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pourquoi le tribunal a rejeté la demande d’un habitant de Villegailhenc contre un arrêté d’expropriation

Le 7 janvier 2025, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de Gérard Loubès, habitant de Villegailhenc. Après avoir refusé l’achat de sa maison via le Fonds Barnier, il a demandé l’annulation d’un arrêté préfectoral déclarant d’utilité publique l’expropriation de sa maison, “exposée à un risque naturel majeur de crues torrentielles”.

Les six arguments avancés par l’avocat de Gérard Loubès n’ont pas suffi. Le 7 janvier 2025, le tribunal administratif de Montpellier a statué. Et a rejeté sa demande, demandant l’annulation de l’arrêté préfectoral du 3 août 2022 relatif à la déclaration d’utilité publique (DUP) de « l’expropriation de biens exposés à un risque naturel majeur d’inondation torrentielle » et « cessibilité des bâtiments nécessaire à la sécurité des occupants ». Dans la nuit du 14 au 15 octobre 2018, à Villegailhenc, cette maison du 8 avenue du Languedoc, au confluent du Trapel et du Merdeau, a subi de plein fouet la fureur des vagues. Au petit matin, dans le village, le bilan est terrible : 870 bâtiments inondés, le 118 pont emporté et, lourd bilan humain, trois morts.

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Villegailhenc doit se réinventer. Le 17 juin 2019, la commune a signé, avec Carcassonne Agglo, une convention avec l’établissement public foncier (EPF) d’Occitanie permettant l’acquisition des bâtiments. « exposé à un risque naturel majeur d’inondations torrentielles » : près d’une trentaine de biens concernés. Une acquisition à l’amiable, grâce au Fonds Barnier, sera actée dans la majorité des cas. Mais les propriétaires de cinq biens disent non, refusant des offres comprises entre 90 100 et 333 200 € selon les maisons, pour un budget total de plus d’un million d’euros.

Risque prévisible, menace sérieuse pour des vies humaines, absence de solution alternative moins coûteuse

De quoi donner lieu à une enquête publique, et à cet arrêté préfectoral du 3 août 2022. Autorisant l’EPF à acquérir ces biens, le cas échéant, par expropriation pour procéder à leur démolition. Une procédure qui requiert trois conditions : “un risque prévisible”, « une menace sérieuse pour des vies humaines »et « l’absence de solution alternative moins coûteuse ». Des questions au cœur de la décision du 7 janvier 2025. Serge Loubès et son avocat ont porté l’affaire au fond. D’abord en pointant “l’insuffisance du dossier soumis à enquête publique”. Non, disent les juges : convaincus que le dossier part avec « une précision et une exactitude suffisantes des phénomènes naturels auxquels le bien est exposé, de l’importance et de la gravité de la menace qu’il présente pour la vie humaine ».

Plus de succès avec “erreurs de jugement” et “par la loi” soulevée, souligne l’avocat de Serge Loubès « des analyses et études passées qui n’ont plus rien à voir avec la situation actuelle ». Un parcours choisi pour évoquer la sécurité apportée par le nouveau pont sur la RD 118 et l’impact des travaux de restauration sur l’espace d’exploitation du Trapel. Oui, répond le tribunal, sur l’amélioration du débit. Mais en rappelant que, quelles que soient les études, les modèles tablent sur un débit de 250 m3/s. Bien inférieur à celui de 2018, estimé à 367 m3/s “à la hauteur de l’événement”. Surtout, il n’y a rien à conclure au terme du risque, et notamment pour « le domicile du demandeur […] parmi les plus impactés en termes de hauteur de crue » d’octobre 2018. La moyenne est donc exclue.

La survenance d’un événement comparable à celui de 2018 n’est pas dénuée de toute probabilité

Tout comme l’incertitude sur la période de retour d’un tel événement : “un siècle selon le dossier de l’enquête publique” ; « un à deux siècles d’étude (from ISL Ingénierie for Dreal, Editor’s note) du 12 avril 2019″ ; « 3 à 5 siècles selon les commentaires de l’ingénieur hydrologue produits par les requérants ». Vaste marge. Ce qui n’empêche pas le tribunal de rappeler « l’aggravation du phénomène de pluies intenses sur l’arc méditerranéen »documentée par les rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Avec, dans l’hypothèse d’une hausse des températures de 4°C, une probabilité 2,7 fois plus élevée de telles précipitations d’ici 2030-2050. Démonstration complétée en rappelant que “l’intensité de tels épisodes […] augmenterait de 7% pour chaque diplôme” augmentation de la température : « La survenance d’un événement comparable à celui de 2018 n’est pas dénuée de toute probabilité ».

Et de compléter le rejet de la demande en rejetant l’argumentation d’un “étage refuge dans le grenier”. N’en parle pas « exclure une menace sérieuse pour des vies humaines »jugera le tribunal. Fondant sa décision sur « témoignages » victimes d’octobre 2018 : « Le phénomène des vagues soudaines […] il ne reste que quelques minutes” aux résidents « s’abriter à l’intérieur s’ils le peuvent ou nager jusqu’à une zone de refuge ».

Exposé à des inondations « rapides, voire torrentielles »

Le 15 octobre 2018, Villegailhenc, coupée en deux après la disparition du pont RD 118, est un paysage de catastrophe. Résultat d’un épisode extraordinaire, une crue vieille de plus de cent ans (une chance sur 100 qu’elle se produise). A 2 heures du matin, près de Trapel, les rues étaient déjà des torrents d’eau, les maisons étaient inondées sur 50 cm. Et puis une vague arrive. En quelques minutes, les niveaux d’eau dépassent les 2 mètres dans le centre ancien, atteignant par endroits trois à cinq mètres : un cumul de plus de 300 mm de précipitations en 10 heures dans un rayon de 10 km ; débits du Merdeau (83 m3/s) et du Trapel (291 m3/s) plus de cinq fois supérieurs aux capacités de débit du village ; une vitesse des vagues « probablement plus élevé » à 1m/s. Autant d’éléments pour caractériser la typologie des crues de Trapel ainsi que les crues « rapide, voire torrentiel ».

 
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