TF1, Télévisions, M6 et plusieurs organismes s’unissent pour défendre les médias audiovisuels

TF1, Télévisions, M6 et plusieurs organismes s’unissent pour défendre les médias audiovisuels
TF1, France Télévisions, M6 et plusieurs organismes s’unissent pour défendre les médias audiovisuels

Sur fond de concurrence des plateformes, grandes chaînes et principaux organismes du secteur créent une association pour défendre l’industrie audiovisuelle française. Coup de pub ou futur outil de lobbying ?

Derrière l’association LaFA (La Filière audiovisuelle), un parfum d’union sacrée entre les grandes chaînes de télévision françaises ? Photo Lucie Cosnier/TF1

By François Rousseaux

Publié le 13 novembre 2024 à 17h26

Mis à jour le 13 novembre 2024 à 17h34

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« Pour le groupe M6 de venir ici, c’est un moment solennel ! », s’est exclamé, ironiquement, Guillaume Charles, directeur des antennes et des contenus du groupe M6, alors qu’il s’exprimait mercredi matin dans le vaste auditorium de TF1, le rival historique. La situation pourrait-elle être aussi grave pour les chaînes françaises ? On a même vu Delphine Ernotte, présidente du groupe public Télévisions, prendre la parole au pupitre orné du sigle « TF1 ». Un parfum d’union sacrée entre groupes privés et publics flottait le 13 novembre lors de la conférence de presse consacrée au lancement d’une nouvelle association audiovisuelle, où les ennemis d’hier ont affiché un front commun inédit. « Dynamique consensuelle et collective », « projet offensif », « union des bonnes volontés » : rarement a-t-on vu les poids lourds du PAF utiliser un vocabulaire que la crise ne renierait pas au Premier ministre Michel Barnier.

Sur fond d’incertitudes sur le financement de l’audiovisuel public, d’hyper concurrence avec les grands médias comme YouTube ou Netflix, les dirigeants de TF1, France Télévisions, M6, accompagnés des syndicats de producteurs (SPI, Uspa, AnimFrance) et des principales organisations (Sacem , SACD, Scam, Adami) ont officiellement donné naissance à une nouvelle association baptisée La Filière audiovisuelle (LaFA). Présidé depuis deux ans par Rodolphe Belmer, PDG de TF1 et initiateur du projet, et alors que Delphine Ernotte est l’une des vice-présidentes, le collectif brandit la défense de « l’exception culturelle française », et vise à exercer une influence sur ceux qui édictent la réglementation audiovisuelle – à commencer par le gouvernement, le Parlement ou la Commission européenne.

Un manifeste commun

« Le secteur audiovisuel est un secteur économique très important : 300 000 personnes y travaillent, c’est plus que l’industrie automobile. » a rappelé Rodolphe Belmer. « Des mouvements tectoniques sont aujourd’hui à l’œuvre et bouleversent notre secteur » il a prévenu. Parmi eux : l’essor des téléviseurs connectés à Internet (80 % des Français en sont équipés), la percée des plateformes (Netflix, Amazon…), les nouveaux usages de la consommation télévisuelle sur smartphones et tablettes, l’appétit du public pour les réseaux sociaux et leurs courtes vidéos (sur TikTok, Instagram…), ou encore l’essor de l’intelligence artificielle.

Pour y répondre, les puissants mastodontes de la télévision désormais alliés au sein de La Filière audiovisuelle publient un manifeste commun. Arte devrait « rapidement » rejoignent le bal, mais pas Canal+, pourtant acteur majeur du secteur. «LaFa, c’est la famille. Nous nous aimons, nous nous adorons, nous nous disputons, mais au final nous savons ce qui est le plus important pour nous. a résumé Patrick Raude, secrétaire général de la SACD (Société des auteurs et compositeurs dramatiques). Plus important ? Un financement important de l’audiovisuel public (en plein débat à l’Assemblée nationale) et la levée des restrictions publicitaires pour les chaînes privées gratuites de la TNT, indique le texte.

Ce manifeste souligne la nécessité de« orienter les ressources publicitaires nationales vers les médias nationaux »tandis que YouTube, qui n’a pas les mêmes obligations réglementaires – la plateforme ne participe pas aux investissements dans la création – ronge le marché. Pas question, a rappelé Delphine Ernotte, que France Télévisions demande au gouvernement l’autorisation de diffuser davantage de publicité sur ses chaînes. « Nous devons nous serrer les coudes. Ce n’est pas en prenant à l’un pour donner à l’autre qu’on va s’en sortir. » dit-elle, suggérant « rechercher une richesse supplémentaire plutôt que de voler dans l’assiette de quelqu’un d’autre ».

La nouvelle association a énuméré d’autres objectifs : garantir l’autonomie budgétaire et les missions du CNC, défendre le régime d’indemnisation des intermittents du spectacle, la rémunération des artistes, acteurs, compositeurs, etc. Face aux plateformes américaines, elle est appelant à « garantir un traitement équitable aux chaînes de télévision ». « Il est important de parler d’une seule voix : c’est le moyen de se faire entendre en Europe. » a insisté Delphine Ernotte, indiquant sa volonté de « rééquilibrer le rapport de force entre les médias français et les médias mondiaux ».

Que pourraient gagner les téléspectateurs avec ce nouvel organisme de lobbying ? La défense de la création nationale, la qualité de l’information, de la fiction, du documentaire ou du film d’animation, ont interpellé les protagonistes. Elle lance une étude sur le poids économique de l’audiovisuel français, et publiera au printemps prochain un livre blanc contenant des recommandations. Coup de pub ou futur puissant outil de lobbying ? Annoncé le jour où Donald Trump compte nommer Elon Musk, propriétaire du réseau social « plateforme toxique » par Le Gardien –l’initiative française prend des allures de résistance.

 
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