriers qui travaillaient sur les rails dès l’arrivée d’un train. Un métier pénible, hiver comme été, au bord des voies ferrées. C’est là, entre deux trains, qu’elle préparait la cuisine des ouvriers », se souvient Françoise. Que préparait-elle pour eux ? « On ne s’en souvient plus, mais je sais qu’ils ont bien mangé. Son mari allait bien », rient des amis d’enfance.

Maïté, tout sourire, posant avec l'équipe de rugby de Rion-des-Landes.


Maïté, tout sourire, posant avec l’équipe de rugby de Rion-des-Landes.

Reproduction Philippe Salvat / SO

Ce sont ces repas pour les ouvriers qui l’amèneront, au fil du -, au rugby club de Rion-des-Landes. « Le siège social a été construit au début des années 1980. Et nous avons immédiatement fait aménager les cuisines. C’est Gilbert Lassalle, un des anciens présidents, qui a eu l’idée de la faire venir pour préparer les repas du troisième semestre”, se souviennent Pierre Cabannes et François Léglise, 78 et 76 ans, deux anciens dirigeants.

Caméras FR3

Et pour ces gars forts, il fallait quelque chose de revigorant. Garbure, tourin aux tomates, omelettes aux champignons, carcasses de canard persillées et « toujours fromage et dessert ». Maïté en parle dans son livre « C’est bien simple » : « Quand ils gagnent, les supporters leur proposent des bouteilles et il faut les vider. Alors la nourriture, il ne faut pas leur en promettre, bon sang, il faut éponger après tout ce qu’on a bu. Le rugby, ce n’est pas un sport comme les autres, c’est dur, des hommes qui boivent, qui mangent, des hommes forts. Ce n’est pas le même sport que le football, plus doux, moins physique. »

Maïté au micro lors d'une troisième mi-- au club de rugby.


Maïté au micro lors d’une troisième mi-- au club de rugby.

Reproduction Philippe Salvat / SO

« En principe, à notre retour, nous n’avions plus très faim. Et je n’ai plus soif aussi. Au départ, il y avait les 15 joueurs et les managers. Et puis, petit à petit, les femmes des joueurs sont arrivées. Au final, nous étions une soixantaine à table. Et tout s’est terminé autour de chansons dans lesquelles Maïté tenait une grande part », sourit François.

En 1983, le club Rionnais atteint la finale du championnat de France de rugby. La ville est en ébullition. Les caméras FR3 arrivent pour un reportage. Une voix se fait entendre au milieu du brouhaha ambiant. Maïté chante. “Qui est cette fille?” », demande le réalisateur Franck Bellot. « Je ne le savais pas encore, confie Maïté dans ses mémoires, mais il cherchait un cuisinier pour animer une émission culinaire familiale et régionale. » Mais c’est une autre histoire…

(1) Ce rapport a été réalisé début 2024, dans le cadre d’un rapport que nous préparions sur Maïté.

 
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