La suspension des mandats d’arrêt dont bénéficient 31 dirigeants de l’ELN désignés comme porte-parole dans les négociations de paix avec le gouvernement relancées en 2022, dont le principal négociateur Pablo Beltran, est le signe d’un changement d’ère.
En moins d’une semaine, des affrontements entre groupes armés pour le contrôle des territoires, des plantations lucratives de coca et des routes du trafic de drogue ont fait plus de 100 morts dans trois régions de Colombie, dont plus de 80 morts et quelque 32 000 déplacés dans la zone montagneuse de Catatumbo (nord-est) seul, limitrophe du Venezuela. Il s’agit de l’une des pires crises humanitaires et sécuritaires que connaît la Colombie depuis plus d’une décennie.
Dans cette région, l’Armée de libération nationale (ELN) a lancé jeudi dernier une attaque sanglante contre les dissidents rivaux de la défunte guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) – qui ont refusé l’accord de paix de 2016 et repris les armes – mais aussi contre les civils. population.
“Ils tentent de prendre le contrôle de la frontière colombienne-vénézuélienne” pour augmenter leurs “revenus criminels”, a déclaré le ministre colombien de l’Intérieur Juan Fernando Cristo à Ocaña, petite ville à l’ouest de la cordillère.
Zilenia Pana, 48 ans, a fui les combats avec ses enfants âgés de 8 et 13 ans pour trouver refuge à Ocaña. Voir « les cadavres était triste, douloureux. Cela vous brise l’âme, le cœur”, a-t-elle déclaré à l’AFP. Elle dit qu’elle prie pour la fin des hostilités, afin qu’elle puisse rentrer chez elle avec ses enfants : « C’est tout ce que nous demandons. »
Selon Astrid Caceres, directrice de l’organisme public de protection des droits de l’enfant, entre 35 et 40 % des personnes déplacées sont des enfants et des adolescents. “Il pourrait y avoir” des mineurs parmi les morts, a-t-elle ajouté auprès de l’AFP.
Le ministère de la Défense a déclaré que 5 500 habitants de Catatumbo étaient confinés chez eux.
Le gouvernement colombien a déclaré lundi l’état d’urgence et mobilisé 5 000 soldats dans la région.
Si le président Gustavo Petro a annoncé lundi que l’ELN « a choisi la voie de la guerre et qu’elle aura la guerre », l’armée colombienne n’a jusqu’à présent avancé que prudemment dans le territoire contrôlé par les rebelles, en établissant des postes d’observation et en effectuant des patrouilles dans les zones urbaines. zones.
-Dans la ville frontalière de Tibu, des journalistes de l’AFP ont entendu mercredi au moins cinq fortes explosions, que l’armée a qualifiées de tirs d’artillerie.
Peu de signes laissent encore entrevoir une offensive à grande échelle ciblant les guérilleros ayant une idéologie révolutionnaire lointaine et qui se livrent au crime organisé et au trafic de drogue dans leurs bastions ruraux.
Lorsqu’il est arrivé au pouvoir en 2022, Gustavo Petro s’est engagé à mettre fin par le dialogue au conflit armé vieux de six décennies qui a causé la mort de 450 000 personnes. Il a depuis négocié avec plusieurs organisations armées du pays, dont l’ELN, sans parvenir jusqu’à présent à des accords concrets avec la guérilla, les trafiquants de drogue ou les groupes paramilitaires d’extrême droite.
Sa stratégie de « Paix Totale », passant par une réduction drastique des opérations militaires dans l’espoir d’assurer la paix, semble galvaudée.
L’envoyé spécial de l’ONU pour la Colombie a regretté devant le Conseil de sécurité que « le vide laissé par l’État » dans les zones reculées de Colombie facilite « le contrôle territorial et social » de la population civile.
“La crise de Catatumbo devrait être un signal d’alarme pour l’administration Petro”, a déclaré la directrice pour les Amériques de l’ONG Human Rights Watch, Juanita Goebertus, dans un communiqué.
Selon elle, « l’absence de politiques efficaces en matière de sécurité et de justice a permis aux groupes armés d’étendre leur présence et leur contrôle brutal » sur les communautés rurales. Elle estime que « le gouvernement devrait revoir de toute urgence ses stratégies de paix et de sécurité pour empêcher que des conflits similaires ne se développent à travers le pays ».
Selon les sondages, plus de la moitié des Colombiens sont opposés aux pourparlers de paix avec l’ELN et estiment que la stratégie de sécurité avec les groupes armés est mauvaise.
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