Dans le cadre de la Journée internationale contre les violences faites aux femmes, la Région Occitanie Pyrénées-Méditionranée et le Mémorial de Rivesaltes avec le projet Jeunes et Citoyens ont invité les lycéens à participer à la conférence « Être femme en temps de guerre : entre oubli, mépris et combattre. » Khrystyna Zamula est intervenue. Elle est chef adjointe de l’administration militaire régionale de l’État de Lviv en Ukraine. Depuis mars 2024, son rôle est d’assurer le développement de la région et la mise en œuvre de la politique gouvernementale dans l’oblast. Dans les Pyrénées-Orientales, elle porte la voix des femmes en temps de conflit.
Khrystyna Zamula, pourquoi parler publiquement en Europe de la condition des femmes et de leur place dans les conflits armés ?
J’ai beaucoup de choses à dire. Depuis dix ans, et plus intensément ces trois dernières années avec l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie, la guerre a bouleversé la vie des femmes. Notamment dans leur quête de l’égalité des droits avec les hommes. Je suis comme toutes ces femmes qui mènent une vie active en Ukraine, combattantes et rebelles. En temps de guerre, il est difficile de parler d’égalité car l’essentiel pour nous reste la chance de pouvoir vivre, de survivre.
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« La violence contre les femmes ne sera pas oubliée, les criminels seront traduits en justice »
Que souhaitez-vous dénoncer sur ces violences dont les femmes sont victimes ?
En juin 2022 à Lviv, plus de 600 000 personnes ont été accueillies, dont des femmes, des enfants et des personnes handicapées. Beaucoup de ces femmes, qui attendent le retour de leurs maris partis au front, ont été violées à Boutcha, Irpin, ont perdu leurs proches et ont été touchées par des missiles de croisière. Le 4 septembre, Lviv est attaquée par des missiles russes. Une mère et ses trois enfants ont été retrouvés morts sous les décombres. Au même moment, une médecin enceinte est emprisonnée par les Russes. Heureusement, elle a été libérée lors d’un échange de prisonniers. Je peux aussi parler de ce couple qui adopte des enfants. Ils ont le courage de vouloir élever des enfants qui ne sont pas les leurs quand, au même moment, un de leurs fils biologiques décède au front. Ou encore cette femme près d’un train à qui on demandait avec quoi elle partait : elle nous montrait seulement son bébé dans ses bras.
Le problème de la santé mentale devient de plus en plus grave
Compte tenu de ce qu’elles subissent en temps de guerre, les femmes sont-elles les premières victimes et les oubliées ?
Depuis 2014, les femmes ne sont pas oubliées, c’est certain. Les violences commises contre eux ne seront pas oubliées, les criminels seront traduits en justice. Et le problème de la santé mentale est de plus en plus grave. Chaque jour, des femmes vivent avec des décès dans leurs familles, des blessures, des maisons qui tombent en ruine ou sans électricité ni chauffage. C’est pourquoi, à l’initiative de l’épouse du président Volodymyr Zelensky, il existe une émission que l’on pourrait traduire par « Comment vas-tu » pour parler des traumatismes. De plus, les enseignants sont formés pour réagir à temps s’ils détectent un malaise chez leurs élèves. Ou encore, dans chaque hôpital, il existe un centre de réadaptation psychologique pour accompagner les personnes souffrant de troubles mentaux.
La guerre a creusé le fossé dans le monde professionnel entre hommes et femmes
Les femmes investissent-elles dans l’économie ou l’industrie pour surmonter un traumatisme et continuer à maintenir l’Ukraine en vie ?
Comme les hommes sont au front, les femmes prennent des initiatives, comme par exemple le renforcement de l’économie du pays. 15% d’entre eux sont engagés dans les combats. D’autres se portent volontaires au front. Et en plus de tout cela, elles donnent naissance à des enfants, les éduquent, s’inquiètent pour leurs proches. C’est pourquoi certains ont également décidé de reconstruire leur vie à l’étranger, sans ressources ni papiers. Leur situation devient de plus en plus compliquée. Les femmes doivent se battre pour leurs droits. Vous savez, la guerre a creusé le fossé dans le monde professionnel entre les hommes et les femmes. En matière de responsabilités, lorsqu’une femme est seule face à des hommes, elle doit agir avec plus de rigueur et se faire entendre plus fort. C’est une responsabilité supplémentaire envers les autres femmes au risque d’accroître leur discrédit.
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Quelle lueur d’espoir anime encore les femmes en Ukraine ?
Chaque jour, au réveil, le meilleur espoir pour une femme est de savoir que ceux qui l’entourent sont en vie.
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